Un grand merci à chacun des orateurs. Nos positions ont tout de même des points de convergence.
Il est bien clair que je ne vous propose pas une réforme paramétrique, mais un véritable changement de paradigme. Il s\'agit de se placer du point de vue de celui qui reçoit : on pourra recevoir 300 000 euros, tout au long de sa vie, sans payer aucun impôt. Si l'on rapporte ce montant au patrimoine et à l'héritage moyens, qui sont bien en deçà, hors assurance-vie, on voit bien que cette réforme est conçue au bénéfice des classes moyennes et populaires.
Quant à l\'assurance-vie, si l'encours comme le nombre de détenteurs sont très importants, le fait est que le quart de cet encours est détenu par une poignée de personnes – puisqu'il n'y a ni limitation du nombre de contrats souscrits, ni plafond de dépôts. L'assurance-vie est une véritable niche fiscale.
S\'agissant de l'exil fiscal, il existe quelques études, qui montrent qu'il est très difficile d'échapper aux droits de succession. Il faut en effet expatrier à la fois le foyer fiscal fortuné et ceux des héritiers, sans savoir quand surviendra le décès et à un âge où l'on apprécie souvent le système de soin français. Le risque est donc faible. Une étude de 2014 a montré que même en Suisse l'exil fiscal était très peu pratiqué d'un canton à l'autre, malgré la grande disparité de leurs taux d'imposition des successions.
Les assureurs disent souvent qu\'une réforme de la fiscalité de l'assurance-vie mettrait à bas l'économie française, mais 80 % des encours sont investis dans des fonds en euros. Il existe bien d'autres produits d'épargne qui bénéficieraient à l'économie, dont certains ont d'ailleurs été créés très récemment par l'actuelle majorité.
En France, le patrimoine net médian est de 117 000 euros, le patrimoine net moyen de 240 000 euros et le patrimoine brut moyen de 276 000 euros. Le montant des successions hors assurance-vie s'établit en moyenne à 135 000 euros, et à 41 000 euros en médiane. Avec mon seuil de 300 000 euros, la part de Français qui n\'acquitteraient pas de droits de succession serait aussi importante qu'aujourd'hui, voire encore plus. Mais certains ont intérêt à entretenir le mythe d'un niveau élevé des droits de succession. Ils mettent en exergue notre taux marginal de 45 %, alors que le taux moyen d'imposition des successions réalisées est de 3 % ! Cette proposition de loi et les données figurant dans mon rapport tentent de déconstruire ce mythe.
Lors de leur audition, les représentants de la direction des affaires civiles et du Sceau du ministère de la justice ont confirmé que notre proposition de loi était compatible avec le droit civil des successions : le droit civil privilégie la famille nucléaire par le biais de la réserve héréditaire, mécanisme qui n\'est en rien modifié par notre texte. Ils nous ont bien dit qu'il n'y avait selon eux aucune raison de redoubler cette faveur par une fiscalité plus lourde pour les parents plus éloignés ou pour les personnes étrangères à la famille, qui sont assommés de droits de succession même pour de petits legs. Bref, nous concrétisons là la volonté de simplification chère au rapporteur général.
S\'agissant des comparaisons internationales, les données sont peu nombreuses, malgré le lancement d'une étude par l'OCDE en 2018. Je rappelle cependant que seules 35 % des successions en France sont imposées, avec un taux réel de 3 %.
Quant aux difficultés d\'accès aux données sur les transmissions de patrimoine, elles sont incompréhensibles. J'ai posé une question écrite sur ce sujet en septembre dernier. Quand on se rend chez un notaire pour établir une déclaration de succession, tout se fait de façon informatisée. Ce n'est qu'à la fin qu'on imprime un papier qu'on transmet, signé, à l'administration fiscale. C'est en train de changer grâce au projet « e-Enregistrement », comme nous avons pu l'apprendre au cours de l'audition très intéressante des représentants du Conseil supérieur du notariat – à part celle des représentants de Bercy, à qui il faut toujours tirer les vers du nez, les autres auditions ont été très ouvertes. J'espère que nous pourrons avancer assez vite sur ce sujet de l'accès aux données. J'avais déposé un sous-amendement en ce sens, mais je crois que je n'aurai pas l'occasion de le défendre. Quoi qu'il en soit, monsieur le président, monsieur le rapporteur général, nous devons rester très vigilants quant au cahier des charges qui est en train de se négocier sur ce projet de collecte des informations. Si les données que nous recevons ne sont pas celles que nous jugeons exploitables, cela n'aura servi à rien.
La commission en vient à l' examen des amendements.