Intervention de Béatrice Santais

Réunion du mercredi 24 juillet 2019 à 11h10
Commission d'enquête sur l'impact économique, industriel et environnemental des énergies renouvelables, sur la transparence des financements et sur l'acceptabilité sociale des politiques de transition énergétique

Béatrice Santais, maire de Montmélian :

Je suis heureuse d'être ici ce matin, et de retrouver ces lieux pour évoquer ma ville de Montmélian ainsi que le solaire. Montmélian, c'est un peu moins de 4 200 habitants. C'est une petite ville dans un secteur rural, au cœur d'une communauté de 41 communes d'à peine 37 000 habitants. Nous sommes – et on aime bien le dire – des pionniers de l'énergie solaire puisque l'histoire solaire de Montmélian a démarré il y a 36 ans, en 1983. Elle a été récompensée à divers moments et en particulier en 2014 à Pékin où la ville a reçu un prix pour récompenser son engagement durable en faveur du solaire thermique. Montmélian c'est aussi près de 50 % de logements sociaux et beaucoup d'emplois. C'est en Savoie, au cœur d'un secteur économiquement dynamique, que nous avons créé, il y a quelques décennies et avec deux autres communes plus rurales, un beau parc d'activités qui s'appelle Alpespace. Il représente aujourd'hui 2 600 emplois. Notre ville de Montmélian représente par ailleurs 2 000 emplois. Notre politique de développement durable commence par le développement économique et se poursuit avec une politique d'accueil d'une population nouvelle depuis 40 ou 50 ans et la cerise sur le gâteau, c'est la politique écologique que nous menons depuis toutes ces années.

Le début de l'histoire solaire de Montmélian commence en 1983 avec le choix du maire de l'époque d'installer, sur les toits des vestiaires du centre nautique, 220 m2 de capteurs solaires. Le maire de l'époque était parlementaire et était allé au congrès mondial de l'énergie à New Delhi au début des années quatre-vingt. Il avait perçu, si ce n'est l'urgence climatique, la nécessité de voir autrement le développement de nouvelles énergies pour ce monde. Il a simplement voulu tester et expérimenter des choses dans sa petite commune qui n'avait pas 4 000 habitants à l'époque. Depuis, nous n'avons pas cessé d'avancer. Dès la première année à la piscine, on a gagné 75 % de notre facture énergétique de fioul. On a toujours maintenu cette économie même en passant ensuite au gaz. On a pu produire avec nos capteurs quelque 130 000 kWh par an, évitant ainsi le rejet de 26 tonnes de CO2 chaque année dans l'atmosphère. L'intérêt de cette « opération piscine » c'est qu'elle pouvait se coupler l'hiver - puisqu'en cette période la piscine découverte de Montmélian n'est pas ouverte au public – avec l'eau chaude sanitaire dont on avait besoin dans nos vestiaires de foot et de rugby. Les panneaux solaires tournent toute l'année et nous permettent d'avoir de l'eau chaude sanitaire et de chauffer la piscine douze mois par an.

Nous avons très vite été suivis. Il y a eu un effet d'entraînement. Cela a été vrai pour ce qu'on appelait à l'époque l'hôpital local, devenu depuis un Ehpad, avec ses 176 lits. Là, on a construit le plus grand toit solaire d'Europe à l'époque avec 400 m2 de capteurs. L'OPAC – qui est un partenaire évident à Montmélian avec près de 50 % de logements sociaux – a installé des capteurs solaires sur des immeubles existants et propose ainsi une eau chaude sanitaire solaire et une économie pour les locataires. À la fin des années quatre-vingt-dix, nous n'étions qu'au tout début de la lutte contre la précarité énergétique, même si nous ne l'appelions pas comme cela.

Puis est venu le temps de la diversification dans le solaire avec l'installation de capteurs photovoltaïques. C'est ce que nous avons fait sur les toits des services techniques avec, à l'époque, la visite de Monsieur Borloo. Nous avons expérimenté de nombreuses choses à Montmélian et c'est ce que peuvent faire les collectivités locales en lien avec des entreprises qui travaillent avec nous. Nous avons expérimenté des capteurs autovidangeables l'été, des capteurs semi-transparents, un mur solaire et de nombreuses techniques qui ont permis de faire progresser le solaire thermique et le solaire photovoltaïque.

