Intervention de éric Lombard

Réunion du mardi 29 septembre 2020 à 17h30
Commission des finances, de l'économie générale et du contrôle budgétaire

éric Lombard, directeur général de la Caisse des dépôts et consignations :

Nous sommes effectivement actionnaires de Veolia et représentés à son conseil d'administration, et nous sommes aussi actionnaires de Suez de façon beaucoup plus modeste et d'Engie. Nous sommes d'ailleurs partenaire d'Engie dans ses entités GRT Gaz et la Compagnie nationale du Rhône. Néanmoins, la défense de nos intérêts patrimoniaux n'est pas la seule motivation de la CDC pour agir et notre actionnariat dans ces entités ne guide pas nos décisions.

Notre administrateur au conseil d'administration de Veolia a soutenu la proposition faite à la suite de la mise en vente par Engie de sa part de capital de Suez. Bien que j'aie suggéré publiquement l'instauration d'un dialogue entre les parties, ceci ne semble pas avoir eu lieu. Actuellement, les conseils d'administration travaillent et la décision leur appartient.

Concernant notre rapprochement avec La Poste, les résultats opérationnels de l'activité courrier de cette entité ne seront pas bons, puisqu'elle a considérablement baissé durant le confinement. Mais l'apport de CNP Assurances permettra d'afficher de bons résultats d'ensemble. Le simple fait que ce très grand service public ait les moyens de traverser une telle crise représente pour moi un premier effet positif de notre opération. Je ne doute pas, par ailleurs, que La Poste réagira et s'adaptera au nouvel environnement.

S'agissant des coopérations, depuis que CNP Assurances est une filiale à 60 % de La Banque postale, la qualité de leur coopération s'est améliorée au service à la fois des clients et de l'intérêt économique des deux entités. D'autres coopérations se développent en logistique urbaine au travers de notre filiale commune Urby. Nous signons avec la plupart des métropoles des opérations de logistique urbaine à base de mobilités douces mutualisées pour éviter l'encombrement des centres-villes par des véhicules de livraison. Outre l'intérêt général, cela protège la planète et la qualité de vie dans les centres-villes.

Nous développons conjointement avec l'État des espaces France Services pour porter les services publics sur tous les territoires via les bureaux de poste et pour apporter du soutien aux personnes isolées, activité qui n'a jamais cessé durant le confinement. De nouveaux développements se mettront en œuvre progressivement et nous souhaitons en priorité apporter de la qualité de service à nos concitoyens. Les équipes de direction travaillent dans un bon esprit de coopération.

S'agissant de la contribution versée par la CDC à l'État, elle reste importante en 2020. La contribution représentative de l'impôt sur les sociétés et le versement au titre des résultats 2019 décidé conjointement par la commission de surveillance et le ministre représentent 1,4 milliard d'euros. Cette année, compte tenu de la difficulté de la période, l'État a pris la décision prudente de ne pas effectuer de prélèvement sur le résultat des fonds d'épargne – une somme potentiellement de l'ordre de 360 millions d'euros – pour renforcer la solvabilité de ceux-ci, bien qu'elle ne soit pas menacée.

En 2021 le montant de la contribution représentative de l'impôt sur les sociétés inscrit en projet de loi de finances pour 2021 est inférieur à 100 millions d'euros. Par ailleurs, j'ai d'ores et déjà informé le ministre que le versement qui sera opéré au titre des résultats 2020 sera probablement autour de zéro. Bien qu'il soit encore tôt dans l'année, il paraît déraisonnable d'avoir des attentes trop élevées.

Enfin, selon ma compréhension, l'État a intégré dans le plan de relance 20 milliards d'euros venant de la CDC, en prenant en compte ce que nous entendons dépenser dans les deux prochaines années. Naturellement, la CDC continuera à investir après cette échéance, mais il nous semble que notre rôle contra-cyclique est de porter un effort particulier pour ces deux années.

S'agissant de l'articulation des financements entre nos fonds et ceux des pouvoirs publics, il est certain que, pour conserver notre agilité, nous devons agir suivant notre mandat d'autonomie opérationnelle. En revanche, nous serons probablement associés au comité de suivi qui sera piloté par le ministre de l'économie, des finances et de la relance pour rendre compte de nos actions respectives. Sur le terrain, nous avons convenu que les délégués régionaux de la Banque des territoires informeront les préfets du déroulé de leur action par souci d'interaction. Nous aurons un suivi opérationnel régulier du montant décaissé en fonds propres et en financement et nous informerons notre gouvernance et le Gouvernement.

Concernant les entreprises en milieu rural, Bpifrance et nous-mêmes avons le mandat de soutenir toutes les entreprises sur tous les territoires. À titre d'exemple, la Banque des territoires va investir 500 000 euros dans la création d'une fromagerie à base de lait de chèvre en Dordogne dans le cadre d'une filière responsable. Dans un accord de moyen terme avec la distribution, cette fromagerie, Le Chêne vert, s'est engagée sur une politique de prix assurant un niveau de vie convenable aux éleveurs caprins. Les fonds négociés avec les régions nous permettent d'obtenir ce maillage très fin sur les petites entreprises, notre préoccupation étant d'éviter que les petits acteurs soient démunis. Nous y serons attentifs.

