Permettez-moi de vous raconter la longue histoire de l'étiquetage des produits d'ameublement. Le code de l'environnement issu du Grenelle impose effectivement un étiquetage, un décret en Conseil d'État devant préciser les catégories de meubles concernées. Des décrets et des arrêtés d'application ont donc été préparés par mes services, après discussions avec les industriels du secteur, concernant l'obligation d'étiquetage des émissions de formaldéhyde. Ces projets avaient fait l'objet, début 2017, d'une consultation publique puis d'une notification européenne. En réponse, la Commission européenne a recommandé que ces mesures soient harmonisées, car relevant du règlement REACH (enregistrement, évaluation, autorisation des substances chimiques et restrictions applicables à ces substances), identifié par elle comme l'outil réglementaire adapté. Celui-ci nécessitant de démontrer un risque inacceptable plutôt que de mettre en place une solution d'étiquetage, l'Agence européenne des produits chimiques (ECHA) a proposé, début 2019, une restriction visant à interdire les articles émetteurs de formaldéhyde au-delà d'un certain seuil, établi en fonction d'une norme de l'OMS.
Le côté positif, c'est que nous disposerons rapidement d'un texte européen qui permettra de sortir du marché les produits, dont les meubles les plus émetteurs de cette substance. Mais nous voulons aller plus loin. C'est pourquoi, à l'occasion de la première phase de consultation publique de ce projet de restriction, la France a écrit à l'ECHA afin de l'informer, d'une part, que le HCSP venait de rendre ses travaux et proposait une valeur plus stricte que celle retenue par la Commission, et, d'autre part qu'elle allait prendre des mesures d'étiquetage. Compte tenu de l'énormité des enjeux, nous allons demander à la Commission qu'elle accélère son calendrier et soumette son projet de texte aux États membres le plus rapidement possible. Nous rappellerons notre demande et notre position sur le sujet : j'ai bon espoir que toutes les avancées promises par la stratégie européenne dans le domaine des produits chimiques nous permettront d'être entendus.
Je suis attentive à la démarche ERC, dont je rappelle qu'elle a été renforcée dans la loi pour la reconquête de la biodiversité en 2016. Comme l'a souligné le rapport d'application de ce texte, on peine à avancer aussi vite qu'on le devrait dans ce domaine. Il y a encore une forte tentation de passer directement à la compensation, sans chercher à éviter et à réduire. C'est une montagne à laquelle je m'agrippe et sur laquelle j'essaie de monter tout doucement depuis que je suis arrivée : en quatre mois, je ne pouvais évidemment pas résoudre tous ces problèmes.
J'ai lancé un travail sur le « zéro artificialisation nette », qui était une urgence. Il faut arrêter les projets qui entraînent une artificialisation. Nous avons instauré, comme l'avait demandé la Convention citoyenne, un moratoire sur les nouvelles zones commerciales. C'est néanmoins très insuffisant, et il faut aller plus loin. Nous sommes en train de peaufiner des mesures relatives à l'artificialisation dans le projet de loi Convention citoyenne pour le climat. C'est une première étape.
Nous continuons aussi à travailler avec les services pour faire en sorte que l'instruction des projets corresponde bien à l'esprit de la loi de ne délivrer d'autorisation que si les porteurs de projet s'engagent dans une véritable démarche « éviter, réduire, compenser ». Selon les premiers retours que nous avons, le simple fait de déclarer qu'on a engagé la démarche permet trop souvent, même si cela dépend beaucoup des services instructeurs, de passer à l'étape suivante. Nous voulons approfondir ce travail – clairement, il n'est pas abouti. La vérification doit être faite que la séquence « évitement » et « réduction » a vraiment été respectée, de même qu'un travail sur les mesures de compensation, dont le rapport de vos collègues Frédérique Tuffnell et Nathalie Bassire a montré qu'elles ne sont pas satisfaisantes : elles concernent souvent des sites déjà en bon état.
S'agissant de la qualité de l'air intérieur, des mesures sont effectuées dans les écoles et les crèches par les collectivités volontaires. Au-delà du livret d'accompagnement, l'Institut national de l'environnement industriel et des risques (INERIS) reçoit des données venant de laboratoires. Plusieurs milliers d'établissements sont concernés. Leurs données sont transmises au ministère de la transition écologique et ont vocation à intégrer le green data hub. La collection des données permettra aux scientifiques et aux administrations d'avancer.
Le PNSE 4 devrait être l'occasion d'apporter des améliorations. Il faut notamment que plus de collectivités s'approprient cette démarche, ce qui nécessite de les informer. La campagne nationale de mesure des polluants dans l'air doit vraiment être lancée et fortement déployée.
D'autres éléments, tout bêtes mais très importants, ont été identifiés, comme l'obligation de vérifier le bon fonctionnement des installations de ventilation dans les bâtiments neufs. Entre 40 % et 50 % de ceux qui sont contrôlés par l'État ont des systèmes de ventilation mal installés. La marge de progression est énorme.
On devrait également pouvoir agir par l'intermédiaire du diagnostic de performance énergétique. Intégrer une information sur les conditions d'aération et de ventilation serait une avancée notable. Il se trouve que nous sommes en train de travailler sur un nouveau diagnostic de performance énergétique : cela fait partie des éléments que nous souhaitons ajouter.
Par ailleurs, nous allons travailler sur d'autres lieux que les crèches et les écoles : il faut aussi avancer en ce qui concerne les enceintes ferroviaires souterraines, comme les métros.
J'ai déjà parlé du renforcement de la lisibilité de l'étiquetage. Le Toxi-score, qui permettrait de savoir tout de suite si on a affaire à un produit ménager qui est assez neutre ou dont les effluves sont, au contraire, dangereux, serait notamment très apprécié par le consommateur. Nous allons aussi avancer sur ce sujet.