Intervention de Marc Le Fur

Réunion du jeudi 22 octobre 2020 à 9h30
Commission des finances, de l'économie générale et du contrôle budgétaire

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaMarc Le Fur, rapporteur spécial :

Les moyens de la mission vont augmenter fortement : ils atteindront 4,9 milliards d'euros en crédits de paiement, contre 3,27 milliards en 2020, ce qui représente une hausse de plus de 50 %. C'est aussi la résultante de l'augmentation des autorisations d'engagement antérieures, notamment celles de 2019.

L'objectif qui a été fixé était de consacrer, en 2022, 0,55 % du revenu national brut (RNB) à l'aide publique au développement (APD), dont le calcul n'intègre pas uniquement les crédits de la présente mission. Nous allons non seulement atteindre mais dépasser cet objectif dès 2021. L'APD s'élèvera, en effet, à 0,69 % du RNB en 2021. C'est dû à l'augmentation du numérateur, mais aussi à la diminution du dénominateur, notre pays s'étant très sensiblement appauvri.

Dans cette situation, même s'il existe encore des incertitudes, nous devons nous poser certaines questions de fond. Avons-nous vocation à continuer à augmenter les crédits, alors que l'objectif en pourcentage du RNB est atteint ? Autre sujet, que j'avais évoqué dans mon précédent rapport, quelles sont les contreparties que nous pouvons obtenir pour nos entreprises et en ce qui concerne les reconduites à la frontière ? Bon nombre de pays bénéficiant largement de notre APD sont très peu coopératifs dans ce domaine – je pense en particulier au Mali, voire au Sénégal.

S'agissant de 2021, des crédits supplémentaires sont prévus, en particulier, pour notre participation au Programme alimentaire mondial (PAM), qui sera portée à 38,15 millions d'euros. J'avais signalé dès 2018 que nous avions une faiblesse en la matière. Nous avons évolué, et c'est heureux. Vous savez que le PAM vient d'être reconnu au plan international… Nous ne figurons pas parmi les premiers pays donateurs, mais nous sommes passés de la 33e à la 26e place. Nous avons également accru notre aide alimentaire programmée, qui s'élèvera à 76 millions d'euros en 2021. Des secteurs un peu négligés jusqu'à présent ont donc été renforcés nettement. Les moyens alloués au Fonds d'urgence humanitaire sont également en hausse.

Un autre objectif était d'augmenter l'aide bilatérale, jugée plus opportune, en particulier pour les pays les plus pauvres. Les crédits consacrés à l'aide bilatérale au sein du programme 110, qui relève de la direction générale du Trésor, augmenteront ainsi de 20 %, et ceux figurant dans le programme 209, qui dépend du ministère des affaires étrangères, de 46 %. C'est conforme à l'objectif fixé par le Président de la République et par le Comité interministériel de la coopération internationale et du développement (CICID), que nous avons déjà eu l'occasion d'évoquer régulièrement lors de nos discussions budgétaires.

S'agissant de la santé, qui est évidemment le grand sujet à l'heure actuelle, et de l'éducation, de grands efforts ont été réalisés par l'Agence française de développement (AFD) pour réorienter une partie des crédits existants – à hauteur de 1,2 milliard d'euros pour la santé. C'est une évolution bienvenue.

Je tiens également à souligner que les fonds propres de l'AFD, qui est en quelque sorte notre bras séculier, augmenteront de 953 millions d'euros en 2021. Nous n'avons pas encore connaissance de tous les éléments en ce qui concerne les modalités de l'opération : un amendement du Gouvernement sera sans doute déposé.

L'augmentation des fonds propres de l'AFD s'explique, pour l'essentiel, par trois raisons. Il convient, tout d'abord, de respecter certaines évolutions prudentielles. Par ailleurs, la crise économique a des effets sur l'AFD, comme sur d'autres structures bancaires. Enfin, puisque notre aide au développement augmente, l'activité de l'AFD s'accroît aussi – l'essentiel de notre aide passe par elle. Je précise, au passage, que le siège de l'AFD sera installé dans de nouveaux locaux.

Toutes ces évolutions interviennent à un moment très particulier. L'Afrique semble échapper à la crise sanitaire – elle y est, en tout cas, très atténuée, à part en Afrique du Sud, où les chiffres semblent tout de même moins inquiétants qu'ailleurs dans le monde. En revanche, l'extrême pauvreté, qui avait connu une baisse pendant vingt ans, est repartie à la hausse, évolution qui n'était pas du tout prévue mais qu'il faut désormais intégrer.

Le Club de Paris, élargi pour l'occasion à la Chine et aux pays du Golfe les plus riches, a accepté un moratoire sur la dette des pays les plus pauvres. Ce moratoire est accordé assez aisément, mais certains pays n'ont pas demandé à en bénéficier, préférant ne pas remettre en cause leur réputation et leur capacité d'endettement de demain.

Le Président de la République a déclaré qu'on pourrait également envisager un abandon de créances pour certains pays, s'agissant plus spécifiquement de l'Afrique. Pour le moment, cela n'a pas été le cas. Il faut souligner qu'il n'y a pas eu d'abandon de dette au cours des six ou sept dernières années. Malgré l'existence de difficultés, les perspectives paraissaient assez lointaines, mais le processus s'est accéléré : il y a aura sans doute un abandon de dette en 2021 pour le Soudan.

J'aurai sans doute l'occasion de revenir sur le financement de l'APD lorsque nous examinerons les amendements.

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