Sur la répartition entre la Banque des territoires, La Banque postale et Bpifrance, je ne suis pas en situation de vous présenter un maillage par territoire. Cependant, chacune de ces entités a un mandat très clair. La Banque des territoires est en charge du financement de long terme du logement social et des collectivités locales, à plus de vingt-cinq ans, et du financement des infrastructures des projets énergétiques. La Banque postale agit dans le secteur concurrentiel ; elle finance les collectivités locales pour les durées de marché, jusqu'à vingt‑cinq ans, et les entreprises, comme les autres réseaux bancaires. J'attire votre attention sur son rôle citoyen, car La Banque postale « ouvre toujours sa porte » aux personnes modestes. Bpifrance est, quant à elle, une banque publique de développement qui intervient toujours en cofinancement avec une banque commerciale. L'accord conclu avec l'État nous donnant le contrôle exclusif du groupe La Poste, nous pouvons organiser les missions de ces différentes entités. Nous clôturons l'acquisition de la SFIL demain et elle s'insérera en poursuivant sa mission de refinancement.

L'élargissement de l'usage des fonds d'épargne n'est pas un sujet ressortant de la loi de finances, selon moi, mais d'un aménagement décidé par le ministre.

S'agissant des grandes participations stratégiques de la CDC, de nombreux mouvements ont déjà eu lieu s'agissant de Bpifrance ou CNP Assurances. Nous n'avons pas prévu d'autres opérations de cette envergure, d'autant que nous avons choisi de concentrer nos fonds propres dans le plan de relance, qui est urgent pour les territoires.

Enfin, j'ai un regard très positif sur le PIA. Selon moi, c'est un programme extrêmement efficace, souple et rapide. Nous le connaissons bien, car sur les 22 milliards d'euros du plan de relance alloués au PIA 4, la CDC en gère 5,8 milliards d'euros. Le PIA est très utile, car il permet de réaliser certains investissements qui auraient sinon du mal à trouver leur financement, notamment du fait de leur caractère innovant ou de leur situation en zone rurale.

Concernant notre intervention sur les sols, nous pouvons consacrer du capital à l'implantation de certaines usines. En matière forestière, nous sommes prêts à contribuer au rachat de forêts pour les protéger et les exploiter de façon durable. Les dirigeants de la Société forestière, deuxième gestionnaire en France qui gère 300 000 hectares, le savent.

Sur le climat, je pense comme vous que l' intracting doit se développer. 500 millions d'euros sont prévus pour ces nouvelles modalités de financement de la rénovation de bâtiments sociaux. Certes, il faut trouver les projets et les investisseurs prêts à s'engager de cette façon, mais l' intracting dépasse d'ores et déjà le domaine de l'expérimentation.

S'agissant de la question de l'eau, le précédent Gouvernement a mis en place les « aqua prêts » pour financer la rénovation des canalisations d'eau en France, sur une durée allant jusqu'à soixante ans. Nous espérons que ces financements nouveaux, en incitant les entreprises délégataires et les collectivités locales à rénover le système d'adduction d'eau, entraînent les industriels français fournisseurs d'équipements. De plus, au travers d'usines à énergie positive, l'adduction d'eau participe aussi à la transition écologique.

S'agissant de l'Afrique, le projet de rapprochement entre l'AFD et la CDC nous a amenés à travailler ensemble. J'y vais régulièrement, conjointement avec les équipes de l'AFD. Des Caisse des dépôts se développent en Afrique occidentale. Elles sont fédérées dans un groupement qui associe également les sociétés sœurs européennes, tandis que l'AFD intervient pour financer des projets.

Par ailleurs, nous évaluons l'efficacité de la rénovation énergétique par l'impact sur la consommation d'énergie. Nous avons essayé d'assouplir notre méthode de mesure pour limiter les freins à l'utilisation des financements. Effectivement, nous nous inscrivons dans la trajectoire d'un réchauffement de 1,5 degré en 2050 et nous ne finançons pas d'énergie fossile. En outre, nous avons cessé d'investir chez des opérateurs pour lesquels le charbon représente plus de 10 % des ressources en énergie. Nous gérons notre portefeuille de façon très active conformément à la trajectoire de la COP21, ce qui est à la fois ambitieux et essentiel.

S'agissant de notre engagement actionnarial, nous interrogeons chaque année les sociétés de notre portefeuille sur leur politique de responsabilité sociétale et environnementale. Si elle n'est pas satisfaisante, elle donne lieu à un vote en tenant compte en assemblée générale des actionnaires ou à une cession de nos participations. La transition écologique et énergétique étant l'une de nos priorités, nous privilégions le dialogue actionnarial pour inciter les sociétés du portefeuille à accélérer leur démarche en ce sens.

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