Intervention de éric Lombard

Réunion du mercredi 7 avril 2021 à 9h00
Commission des finances, de l'économie générale et du contrôle budgétaire

éric Lombard, directeur général de la Caisse des dépôts et consignations :

Sur les fonds d'épargne, l'élément structurel concerne les taux bas. La BCE a confirmé le maintien durable de ceux-ci, ce qui place le modèle sous tension. Le coût de la ressource des fonds d'épargne est relativement élevé, avec un livret A rémunéré à 0,5 % quand les placements de la BCE sont à -0,5 % de rendement, sans compter 0,3 % de frais de distribution. Néanmoins, les prêts étant assis sur le livret A, avec une marge en moyenne supérieure à 60 centimes, et les investissements produisant des rendements supérieurs à 1 %, nos projections montrent que nous pouvons traverser les prochaines années sans difficulté.

En 2020, le résultat est produit par un prélèvement sur le FRBG en raison de deux éléments qui ne devraient pas être reproductibles. Le premier est l'inflation. La ressource des fonds d'épargne étant rémunérée selon la formule du livret A qui l'intègre pour moitié, nous nous protégeons des effets de cette formule avec un portefeuille d'investissement de plusieurs dizaines de milliards d'euros en obligations indexées sur l'inflation. En 2020, celle-ci a été quasiment nulle et ce portefeuille n'a quasiment rien rapporté, alors qu'il est adossé à un passif coûteux. Pour 2021 et les années suivantes, nous prévoyons une reprise de l'inflation, ce qui générera de nouveau un revenu sur ce portefeuille. Le second effet provient du portefeuille de 13 milliards d'euros d'actions, qui ont baissé courant 2020, ce qui a eu pour effet des provisions à passer et des baisses de dividendes perçus. Depuis, les marchés sont repartis à la hausse. Par conséquent, nous ne pensons pas qu'une revue structurelle de la gestion des fonds d'épargne ou de leur utilisation soit nécessaire.

S'agissant des filiales, les autorités organisatrices ont joué leur rôle et les pertes de Transdev sont limitées, inférieures à 110 millions d'euros. Le redémarrage économique que nous attendons grâce au vaccin devrait lui permettre de retrouver une trajectoire de résultats positive, même si elle n'intervient pas dès 2021. Nous n'avons pas d'inquiétude dans la durée.

Nous n'en avons pas davantage pour la Compagnie des Alpes, qui est très solide, équilibrée entre des parcs de loisirs et des stations de ski modernes, qui ont bénéficié d'investissements conséquents. Elle recevra un soutien de l'État de 150 à 160 millions d'euros, approuvé par la Commission européenne et qui doit l'être par le Parlement. Il n'est pas certain que cette somme sera suffisante, mais la Caisse apportera aussi son soutien. Ainsi, en sortie de crise, la Compagnie poursuivra son développement et continuera à investir. Je me suis notamment rendu au Futuroscope, détenu par la Compagnie et les collectivités locales de la Vienne. Nous y avons décidé d'un plan d'investissement de 200 millions d'euros dont la Caisse garantira le financement.

Par ailleurs, le portefeuille actions des fonds d'épargne est limité pour des raisons d'équilibre prudentiel. En revanche, nous avons mis en place des fonds régionaux tels que ceux évoqués au travers de Bpifrance ou de la Caisse des dépôts dans le cadre du plan tourisme. Nous pourrons les développer. La limitation ne provient pas tellement des moyens que nous y consacrons, mais de la demande du terrain. Dans le plan tourisme, les fonds sont segmentés par type d'activité. Ils sont régionalisés quand les présidents de région le souhaitent. Nous favorisons ce moyen d'intervention car il permet des décisions proches du terrain, plus rapides, pour des acteurs de plus petite taille.

En outre, Bpifrance est une très grande banque, qui possède près de 100 milliards d'euros de bilan. Les résultats sont seulement négatifs d'un peu plus de 100 millions d'euros. Les raisons se cumulent. Dans le cadre des règles IFRS ( International financial reporting standards ), nous avons passé une provision prudentielle de plus de 300 millions d'euros pour risques de crédits. En réalité, nous ne les constatons pas dans le portefeuille. S'ils se matérialisaient en 2021, cette provision serait utilisée. Sinon, elle pourrait être reprise.

De plus, la baisse des marchés s'est traduite par des ajustements de valeur pour les sociétés mises en équivalence. Je pense notamment à Stellantis, nouveau nom de PSA, pour laquelle la provision pourrait être reprise si les marchés se maintiennent. La situation est donc purement conjoncturelle, sans caractère de gravité. La solvabilité de Bpifrance n'est pas impactée et celle-ci continuera à remplir ses missions avec toute son énergie.

En ce qui concerne La Poste, quand l'opération Mandarine a été validée, le service universel postal devenait négatif. Ce déficit s'est aggravé en 2020 du fait de l'effondrement du courrier, qui devrait se poursuivre. De même que l'État compense en partie les trois autres missions de service public, l'aménagement du territoire, la distribution de la presse et l'accessibilité bancaire, il me semble logique qu'il finance également le service universel postal. Les discussions sont en cours. Un rapport a été présenté par le sénateur Patrick Chaize. Je suppose que celui de Jean Launay sera prochainement terminé. Les conclusions de ces travaux et des discussions avec l'exécutif vous seront présentées le plus tôt possible.

La Caisse des dépôts poursuivant un intérêt général, nous ne visons pas la rentabilité qu'atteignent les entreprises privées, mais une cible de 5 à 6 %. Elle correspond à un résultat de 2 milliards d'euros pour la section générale, qui l'a atteint en 2019. Nous n'avons pas d'inquiétudes quant à la possibilité d'y parvenir de nouveau en 2021 compte tenu de la reprise économique et du soutien des marchés financiers. L'incertitude provient du niveau de compensation par l'État du déficit du service universel postal.

Il faudrait que nous atteignions l'objectif de production de 250 000 logements sociaux en deux ans, car le déficit est réel. Nous observons une réticence des élus à construire, pour des raisons légitimes de lutte contre l'artificialisation des sols et écologiques. Nous avons signé un accord avec la ministre et l'Union sociale pour l'habitat. Nous ferons en sorte d'atteindre cette cible ambitieuse.

Enfin, je n'ai rien à ajouter ni à retrancher aux propos de Gilles Carrez sur notre rôle contra-cyclique et l'impact de l'ACPR. Nous devons disposer des fonds propres, y compris réglementaires, pour jouer notre rôle. De même, le commentaire sur l'impact sur les résultats hors opérations exceptionnelles est juste, toujours en raison de l'effondrement du courrier. Sans l'opération Mandarine, les résultats opérationnels de La Poste auraient été négatifs de 1,820 milliard d'euros. La compensation par l'État du déficit du service universel postal prend donc toute son importance.

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