Monsieur le président, monsieur le premier vice-président, mesdames et messieurs les parlementaires.
Je travaille au sein de la mission Etalab, qui est l'un des services du Premier ministre, et plus particulièrement au sein de la direction interministérielle du numérique.
Je vous remercie beaucoup pour votre invitation, notamment pour la possibilité qui m'est offerte de m'exprimer en ouverture de cette seconde table ronde, pour faire la liaison avec la discussion qui portait sur APB.
En début d'année 2017, la mission Etalab a été mandatée par l'ancien secrétaire d'État à l'enseignement supérieur et à la recherche, M. Thierry Mandon, pour analyser les conditions d'ouverture du système Admission Post Bac. À cette occasion, nous avons étudié à la fois le code source et l'environnement dans lequel fonctionne APB, afin d'être en mesure de formuler des recommandations à l'attention de l'Exécutif sur ce sujet. Notre rapport a été rendu en avril 2017. Il apparaît important de le préciser, dans la mesure où il ne vous aura pas échappé qu'entre cette date et aujourd'hui, le Gouvernement a changé.
Qu'avons-nous observé, en étudiant APB, qui pourrait nous apporter matière à une réflexion plus globale sur les algorithmes publics ? J'ai entendu, lors de la première table ronde, des éléments très intéressants, qui nous montrent que le dispositif APB, dans sa configuration 2016 – 2017, est un système plutôt efficace. Il s'agit effectivement d'un aspect que nous avions également pu remarquer. Toutefois, ce système est aussi efficace qu'incompréhensible. Ce point mérite d'être souligné, notamment dans la mesure où nous allons le retrouver dans d'autres problématiques de l'action publique impliquant des algorithmes. La question est alors de savoir quelle part l'on est prêt, socialement, à accepter, entre un système qui fonctionne bien, mais que l'on a du mal à expliquer, et un dispositif qui fonctionne moins bien, mais que l'on a beaucoup plus de facilité à expliquer.
APB est un dispositif efficace, permettant de faire converger l'offre et la demande de manière beaucoup plus rapide qu'auparavant. Le rapport de la Cour des comptes évoque un différentiel de trois mois par rapport au système sans algorithme d'affectation utilisé au Royaume-Uni. Ces trois mois gagnés représentent surtout une moindre attente pour les candidats.
Ce système est cependant, ainsi que le mentionnait un intervenant précédent, totalement incompréhensible. Ceci est largement lié à l'opacité du dispositif qui génère, notamment, des questions sur son périmètre même. Je ne reviens pas sur la question du tirage au sort, qui constitue très clairement le talon d'Achille de la plateforme. On pourrait ainsi dire du tirage au sort dans APB, en paraphrasant La Fontaine qui écrivait dans l'une de ses fables : « ils ne mourraient pas tous, mais tous étaient touchés », que « quelques-uns étaient tirés au sort, mais tous étaient touchés ». En effet, même si seule une faible proportion de personnes est concernée par le tirage au sort, cela mine la confiance dans l'ensemble du dispositif. Peut-être y a-t-il là un enseignement à tirer pour demain, pour d'autres systèmes algorithmiques que l'on pourrait prévoir.