Intervention de la ministre Barbara Pompili

Réunion du mercredi 2 juin 2021 à 16h45
Commission des finances, de l'économie générale et du contrôle budgétaire

la ministre Barbara Pompili :

Compte tenu de leur complexité, il apparaît nécessaire de mieux intégrer les canaux de financement des infrastructures, ainsi que l'a demandé la Cour des comptes. Traditionnellement, l'AFITF permet de suivre de façon pluriannuelle nos investissements dans les infrastructures, mais une présentation claire est nécessaire pour suivre les trajectoires fixées par la LOM et le plan de relance. Il y va de la lisibilité de nos investissements.

Concernant le plan de relance, nous avons mis en place un outil de traçabilité des crédits. Déjà, 800 millions d'euros sont à disposition opérationnelle des maîtres d'ouvrage. Un meilleur suivi sera présenté dès la publication des projets annuels de performance (PAP) du projet de loi de finances pour 2022 et des rapports annuels de performance (RAP) de 2021. Des travaux sont en cours. Je peux déjà vous dire que nous réalisons un travail très fin, puisque chaque projet ou opération sera suivi individuellement.

Comment concilier la fin du nucléaire et le développement des mobilités électriques ? À ma connaissance, la programmation pluriannuelle de l'énergie (PPE) ne prévoit pas la fin du nucléaire mais une baisse pour arriver à une part de 50 % en 2035. Des choix devront être faits pour la période 2035-2050, mais nous avons le temps de voir venir, même s'il faut s'y préparer. La question du passage aux mobilités électriques sera résolue avant 2050. La temporalité est entièrement différente. La programmation et le réseau électrique sont faits pour cela. D'ailleurs, dans ses rapports, le gestionnaire Réseau de transport d'électricité vérifie régulièrement l'adéquation entre l'offre et l'évolution des besoins. Il n'y a pas de black-out à l'horizon. Je tenais à vous rassurer face à votre inquiétude réitérée, comme je l'ai fait il y a quelques mois. Depuis, tout s'est très bien passé et nous pouvons tous nous en réjouir.

Le Gouvernement a décidé d'investir pleinement dans le développement de la technologie hydrogène. Nous l'avons fait par le passé et nous avons ajouté dans le plan de relance 7 milliards d'euros d'ici à la fin de la décennie afin de développer une filière importante produisant de l'hydrogène chez nous grâce à la mise en place d'électrolyseurs sur le territoire. Nous allons développer plusieurs types de mobilité. Nous avons décidé de développer la recherche sur les biocarburants. Un soutien financier à hauteur de 1,5 milliard d'euros pour les trois prochaines années est prévu pour la recherche et développement de la filière aéronautique. Les projets soutenus figurent dans la feuille de route technologique définie par l'État avec les industriels français dans le cadre d'une démarche partenariale au sein du conseil pour la recherche aéronautique civile (CORAC). Par ailleurs, il est prévu de soutenir les projets destinés à produire à échelle industrielle des carburants durables, biocarburants avancés ou carburants synthétiques, destinés à l'aéronautique. L'objectif est de permettre leur incorporation aux carburants aéronautiques de nature fossile, à raison de 2 % en 2025 et de 5 % en 2030.

L'avenir des véhicules de transport routier de marchandises, en particulier à travers leur conversion, est un enjeu considérable. Nous devons soutenir la filière. Une task force pour la transition du parc a été créée, en collaboration avec les acteurs de la filière, afin de trouver des solutions. Nous avons d'ailleurs lancé un bonus pour la conversion des poids lourds. Il faut mettre en adéquation les besoins et le rythme d'exécution. L'idée du « rétrofit » – ou réutilisation – est intéressante ; elle progresse un peu plus vite pour les véhicules légers que pour les véhicules lourds. Dans ce domaine, nous en sommes encore aux balbutiements. Nous examinons comment favoriser le « rétrofit », afin d'éviter de construire de nouveaux camions. Je suivrai cela de près.

Les dépenses de l'AFITF se sont élevées à 2 824 millions d'euros en 2020, soit une augmentation de presque 400 millions par rapport à 2019. L'atterrissage pour l'année 2020 démontre que les choix financiers ont été pleinement conformes aux engagements pris dans la LOM. Le caractère particulier et conjoncturel de la crise ne remet pas en cause le modèle structurel de l'AFITF. Pendant le dernier exercice, nous nous sommes assurés des ressources nécessaires pour assurer la trajectoire de la LOM. Les sociétés concessionnaires d'autoroutes contribuent déjà à l'AFITF via la taxe d'aménagement du territoire et par des versements volontaires annuels. L'AFITF a pu assurer ses engagements et la crise conjoncturelle n'en remet pas en cause l'équilibre. Elle remplit ses fonctions.

L'emploi de l'hydrogène va dans le sens de la sobriété des transports. D'une façon générale, nous devons réduire autant que possible nos besoins ainsi que le gaspillage. Il faut devenir plus efficace, y compris s'agissant de l'électricité. Le meilleur service à rendre à ceux qui vont nous suivre, c'est de réduire les besoins en électricité par une plus grande efficacité de nos technologies, par exemple en utilisant des réfrigérateurs plus économes. C'est la raison pour laquelle nous avons engagé un programme ambitieux de rénovation des bâtiments. Toute énergie non gaspillée est une énergie que nous n'avons pas à produire.

Je confirme l'importance du transport aérien pour les territoires d'outre-mer et les territoires très éloignés, mal desservis par d'autres types de transport. C'est pourquoi, dans le projet de loi climat et résilience, nous avons décidé de ne pas aller au-delà d'une durée de deux heures trente de transport pour remplacer l'avion par le train, quand une autre solution existe. Nous sommes très attentifs à ne pas entraver le développement des territoires.

Nous devons porter un regard particulier sur les outre-mer, parce qu'on ne peut pas y aller en train. Nous venons de lancer un quatrième appel à projets pour le développement des transports en commun. Vingt dossiers ont déjà été reçus de l'outre-mer, montrant qu'il existe dans ces territoires une dynamique pour développer ce type de transport. De même, nous tenons compte de la spécificité des outre-mer s'agissant du changement de véhicule. Le bonus pour l'achat d'un véhicule électrique est majoré de 1 000 euros outre-mer. Par ailleurs, sur les 175 millions d'euros de crédits du plan de relance, 21 millions sont consacrés aux ports d'outre‑mer. Ces derniers traitent 13 millions de tonnes par an et représentent une plateforme essentielle pour ces territoires.

L'intermodalité est un sujet d'ordre général. Nous sommes encore dans la préhistoire de l'intermodalité quand il s'agit de l'avion et du train. C'est beaucoup moins le cas pour les transports urbains, notamment à Paris et en région parisienne. Nous avons enlevé les correspondances du projet de loi climat et résilience parce qu'il n'est pas encore possible partout d'acheter un billet unique pour faire une partie du trajet en train et une autre partie en avion. Même si des trains arrivent directement dans les aéroports à Lyon ou à Roissy, même si la question du transfert des bagages ne se pose pas d'avion à avion, elle se pose de train à avion. Si c'est faisable d'avion à avion, il n'y a pas de raison que cela ne le soit pas de train à avion sur la même plateforme. Les plateformes aéroportuaires doivent se pencher sur le sujet en vue de proposer ce service. C'est en lançant ce genre d'initiative dans le projet de loi climat et résilience que l'on peut engager cette dynamique. Le problème du déplacement des personnes handicapées ou âgées en correspondance est plus facile à résoudre, parce que nos aéroports sont équipés d'accès pour les personnes rencontrant des difficultés de mobilité. Un travail au long cours doit être engagé.

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