Intervention de Françoise Nyssen

Réunion du mercredi 15 novembre 2017 à 16h15
Commission des affaires culturelles et de l'éducation

Françoise Nyssen, ministre de la Culture :

Même si le sujet n'est pas en lien avec le programme du prochain conseil de l'Union européenne en formation « Culture », monsieur Testé, les ateliers Médicis de Clichy-Montfermeil, qui ont été créés en s'inspirant de l'Académie de France à Rome, reposent en effet sur l'idée qu'ils doivent accueillir des artistes européens en résidence. Ouvert sur son environnement, ce lieu permettrait d'établir des passerelles entre les arts et les citoyens. La référence Médicis a été choisie comme garantie d'un projet différent et d'excellence. C'est pourquoi les moyens sont là. Il convient toutefois aujourd'hui d'accompagner la définition du projet, notamment en réfléchissant au lien avec l'Académie de France. Une structure temporaire a vocation à accueillir le projet de préfiguration de ces ateliers, jusqu'à l'inauguration effective en 2024. Une phase d'expérimentation a été lancée, afin d'implanter in situ un laboratoire de référence dédié à la jeune création et aux émergences artistiques et culturelles. Il s'agit d'un lieu éphémère. Je me réjouis que, dans ce cadre, des artistes français et européens aient déjà été accueillis en 2017, pour permettre à des projets de se monter dans chacune des trois principales actions. Nous attachons beaucoup d'importance à ce projet : la visite du Président de la République en atteste.

Madame Dumas, à propos de l'exception culturelle, je vous remercie d'avoir entendu l'appel aux parlementaires et créé un groupe de travail. Avec tous les interlocuteurs déjà reçus au ministère, nous nous rendons compte que les choses ne sont pas gagnées et qu'on aura besoin de toutes nos forces. Compte tenu de vos connaissances des sujets, il est extrêmement précieux que vous puissiez y travailler, je vous en remercie.

S'agissant de la directive SMA, vous me demandez quelles sont les avancées techniques sur la problématique du pays d'origine et m'interrogez sur l'évolution du trilogue. Je rappelle les enjeux : il faut renforcer la protection du public, aujourd'hui insuffisante sur les plateformes vidéo, et conjuguer ambition et équité concurrentielle entre les différents services de média audiovisuels, linéaires et non linéaires.

À l'initiative du Gouvernement, le texte actuellement négocié prévoit que les services de vidéo à la demande devront réserver un quota de 30 % d'oeuvres européennes présentées dans leur catalogue. Ils seront assujettis aux obligations de contribution financière en vigueur dans l'État qu'ils ciblent, quel que soit le pays d'établissement. Je me suis battue personnellement pour cela. C'était à la veille de la négociation, je venais à peine d'arriver. Ce fut une victoire. Nous en sommes donc là aujourd'hui et il faut continuer à travailler. La meilleure réponse à votre question est sans doute la constitution de votre groupe de travail.

Madame Pau-Langevin, s'agissant du travail des associations dans la lutte contre les propos haineux, l'orientation générale votée par le Conseil des ministres de la culture du 23 mai inclut, pour la première fois, dans le champ de la réglementation audiovisuelle, cette notion, y compris au niveau des plateformes de partage vidéo et des réseaux sociaux. Cette extension, que nous avons souhaitée, apporte une réponse à la critique selon laquelle les plateformes n'auraient pas de responsabilité quant au contenu audiovisuel qu'elles mettent à disposition, alors qu'elles jouent un rôle désormais majeur dans leur diffusion en Europe.

Les plateformes de partage vidéo seront tenues de prendre des mesures appropriées, notamment pour protéger le public des vidéos comportant une incitation à la violence ou à la haine, voire à la commission d'une infraction terroriste. En ce domaine, la nécessité de responsabiliser les plateformes apparaît avec une grande évidence. Il faut, effectivement, qu'elles puissent s'appuyer sur les initiatives prises en la matière par certaines plateformes. Même si ces initiatives sont encore éparses et insuffisantes, elles témoignent d'une prise de conscience extrêmement importante.

Madame Essayan, le budget, le calendrier et les priorités de l'Erasmus de la culture seront discutés au prochain Conseil. À la suite de la réunion de Francfort, je propose une déclaration commune, car il faut très vite enclencher des actions concrètes. Cela passe aussi par les financements d'Europe Créative. C'est pourquoi nous allons aussi nous battre pour que ce budget soit, a minima, maintenu. Dans l'enthousiasme de la réunion de Francfort, nous avions même imaginé qu'il puisse augmenter. Pour démarrer concrètement, un projet pilote a été lancé pour Erasmus, à travers des échanges dans le domaine du patrimoine. Nous demandons à Europe Créative d'en faire une priorité. Cela marquera les esprits, je crois. On a vu l'impact extraordinaire d'Erasmus pour les étudiants, il est vraiment important de faire de même pour les artistes et les professionnels de la culture, tant on a à apprendre les uns des autres.

Madame Dubois, l'ouverture à la jeunesse du festival de Sarlat met effectivement en évidence l'excellente idée de s'ouvrir aux lycées européens. Ce festival réunit plusieurs centaines de jeunes lycéens cinéphiles de toute la France, qui passent le baccalauréat option Cinéma. Ils passent une semaine à découvrir des oeuvres, à en débattre, mais aussi à en créer par le biais des différents ateliers. C'est un symbole du rôle-clé que peuvent jouer les festivals pour renouveler les nouveaux publics, mais aussi pour former les nouveaux talents. C'est important, car le cinéma est porteur de connaissances sur toutes les cultures. C'est pourquoi j'attache aussi beaucoup d'intérêt aux opérations de médiation que peut mener le Centre national du cinéma auprès des établissements scolaires, via le service civique. En accueillant des jeunes du Québec, le festival montre que le chemin passe aussi par l'ouverture aux autres cultures et par l'échange avec des jeunes d'autres pays. Il faut accompagner cette ouverture vers l'Europe et faire de ce festival un modèle qui puisse être décliné.

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