Intervention de Ugo Bernalicis

Réunion du mercredi 14 avril 2021 à 9h30
Commission des finances, de l'économie générale et du contrôle budgétaire

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaUgo Bernalicis :

Je suis assez amusé par les réactions de la majorité, faisant comme si cette proposition de loi allait prendre dans la poche de l'ensemble du patronat ou remettre en cause le capitalisme. Malheureusement, devrais-je dire, on n'y est pas encore et on en est très loin.

De quoi parle-t-on ? Ce texte ne concerne que les entreprises dont le chiffre d'affaires dépasse 750 millions d'euros – sauf erreur de ma part, ce n'est pas la petite PME du coin – et il instaure une taxation de 50 % du surplus de bénéfice par rapport à l'année précédente. Et, en effet, ce n'est pas la source de ce surplus qui nous intéresse, mais bien sa temporalité.

La crise majeure à laquelle nous faisons face nécessite de lever des fonds et d'accorder des aides. Nous ne sommes d'ailleurs absolument pas opposés aux aides aux entreprises. Dès le premier confinement, nous avions demandé qu'il ne s'agisse pas seulement des prêts garantis, mais qu'on puisse aussi prendre en charge une partie des dépenses contraintes liées à la fermeture imposée à des entreprises par le Gouvernement. Vous avez préféré verser des aides sans conditions et sans aucun contrôle, ce qui pose quelques problèmes aujourd'hui en termes de lutte contre la délinquance économique et financière. Les services de police, fiscaux et judiciaires ont bien des difficultés à récupérer les milliards d'euros indûment versés à des fraudeurs qui sont de véritables délinquants.

En proposant de taxer à hauteur de 50 % les bénéfices supplémentaires réalisés par rapport à 2019 par les entreprises dont le chiffre d'affaires est supérieur 750 millions d'euros, il s'agit de partager. Le débat devrait davantage porter sur la manière d'utiliser et de redistribuer cet argent de la façon la plus utile socialement. Car le budget de l'État peut avoir la capacité de résorber les inégalités. Je vous accorde que vous n'en avez pas fait la démonstration depuis le début de la législature, mais il est possible de se rattraper.

C'est ce que font les États-Unis avec une augmentation des impôts destinée à remettre d'aplomb leurs infrastructures ; ils démontreront que cela constitue le meilleur moyen d'attirer des entreprises, ce que le dumping fiscal ne permet pas.

Il est assez cocasse que nous tombions d'accord avec le FMI, mais ce n'est pas tous les jours qu'il demande de taxer les profits et les riches. Et il le fait pour des raisons économiques, afin de mieux assurer la relance économique. Sans cela, il y aura des situations de monopole et de domination économique écrasant tout le reste. L'économie d'un pays ne peut pas reposer sur trois ou quatre super-riches, les autres se débrouillant comme ils peuvent : ce n'est pas possible. C'est la raison pour laquelle le plan de relance français est beaucoup trop faible pour permettre une vraie relance ; il est mal orienté puisque l'on repart sur les erreurs du passé.

Il est donc extrêmement important que l'on mette en place la taxe proposée, qui rapporterait selon nos estimations autour de six milliards d'euros. D'ailleurs le principal redevable serait Sanofi, une entreprise qui est l'exemple de tout ce qu'il ne faut pas faire en se gavant d'argent public, de crédit d'impôt recherche, tout en licenciant. Les salariés de Sanofi ne sont pas en cause, eux qui se lèvent tous les matins pour travailler dur et toucher leur salaire ; je parle des 12,3 milliards d'euros de profits indécents réalisés en 2020 par cette grande entreprise, qui seraient mieux utilisés dans le budget de l'État pour résorber les inégalités.

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