Intervention de Éric Coquerel

Réunion du mercredi 10 juin 2020 à 9h30
Commission des finances, de l'économie générale et du contrôle budgétaire

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaÉric Coquerel :

Gérald Darmanin nous a expliqué hier que la crise du Covid-19 était une crise épidémique qui n'avait rien d'une crise systémique ; j'ai trouvé ces propos largement contradictoires avec ceux d'Emmanuel Macron qui déclarait le 12 mars dernier que le marché ne pouvait pas tout et qu'il fallait revenir à l'État-providence.

Si le système n'était pas en cause, comment expliquer que la crise épidémique se soit aussi vite transformée en crise sanitaire, puis en crise sociale et en crise économique ? Tout cela est entre autre lié au fait que, depuis des années, au nom de la baisse des dépenses publiques – alpha et oméga de toute politique libérale –, on a affaibli les hôpitaux et notre système de santé publique. Dans le même esprit on a concédé des cadeaux fiscaux toujours plus importants aux plus riches, partant du principe que, dans un contexte de concurrence internationale, favoriser les revenus du capital créait de l'emploi. Cela fait trente ans que ça dure, trente ans que cela ne marche pas, trente ans que cela affaiblit la capacité de l'État à réagir aux aléas quotidiens et, plus encore, à des crises aussi chaotiques que celle-ci.

Veut-on d'un monde d'après aussi inégalitaire que celui dans lequel nous vivons depuis trente ans ? On nous répète qu'il faut baisser la pression fiscale, mais en réalité on favorise toujours les plus riches – et pas n'importe lesquels : les plus riches détenteurs de capitaux. Or force est de constater que cela ne favorise pas l'intérêt général, cela ne crée pas d'emplois, cela ne soutient pas la relance économique. En revanche, cela crée des profits et de la spéculation : j'en veux pour preuve le fait que les bourses redémarrent au moment même où l'économie réelle entre en crise.

Cette proposition de loi vise donc juste : il faut arrêter les cadeaux mirifiques accordés depuis deux ans et demi au 1 % des plus riches par cette majorité qui a dans le même temps réussi l'exploit de faire baisser le pouvoir d'achat des 10 % les plus pauvres. Cela passe notamment par le rétablissement de l'ISF, qui n'a rien d'une mesure symbolique : les 3,5 milliards d'euros qu'a coûtés la suppression de l'ISF à l'État correspondent peu ou prou au coût du plan d'urgence pour l'hôpital présenté par les syndicats.

Une grande réforme fiscale est nécessaire, mais commençons au moins par l'adoption de cette proposition de loi pour faire en sorte que les plus riches cotisent quand le pays est en aussi mauvaise situation.

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