Monsieur le président, mes chers collègues, élu local j'ai été et élu local je reste. À ce titre, j'ai été interpellé, comme nombre d'entre vous, sur les catastrophes naturelles. Je suis député du Loir-et-Cher et les inondations de la vallée de la Loire restent pour moi préoccupantes. De plus en plus souvent, on me parle des problèmes de sécheresse et de leur incidence sur le phénomène de retrait-gonflement des argiles.
J'ai travaillé sur le sujet dès le début de mon mandat de député, interpellant des ministères sur des cas précis ou demandant l'amélioration du régime d'indemnisation des catastrophes naturelles, dont nous critiquons l'opacité, la lenteur et des blocages dans son fonctionnement ; d'où ma volonté de promouvoir ce texte.
En examinant la production législative, je suis tombé sur le texte présenté au Sénat par Mme Nicole Bonnefoy et adopté il y a tout juste un an. J'ai rencontré Nicole Bonnefoy au printemps dernier. L'approche de son texte est différente. Sa clé de voûte est financière, puisqu'il porte sur le financement du dispositif CatNat, notamment sur le fonds Barnier et la question de son déplafonnement. Nous avons fait le constat que son texte n'avançait pas et que le blocage était d'ordre financier.
De nouveau contactée à l'automne dernier, Nicole Bonnefoy a fait le même constat qu'au printemps et confirmé qu'aucun député ne s'était saisi du sujet. Je lui ai répondu que je souhaitais progresser sur la partie sécheresse et indiqué les amendements que je souhaitais présenter. Comme je le dis clairement dans l'exposé des motifs, ils sont inspirés à la fois par la mission d'information et par la proposition de loi de Nicole Bonnefoy, qui a accueilli favorablement ma propre proposition de loi.
J'ai continué à échanger avec les représentants des ministères concernés, les acteurs du monde de l'assurance et des associations de sinistrés pour affiner et peaufiner mon texte. Inspiré en partie du travail de Nicole Bonnefoy, il va plus loin sur certains points mais ne traite pas de la partie financière, ce qui aurait pu être bloquant et conduire à l'irrecevabilité de certains articles au titre de l'article 40 de la Constitution. Le verbe « réformer » figurant dans le titre est peut-être pompeux. Il s'agit de moderniser, améliorer et simplifier le dispositif au bénéfice de nos concitoyens sinistrés et de plus en plus concernés par la sécheresse.
Ce texte comporte trois thèmes.
Le premier est la nécessaire transparence du dispositif d'indemnisation. Il est abordé dans trois articles.
Aux termes de l'article 1er, la décision ministérielle prise en réponse à une demande de reconnaissance de l'état de catastrophe naturelle devra être assortie d'une motivation. L'article explicite les délais et voies de recours de nos concitoyens face à un avis négatif et précise les modalités d'accès aux rapports d'expertise.
L'article 2 institue dans chaque département un délégué à la reconnaissance de l'état de catastrophe naturelle pour faire le lien entre le niveau national et le niveau local, relayer les informations, faire de la communication, soutenir et accompagner les élus locaux, les sinistrés potentiellement constitués en associations et le monde de l'entreprise dans leur mobilisation face aux conséquences massives de catastrophes naturelles.
L'article 4 va aussi dans le sens de la clarification et de la transparence puisque, fait nouveau dans un texte de loi, il officialise l'existence de la Commission interministérielle de reconnaissance de l'état de catastrophe naturelle. À côté de cette commission technique, technique, il crée aussi une Commission nationale consultative capable de réagir aux décisions de la Commission interministérielle. Cette dernière travaille au jour le jour sur présentation des dossiers de demande de reconnaissance de l'état de catastrophe naturelle. Or nous avons besoin d'une instance qui n'agisse pas dans l'urgence mais réfléchisse, analyse, fasse le bilan de la qualité du travail de la Commission interministérielle et se penche sur l'évolution des critères de reconnaissance afin de se rapprocher de ce que nous vivons régulièrement dans nos territoires. On pense beaucoup au retrait-gonflement des argiles, mais cela peut porter sur d'autres phénomènes, comme les inondations. Ce travail sera piloté par cette Commission nationale consultative au sein de laquelle je souhaite que les élus locaux soient représentés pour y être des porte-parole, écouter ce qui se passe au niveau national et faire valoir les intérêts locaux.
Le deuxième thème est l'amélioration et la simplification des procédures pour nos concitoyens sinistrés.
L'article 3 prévoit la suppression de la modulation des franchises en fonction de l'existence d'un plan de prévention des risques naturels, modulation qui représente une double peine pour les assurés.
L'article 5, qui doit encore être amélioré en séance publique, porte sur les réparations et l'arrêt des désordres existants. Il vise à s'assurer de la qualité des travaux réalisés dans le cadre du régime CatNat et de leur capacité à supporter les dommages futurs d'un bâti. En outre, le délai de déclaration d'un sinistre est étendu de dix à trente jours à compter de la publication de l'arrêté interministériel de reconnaissance de l'état de catastrophe naturelle. L'article 5 prévoit enfin la possibilité de réduire le délai du versement de l'indemnisation due aux assurés, pour être au plus près des préoccupations de nos concitoyens.
L'article 6 permet la prise en charge des frais de relogement d'urgence des personnes sinistrées dont la résidence principale est insalubre ou présente un danger pour la sécurité des habitants.
Le troisième thème concerne l'avenir. En matière de dégâts causés par la sécheresse et le retrait-gonflement des argiles, il convient de faire évoluer certains dispositifs.
Certains, adoptés récemment, sont positifs. Je pense à la loi portant évolution du logement, de l'aménagement et du numérique, dite loi ELAN, ou au dispositif Denormandie destinés à encourager, par des normes, la résilience des constructions neuves, mais il faut aussi penser à notre stock de bâti ancien, telles les constructions des années 1970, souvent juste posées sur le sol sans se soucier du sous-sol, et sur lesquelles on doit intervenir ou réintervenir.
La prévention est bien moins coûteuse, jusqu'à cinq fois moins, que la correction. Comment intervenir préventivement pour les bâtiments anciens ? Pour répondre à la question, l'article 7 propose que le Gouvernement remette au Parlement un rapport destiné à évaluer les dispositifs existants et à suggérer des pistes d'amélioration, en particulier sur le bâti existant. Se posera la question des dispositifs financiers d'accompagnement, mais aussi celle de savoir si tous les dommages libellés CatNat relèvent réellement de la catastrophe naturelle. Un phénomène de sécheresse dont la redondance est annuelle ou biennale relève-t-il d'un dispositif d'indemnisation des catastrophes naturelles ou du droit commun et de l'adaptation des dispositifs d'amélioration de l'habitat ? On est très offensif pour la rénovation énergétique de nos logements anciens, pourquoi ne pas l'être pour la résilience des bâtiments anciens face à ce risque ? Sachant que l'épisode de sécheresse de 2018 a concerné 70 % du territoire national, ne pourrait-on envisager la création d'un dispositif d'intervention global et des budgets annualisés plutôt que des budgets au coup par coup ?
L'article 8 complète tout cela en étendant le délai de formulation d'une demande de reconnaissance de l'état de catastrophe naturelle de dix-huit à vingt-quatre mois. Certains phénomènes étant insidieux et lents à se manifester, il faut laisser le temps aux communes de réagir à la survenance d'un fait.