Intervention de Jorge Vasconcelos

Réunion du jeudi 25 juillet 2019 à 14h00
Commission d'enquête sur l'impact économique, industriel et environnemental des énergies renouvelables, sur la transparence des financements et sur l'acceptabilité sociale des politiques de transition énergétique

Jorge Vasconcelos :

. Nous le savons, le commerce transfrontalier est possible. Il existe depuis le début du XXIe siècle. Les gestionnaires affirmaient que l'utilisation par des usagers individuels des interconnexions ne mettait pas en péril la gestion du système intégré, ce n'était pas vrai. La première directive de 1996 prévoyait ce droit de commerce transfrontalier aux gros consommateurs mais n'affichait aucune indication sur les règles d'application de ce principe, la décision était laissée à l'appréciation de chaque État membre. Et donc cela ne marchait pas en pratique. La Commission l'a reconnu très tôt, en 1998. Elle a convoqué en forum les régulateurs de l'époque, assez peu nombreux, les ministères des pays où il n'y avait pas de régulateur – la France, par exemple, n'avait pas encore de régulateur – et les représentants de l'industrie pour résoudre ce problème d'une façon volontaire, sans avoir à produire une nouvelle directive ou un règlement.

Ce processus, connu sous le nom de Forum de Florence, a abouti. C'est ainsi qu'au début de l'année 2000, nous nous étions tous accordés sur un schéma qui permettait le fonctionnement des interconnexions.

Pour ce qui concerne la capacité des gestionnaires de réseaux à gérer les intermittences, on doit y croire, oui, mais cela ne correspondait pas du tout à leur première réaction. Aujourd'hui, ils nous disent que c'est possible, mais, il y a dix ans, ils affirmaient que c'était quasiment impossible. Lorsque j'ai pris mes fonctions de régulateur de l'énergie en 1996, les gestionnaires de réseau au Portugal affirmaient que le maximum de capacités renouvelables qu'ils pouvaient raccorder au réseau était de 300 MW.

Je leur ai demandé de me présenter des études. Ils m'ont dit ne pas en avoir mais « qu'ils savaient ». J'ai alors commandé une étude à un institut de recherche. Au fur et à mesure que l'étude progressait, les gestionnaires de réseaux venaient me voir pour me dire que l'on pouvait arriver à 450 MW, puis ils m'ont parlé de 550 MW ; à la fin de l'étude, nous étions à 1 000 MW ! On pouvait, en effet, raccorder beaucoup plus sans investissements supplémentaires dans les réseaux. Le Portugal compte aujourd'hui plus de 5 000 MW éoliens.

En 2000, je me suis rendu en Hongrie. Le gestionnaire de réseau racontait exactement la même chose à son régulateur. Il avançait 300 MW, c'était devenu une sorte de chiffre magique ! Nous savons depuis que ce n'était pas vrai.

Selon moi, la question n'est pas tant de savoir si les gestionnaires des réseaux de transport sont en mesure de gérer ces problèmes. Ils le font aujourd'hui dans les pays nordiques, un peu partout en Europe, où les pénétrations sont, par exemple, sur une année, de plus 40 % au Danemark, de 30 % en Espagne et au Portugal. Pendant certaines périodes, on intègre uniquement des renouvelables pendant trois ou quatre jours consécutifs. Cette capacité technique est donc démontrée. Le problème c'est qu'avec la décentralisation, nous avons besoin d'une gestion partagée entre les gestionnaires des réseaux de transport et les gestionnaires de réseau de distribution ; or, ils ne veulent pas partager la responsabilité. C'est l'un des obstacles à une transition énergétique efficace que nous devons résoudre aujourd'hui. Ce manque de gouvernance que l'on a observé par le passé lors de la construction du marché intérieur se répète aujourd'hui dans le processus de décentralisation, mais au manque de gouvernance au niveau local se surajoute aujourd'hui un manque de gouvernance et de coordination entre le niveau local et le niveau national.

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