Enfin, depuis une quinzaine d'années, nous avons élargi les domaines d'action de la collectivité en matière de développement durable grâce, en particulier, à une labellisation européenne dont nous sommes très fiers et qui est octroyée par l'Ademe. Nous avons été labellisés Citergie en 2007, puis renouvelé en 2011 ainsi qu'en 2015, et nous espérons bien être renouvelés fin 2019. Un label permet de reconnaître l'exemplarité d'une politique menée en matière de développement durable et en particulier en matière d'énergie climat. C'est aussi bien sûr la reconnaissance de tout ce qu'on a fait. Ce sont surtout des engagements à faire encore puisque le label est renouvelable tous les quatre ans. C'est également le moyen d'être évalué en permanence sur ses propres performances, en termes de production d'énergie, en termes de CO2 qu'on ne rejette plus dans l'atmosphère. Nos résultats sont ainsi évalués par d'autres. Si l'Ademe pouvait continuer d'aider les collectivités locales pour le montage des dossiers Citergie, ce serait une bonne nouvelle. Pour ce troisième renouvellement et cette quatrième labellisation, c'est la première fois que nous ne serons pas aidés financièrement par l'Ademe.

Ces dernières années, nous avons beaucoup travaillé à la rénovation énergétique de nos bâtiments publics. C'est essentiel. Avant de penser énergies renouvelables, il faut vraiment que l'on soit très économe en énergie. On y a mis, pour une petite commune de 4 000 habitants, plus de 300 000 euros par an ces dix dernières années pour des travaux d'isolation par l'extérieur, d'isolation de toiture, de changement de fenêtres et tout ce qui fait qu'un bâtiment est plus performant d'un point de vue énergétique. Nous avons gagné près de 22 % de nos consommations de gaz. Chaque année, nous remettons au Conseil municipal un bilan énergétique de la collectivité. Nous suivons ainsi vraiment la progression de nos consommations. Nous avons diminué notre consommation d'électricité d'un peu plus de 8 %, notre éclairage public de près de 50 %, et nous avons réduit de 25 % notre facture de carburant.

L'OPAC nous a encore suivis avec aujourd'hui plus de 240 logements sociaux réhabilités. C'est environ 37 % de la facture énergétique qui est gagnée pour les locataires. C'est le meilleur travail que nous pouvons faire en termes de lutte contre la précarité énergétique. Nous avons mis en place, avec la communauté de communes, une plateforme de rénovation énergétique pour aller vers les particuliers.

Les communes peuvent faire des choses importantes en matière d'urbanisme. Nous avons fait une OAP (orientation d'aménagement et de programmation) avec un objectif d'exemplarité énergétique et environnementale. Dans cette OAP thématique, nous avons précisé que 50 % de l'énergie primaire – c'est-à-dire les besoins en eau chaude sanitaire, en chauffage et éventuellement en rafraîchissement – devait être satisfaite, pour toute nouvelle construction, par une énergie renouvelable en privilégiant, pour ce qui nous concerne, le solaire, sauf à démontrer par une étude d'approvisionnement énergétique que ce n'est pas faisable. C'est une règle qui n'est pas pratiquée partout dans ce pays et que l'on pourrait peut-être imposer dans les nouveaux PLU. Nous l'appliquons depuis plus de deux ans maintenant et cela fonctionne bien, personne ne nous le reproche et on trouve toujours des solutions.

Aujourd'hui, nous avons quelques projets d'autoconsommation notamment sur un bâtiment ancien inscrit à l'inventaire des monuments historiques. Nous souhaiterions faire de l'autoconsommation électrique sur ce bâtiment et donc installer des panneaux solaires photovoltaïques. Quand on est dans un centre ancien, c'est toutefois compliqué de trouver des ardoises compatibles avec les souhaits des architectes des Bâtiments de France. Ce serait bien qu'il existe un peu plus de souplesse. Nous avons trouvé une solution en Belgique et j'aimerais bien qu'on puisse la mettre en œuvre.

Nous menons cette démarche ambitieuse avec la communauté qui est labellisée territoire énergie positive et qui avait bien sûr été labellisée territoire énergie positive pour la croissance verte par Ségolène Royal en 2015. Nous travaillons sur le plan climat air-énergie qui devrait être voté très prochainement. Cela concerne non seulement la commune de Montmélian mais aussi notre communauté et peut-être d'autres communes.

En conclusion, nous sommes des élus pas des techniciens. Le solaire thermique, cela marche et c'est une belle énergie qu'il faut développer. La transition énergétique doit se faire et elle passe forcément par les collectivités locales.

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