Intervention de Bénédicte Peyrol

Réunion du jeudi 22 octobre 2020 à 21h00
Commission des finances, de l'économie générale et du contrôle budgétaire

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaBénédicte Peyrol, rapporteure spéciale :

Monsieur Ruffin, vous appelez à une épargne qui fasse sens. Nous avons déjà le LDDS que vous connaissez sûrement. Je suis d'accord avec vous : il n'est pas nécessairement très bien vendu par le réseau bancaire. Il faudrait qu'il soit mieux diffusé, même si on note une amélioration ces dernières années. Faut-il un nouvel outil ? J'ai proposé, dans le cadre d'une mission d'évaluation et de contrôle, de réfléchir à la fusion du livret A et du LDDS ; de votre côté, vous préféreriez proposer un nouveau livret. Nous parlons d'une épargne réglementée, qui permet d'alimenter la Caisse des dépôts et consignations et qui vient financer d'autres politiques publiques ; je ne sais pas si c'est la solution pour mobiliser l'épargne des Français et financer l'économie réelle, mais il est évident qu'une réflexion doit être menée en la matière, et elle traverse déjà beaucoup la commission des finances : notre collègue Éric Woerth lui-même avait déposé un amendement lors de l'examen d'un projet de loi de finances rectificative visant à proposer un nouvel outil d'épargne. Nous n'avons pas encore trouvé de réponse totalement adéquate à ce stade.

Je vous signale qu'il existe un outil, l'OAT (obligations assimilables du trésor) verte. Aujourd'hui l'État émet des greens bonds : l'argent emprunté sur les marchés est destiné à financer les dépenses cotées écologiques, avec un cahier des charges très exigeant. Les fonds levés par le biais de l'OAT verte sont pour l'instant de l'ordre de 23 milliards d'euros, ce qui est assez peu par rapport à l'ensemble de ce que nous empruntons ; mais plus notre budget contiendra des dépenses très vertes, plus on pourra émettre ces obligations vertes sur le marché. Cela ne répond pas totalement à votre question, mais j'ai essayé d'apporter néanmoins quelques éléments.

Madame Rabault, vous me demandez quel montant la BCE nous ferait économiser. Je n'ai pas le chiffrage précis, mais ce qui est sûr, c'est que le spread a diminué entre les différents États, et en particulier avec l'Allemagne, ce qui nous fait autant d'économies ; la Banque centrale européenne nous permet d'émettre à un taux encore plus bas, au point qu'on en vient à emprunter à des taux négatifs. Mais je ne sais pas ce qu'il en sera dans deux ou trois ans ; les économistes restent unanimes pour dire que cet environnement de taux bas devrait durer.

La question est de savoir jusqu'à quand va pouvoir durer cette politique de quantitative easing de l'Union européenne. Est-ce la bonne politique ? En tout cas, on n'observe toujours pas d'investissement massif des entreprises, condition d'un retour à la croissance. J'ai moi-même du mal à me faire mon propre avis sur l'état de l'économie : certains économistes m'ont dit que le sujet n'était pas la dette mais le financement de la transition écologique, tandis que d'autres appellent à rester prudents. Nous avons décidé de pas financer nos dépenses, en particulier celles du plan de relance, à travers l'impôt ; reste que l'endettement nous rend dépendants des investisseurs étrangers, y compris des investisseurs européens qui ont leurs exigences et leur propre vision des politiques publiques à mener.

Les primes à l'émission, de l'ordre de 21 milliards en 2019, s'élèveraient à 10 milliards en 2020 – je vous parle de l'exécution car les prévisions ne figurent pas dans le projet annuel de performances. En tout cas, le niveau redescend cette année.

Pour ce qui est du cantonnement de la dette, selon le modèle de la dette de la sécurité sociale portée par la CADES, je n'ai pas de données chiffrées, mais j'ai cherché à savoir, grâce aux auditions menées et aux démarches engagées, si cette solution présentait un intérêt économique. Les investisseurs seraient-ils plus rassurés ? La qualité de notre dette en serait-elle améliorée ? Non. L'intérêt de ce mécanisme est plutôt de nature politique, en termes de lisibilité et de responsabilité. Ce sera sans doute l'occasion d'un beau débat car le Gouvernement y travaille. Si l'on cantonne, il faudra proposer une recette en face de la dette. Le coût en sera peut-être, finalement, plus important que la dette, mais on y gagnerait en esprit de responsabilité, puisqu'il faudra rembourser le capital, ce qui n'est pas le cas aujourd'hui.

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