Chacune de vos questions mériterait un long développement, d'autant plus que certaines ne sont pas tranchées, car elles font l'objet d'expertises et de nos débats scientifiques.
Concernant les conseils et la décision, l'Agence produit des évaluations de risques transversales. Par exemple, quels sont les facteurs nécessaires pour protéger les pollinisateurs ? D'un côté, nous avons rendu plusieurs avis sur les différents facteurs de stress et leur impact sur les pollinisateurs. De l'autre, nous prenons des décisions de mise sur le marché de produits ayant une activité insecticide. Nous avons la possibilité, grâce à nos comités d'experts, d'établir un état de la littérature et des connaissances scientifiques pour évaluer et graduer le risque et son degré d'incertitude. En prenant en compte ces données scientifiques, produit par produit, nous délivrons une autorisation pour un usage (plus ou moins restreint). Nous appliquons la réglementation cotant les différents risques, qui est très précise. C'est en fonction de celle-ci que nous décidons la mise sur le marché ou le retrait de l'AMM d'un produit phytosanitaire.
Nous gérons trois classes de produits : les médicaments vétérinaires, les produits biocides et les produits phytosanitaires. C'est compliqué, car elles relèvent de trois agences européennes distinctes et de trois mécaniques d'évaluation et de délivrance des AMM différentes. Les décisions sont prises au niveau européen et coordonnées par l' European Chemicals Agency (ECHA) pour les produits biocides. La plupart des AMM des médicaments vétérinaires sont européennes – bien que quelques-unes restent nationales. Enfin, les produits phytosanitaires – comme je l'ai expliqué – font d'abord l'objet d'une homologation de la substance active au niveau européen, puis du produit au niveau national. Nous nous adaptons toujours, mais le principe même est de s'appuyer sur les données scientifiques disponibles et les évaluations de risques que nous conduisons. Elles sont prises en compte dans les décisions que nous prenons, qui ne sont pas contradictoires. Il est compliqué d'être désigné comme autorité de délivrance des AMM. L'Agence n'était d'ailleurs pas volontaire en ce sens en 2015.
Nous avons organisé un webinaire jeudi dernier à l'occasion de la journée européenne de l'antibiorésistance. Nous avons aussi publié deux rapports, l'un, portant sur les ventes d'antibiotiques pour la santé animale (selon les données produites par l'Agence du médicament vétérinaire, située à l'Anses à Fougères, à côté de Rennes) et l'autre portant sur l'exposition à l'antibiorésistance des animaux (sur la base des données du réseau d'épidémiosurveillance en santé animale). L'un et l'autre ont montré une baisse d'environ 10 % des volumes de ventes d'antibiotiques pour la santé animale par rapport à 2018. Cela démontre que le plan ÉcoAntibio a correctement fonctionné, avec une réduction de plus de 50 % des antibiotiques en santé animale. L'antibiorésistance a diminué. Cette réduction s'élève à 90 % pour les antibiotiques critiques pour la santé humaine dans le domaine de la santé animale. Enfin, nous avons publié un troisième rapport, unique, à la demande de nos ministères : une expertise collective de l'impact de l'environnement sur l'acquisition de l'antibiorésistance. Il s'agissait d'étudier la façon dont les bactéries du sol et les contaminants issus des stations d'épuration contribuent à l'acquisition d'une antibiorésistance chez l'animal ou chez l'homme, en lien avec la contamination environnementale. Nous menons beaucoup de travaux sur ce sujet.
En outre, nous finançons des études sur les cancers pédiatriques – notamment celles de Jacqueline Clavel de l'Inserm – mais nous ne les conduisons pas.