Nous sommes dans un environnement très instable, qui renforce le caractère d'imprévisibilité du scénario macroéconomique. Au lendemain de la Seconde Guerre mondiale, Keynes parlait de situation d'incertitude radicale, rendant difficile, voire impossible d'envisager l'avenir et d'établir des prévisions économiques. Il nous semble que la crise sanitaire nous place dans ce contexte. Vous le soulignez dans votre rapport.
Vous déclarez dans votre avis sur le PLFR 4 que l'hypothèse d'un recul de 11 % du PIB retenue par le Gouvernement est cohérente, au vu des incertitudes entourant les conditions sanitaires. On peut toutefois craindre un recul plus prononcé si la crise sanitaire s'aggravait ou inversement, espérer une bonne surprise, comme cela a été le cas au troisième trimestre avec un rebond inattendu de 18 %, qui n'était anticipé ni par l'INSEE, ni par la Banque de France.
S'agissant des prévisions de recettes publiques, vous estimez que les hypothèses du Gouvernement sont plausibles compte tenu des incertitudes, là encore, qui entourent l'évolution de la consommation et de la masse salariale.
Sur les dépenses et le déficit du solde budgétaire effectif pour 2020, vous considérez que les prévisions sont cohérentes avec l'impact attendu du recul prévu de l'activité économique. On peut toutefois espérer que les dépenses prévues pour faire face à la crise seront moins sollicitées qu'envisagé.
Concernant le solde structurel, vous soulignez le caractère non significatif de son évaluation. Ce solde est établi en référence à l'estimation de la croissance potentielle arrêtée dans la loi de programmation des finances publiques de janvier 2018. Cette démarche est un peu curieuse, mais elle est conforme à la loi organique de décembre 2012. On voit d'emblée les limites de l'exercice.
Ce solde repose également sur des conventions comptables pour décomposer ce qui relève du solde conjoncturel et du solde structurel. Le Gouvernement a choisi de considérer les mesures prises pour faire face à la crise sanitaire comme des mesures temporaires qui ne viennent pas dégrader le solde structurel. Cette démarche nous paraît assez légitime. Avez‑vous des éléments de comparaison sur ce point avec ce que pratiquent nos partenaires européens ?
Sur la question du solde structurel, il faudra sans doute procéder, au lendemain de la crise sanitaire, à une nouvelle estimation du PIB potentiel de notre économie. Il conviendra également d'arrêter une doctrine sur les clefs de répartition entre solde conjoncturel et solde structurel. Pouvez-vous nous préciser vos analyses sur ces deux points ?