Intervention de Jean-Paul Dufrègne

Réunion du vendredi 23 octobre 2020 à 9h30
Commission des finances, de l'économie générale et du contrôle budgétaire

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaJean-Paul Dufrègne, rapporteur spécial :

La mission Anciens combattants, mémoire et liens avec la nation finance les actions de reconnaissance en faveur du monde combattant, les politiques de renforcement du lien entre l'armée et la nation ainsi que l'indemnisation des victimes des persécutions antisémites et des actes de barbarie commis pendant la Seconde Guerre mondiale.

Je salue certaines avancées au regard de la jeunesse. La hausse de la cible d'incorporation du service militaire volontaire est satisfaisante. Les crédits dévolus à la politique de la mémoire augmentent nettement. Cette hausse bénéficie principalement à la rénovation et à l'aménagement des sépultures de guerre et des hauts lieux de la mémoire nationale en France, en Algérie et au Maroc, tels que le camp de concentration du Struthof. Je ne peux que me féliciter de cet effort significatif, qui permettra de conserver ces lieux de transmission dans un état convenable.

Cette année encore, les crédits de la mission sont en diminution. Ils sont inférieurs de 3 % aux crédits adoptés l'an dernier, et s'élèvent à un peu moins de 2,1 milliards d'euros. Cette chute est pour partie la conséquence de la diminution du nombre de bénéficiaires de la retraite du combattant et de la pension militaire d'invalidité. Toutefois, les économies ainsi réalisées auraient dû servir, au moins pour partie, à renforcer les actions en faveur du monde combattant. Je déplore que tel ne soit manifestement pas le cas.

La déception est d'autant plus forte que le monde combattant, en 2020, a été durement éprouvé par la crise sanitaire. Ceux qui le font vivre sont souvent des gens ayant atteint un certain âge, et l'annulation prolongée des commémorations traditionnelles, hormis au format numérique ou en groupes restreints, a mis un coup d'arrêt brutal au travail de transmission mené par les anciens combattants, tout en faisant disparaître des moments essentiels de la vie sociale, au cours desquels ils aiment se retrouver.

En 2021 plus encore qu'auparavant, les attentes des anciens combattants et de leurs familles sont donc fortes et légitimes. Or la seule mesure de revalorisation prévue cette année consiste en l'abaissement du seuil d'invalidité nécessaire à l'obtention de la majoration de la pension de réversion du conjoint survivant d'un grand invalide, laquelle, si importante soit-elle, ne devrait pas concerner plus de 197 personnes. Son coût est probablement surévalué, car il est calculé à partir de l'hypothèse qu'à tout grand invalide survit un conjoint ; il ne dépassera pas un million d'euros. Cette mesure était attendue ; toutefois, elle manque d'ambition. Je défendrai donc un amendement d'appel visant à augmenter le nombre de ses bénéficiaires.

Cette amélioration ne suffit pas à masquer la faiblesse des engagements de ce budget, notamment en matière de retraite du combattant. Les crédits dédiés à cette seule action baissent de 15,5 millions d'euros. Il n'est pas compréhensible que la faible somme perçue chaque année par un ancien combattant continue de plafonner. Je défendrai donc un amendement visant à l'augmenter d'un point d'indice, pour un coût inférieur de 6 millions d'euros aux économies réalisées sur cette action.

Enfin, si les crédits accordés à l'Office national des anciens combattants et des victimes de guerre (ONACVG) sont en augmentation, ce n'est qu'en apparence, car un prélèvement important a été effectué sur leurs ressources en 2020. En outre, la trésorerie de l'ONACVG participera l'an prochain, à hauteur de plus de 2 millions d'euros, aux actions en faveur des harkis et des rapatriés. Certes, ses réserves financières le lui permettent, mais sa mise à contribution ne pourra pas se poursuivre éternellement. Certes, l'ONACVG se réorganise pour s'adapter à la baisse du nombre de ses ressortissants, mais il doit conserver un maillage territorial satisfaisant et une présence suffisante dans ses antennes départementales. Ses missions demeurent essentielles, notamment l'accompagnement des pupilles de la nation, dont le nombre augmente malheureusement en raison des attentats terroristes qui frappent la République depuis plusieurs années. La baisse réelle du budget de l'ONACVG ne pourra pas se poursuivre indéfiniment sans avoir des effets délétères sur sa proximité avec ses ressortissants.

Pour ces raisons, j'émets de sérieuses réserves sur l'adoption du peu ambitieux budget de la mission Anciens combattants, mémoire et liens avec la nation du projet de loi de finances pour 2021.

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