Intervention de Laurent Saint-Martin

Réunion du mercredi 7 octobre 2020 à 14h30
Commission des finances, de l'économie générale et du contrôle budgétaire

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaLaurent Saint-Martin, rapporteur général :

Rappelons en préambule que, dans la fiscalité écologique, l'État paie davantage qu'il ne reçoit. Avec les bonus et les primes à la conversion, 1,1 milliard d'euros de dépenses ont été exécutés en 2019 ; les malus représentent un peu moins de 500 millions d'euros de recettes, soit un delta d'environ 650 millions d'euros, qui est un coût pour la collectivité. Ne laissons donc pas penser que l'État perçoit des recettes. C'est bien un effort financier de la collectivité, pour la transition vers des véhicules propres : un choix politique est fait.

Deuxième élément : avec l'article 14 et l'ensemble du plan de relance, le Gouvernement et cette majorité veulent faire converger deux objectifs difficiles à mener de front : la décarbonation de l'industrie automobile, donc de l'usage des véhicules automobiles ; et la préservation des filières automobiles, une industrie que nous voulons non seulement conserver, préserver mais faire croître, par les marchés de demain que sont les véhicules propres. Ce chemin de crête n'est pas facile, il est vrai. Je comprends que l'on puisse en contester certains aspects.

J'ai moi-même dit, de façon pudique, que cela allait loin. Vous l'aurez compris, l'exigence demandée à l'industrie automobile n'est pas facile. Nous l'assumons pourtant, et voulons la faire appliquer en l'état.

Dans le détail, il faut regarder la réalité des émissions, et quels sont les véhicules et constructeurs concernés. J'entends, surtout sur les bancs de la droite, qu'il nous faut faire attention à la filière automobile. C'est bien légitime.

Parmi les dix premiers véhicules les plus vendus en France en 2019 figurent la Peugeot 208, la Citroën C3, la Renault Clio IV, la Peugeot 3008 II, la Dacia Sandero, le Renault Captur, la Peugeot 2008, la Peugeot 308, la Renault Clio et la Renault Twingo. Chacun les visualise bien : on les voit partout. À partir de 2021, aucun malus ne sera supérieur à 200 euros sur ces dix modèles ; à partir de 2022, aucun ne sera supérieur à 360 euros. Je ne dis pas que c'est rien, mais, si l'on revient au pourcentage du prix d'achat – j'anticipe vos amendements sur la diminution du pourcentage –, on est très loin des dizaines de pour cent que vous mentionnez.

La Peugeot 208, par exemple, premier modèle vendu, n'est frappée d'aucun malus. Même chose pour la Citroën C3 III. Dans la liste que j'ai citée, les acquéreurs de la Peugeot 3008 II devraient payer le malus le plus élevé, soit 190 euros en 2021. C'est un pourcentage très faible du prix d'acquisition.

Ces exemples permettent de relativiser l'importance du malus sur les véhicules dits populaires, qui sont beaucoup achetés par nos concitoyens. Les pourcentages de malus sont modérés, et c'est heureux.

Revenons aux véhicules qui ont un rapport élevé de malus par rapport à leur prix d'acquisition. Une petite frange de véhicules – petites Porsche, certains Range Rover – émettent beaucoup de CO2, alors que leur prix d'acquisition, toutes choses égales par ailleurs, n'est pas si élevé. Le taux peut alors atteindre 40 ou 50 % – car le dénominateur, le prix, est peu élevé – et peut être appréhendé comme confiscatoire. Aucun constructeur français n'est concerné par cette catégorie de véhicules très puissants, très polluants, mais moins chers que d'autres à l'achat. Ils sont toutefois très minoritaires et, surtout, ne concernent pas la vie quotidienne de la quasi-totalité de nos concitoyens, qui roulent avec des véhicules plus ordinaires. Ceux-ci sont touchés par de petits montants de malus, quand ils doivent en acquitter. Je rappelle également que de nombreux véhicules ne sont pas malussés, car ils sont en deçà du plancher.

Enfin, Charles de Courson a posé une question intéressante sur la location. Le malus ne se paie pas à l'achat mais à la première immatriculation en France. Pour ce qui concerne le leasing ou la location longue ou courte durée, les entreprises répercuteront naturellement les malus sur leurs prix de location. Je ne crois donc guère au contournement du malus par la location.

Pour résumer, quand les véhicules sont polluants, les propriétaires doivent acquitter un malus, qui est proportionnellement faible pour la très grande majorité des véhicules. Les malus ne sont élevés que parce que les véhicules sont fortement polluants : c'est le principe du pollueur payeur, que l'article assume. La location ne peut être un moyen de contournement parce que le malus sera répercuté dans les prix à la consommation, donc à la location.

Avis défavorable sur l'ensemble des amendements.

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