Le quatrième rapport particulier annexé au rapport du CPO publié fin 2020 précise les calculs faits concernant l'effet des nouveaux modèles et des nouvelles règles sur le système fiscal.
L'OCDE procède à des évaluations pays par pays mais ses données ne sont pas publiques – et sa méthodologie encore moins. Je n'ai donc pas eu accès à ses modalités d'évaluation et je ne vous cache pas avoir eu quelques difficultés à lire le quatrième rapport particulier du CPO – il faut tout de même des compétences statistiques.
Faut-il de la volonté politique quant à ce fameux groupe de travail ? À l'occasion de l'examen du dernier projet de loi de finances, je suis repartie au front en déposant un amendement tendant à créer un observatoire français en plus de celui qui vient de se mettre en place à l'échelon européen. Je continuerai, en tant que députée de la majorité, à dire au Gouvernement que cet outil est indispensable et qu'il continuera à l'être pour les prochaines majorités parlementaires. Aujourd'hui, l'on me répond que l'INSEE et la MICAF y travaillent. Ceux qui veulent m'accompagner dans ce combat sont les bienvenus.
Les contrôles aléatoires ont commencé depuis peu. Je n'ai pas en tête leur nombre à ce stade, mais l'idée est de produire des données fiables sur l'évasion fiscale.
Au sujet de la volonté politique nationale sur les paradis fiscaux – celle de l'Union européenne relève davantage du Parlement européen et des États membres −, il faut savoir que la France, outre la liste des États et territoires non coopératifs, s'appuie sur la notion de pays à régime fiscal privilégié. Ma proposition d'abaisser le seuil de 50 % à 40 % avait été acceptée par la rapporteure du projet de loi relatif à la lutte contre la fraude Émilie Cariou. La notion s'apprécie outil par outil, au regard du taux effectif d'imposition. L'on peut toujours faire plus et mieux : la France a commencé.
Il y a des avancées, avec l'engagement fort du Parlement européen, qui a adopté une résolution au mois de janvier dernier, qui traite aussi du sujet des paradis fiscaux au sein de l'Union européenne. Ce n'est pas un sujet simple, car cette qualification a des conséquences en matière de sanctions potentielles en matière de fiscalité des entreprises, ainsi qu'au plan politique. Nous verrons la suite que la Commission européenne entend donner à la résolution des députés européens.
Je n'ai pas mentionné une difficulté actuelle, que nous anticipions déjà en 2018 et qui tient à ce qu'il y a une démultiplication des TSN, rien qu'au sein de l'Union européenne. Mon rapport les énumère.
La question de la double imposition sur une même activité va se poser, parce que les TSN recouvrent des champs d'application parfois différents. Le principe de la fiscalité internationale et des conventions est pourtant d'éviter ce problème.
La solution européenne reste la meilleure à ce stade. Mes échanges avec la Commission européenne me font comprendre que l'option d'une harmonisation est privilégiée, ce qui signifie aussi que la France ne revient pas sur la taxe qu'elle a déjà introduite dans son droit interne. Je préfère la TSN à une taxation additionnelle du numérique au titre de l'IS. Je ne dénonce pas la double imposition entre l'IS et la TSN et rappelle que nous avions pris le parti de l'assumer ; elle concerne certaines entreprises françaises.
La confrontation des calendriers est une vraie question politique. L'objectif du directeur du centre de politique et d'administration fiscale de l'OCDE, Pascal Saint-Amans, est que les négociations sur les premier et second piliers aboutissent ce mois de juillet 2021. La proposition de la Commission européenne sur les ressources propres de l'Union européenne, en ligne avec le plan de relance européen, pourrait être publiée au même moment ou un peu avant. Attention à ce qu'elle ne constitue pas un obstacle et ne soit pas mal prise par nos partenaires de l'OCDE.
De même, à propos du champ d'application du premier pilier, il ne faut pas que la TSN française ou bien les pas en avant effectués par les États-Unis ou l'Union européenne compromettent les négociations au sein de l'OCDE. L'Europe a ce point de vigilance en tête.
Je vous ai donné, pour la mise en œuvre, un horizon peut-être lointain. S'il y a une véritable volonté politique, il est d'autant plus possible d'aboutir qu'existe aujourd'hui un outil dont nous ne disposions pas il y a quelques années, à savoir la convention multilatérale de l'OCDE, lequel instrument vient modifier d'un coup les conventions fiscales bilatérales. La France éviterait de renégocier toutes ses conventions bilatérales en cas d'instauration d'une nouvelle imposition – cela prend des années.
Si l'on peut être optimiste, je reste prudente : si Barack Obama était président des États-Unis lors des travaux sur l'érosion de la base d'imposition et le transfert de bénéfices (BEPS), cela n'a pas empêché son pays de quitter la table des négociations au dernier moment. Il faut toujours se préparer à des retournements de veste.
Le calcul de l'assiette soulève une question évidente et fait partie de mes points de vigilance sur le taux effectif d'imposition : des négociations sont encore en cours sur l'éventuelle prise en compte des dépenses fiscales ou encore des reports de déficit. La référence est celle du résultat comptable consolidé au sens des International financial reporting standards (IFRS), dont nous avions beaucoup parlé à l'occasion des auditions de M. Patrick de Cambourg, président de l'Autorité des normes comptables (ANC). Le sujet technique reste majeur.
J'ai cru comprendre qu'au niveau européen, le projet d'assiette commune consolidée pour l'impôt sur les sociétés (ACCIS) n'était plus vraiment d'actualité.