Intervention de la ministre Barbara Pompili

Réunion du mercredi 2 juin 2021 à 16h45
Commission des finances, de l'économie générale et du contrôle budgétaire

la ministre Barbara Pompili :

Si, madame la députée. S'il y a plusieurs manières de diversifier le mix électrique, et cela fait partie des débats, jamais je n'ai dit que l'éolien terrestre pouvait se substituer à 100 % au nucléaire. Ce serait une idiotie.

Des scénarios fondés sur 100 % d'énergies renouvelables peuvent être envisagés, y compris en France. C'est l'Agence internationale de l'énergie qui le dit. Cela suppose la combinaison de nombreux types d'énergie différentes : l'hydraulique, l'éolien terrestre, l'éolien offshore, le photovoltaïque, le biogaz, l'hydrogène, etc. Quoi qu'il en soit, il convient de réfléchir aux coûts et aux contraintes liées à ces choix. À l'inverse, si personne n'envisage un scénario à 100 % de nucléaire, il importe de regarder ce qu'en rester à 70 % impliquerait en termes d'investissements et de déchets. Les déchets des éoliennes n'ont pas le même effet environnemental que les déchets nucléaires. De même, le refroidissement des réacteurs nous coûtera cher.

Vous avez raison de dire, madame Beauvais, que quand on réfléchit au mix futur, on doit penser à la facture des Français. L'Agence internationale de l'énergie – car je me fonde sur des faits et sur des émetteurs reconnus par tous pour leur sérieux – considère qu'en 2035 les coûts de production du nouveau nucléaire seront trois à quatre fois plus élevés que ceux des différentes énergies renouvelables. Je suis obligée de le prendre en considération. Il ne s'agit pas ici de dogmatisme : si nous ne tenions pas compte de tous ces éléments dans la composition du mix et que le prix de l'électricité devenait plus élevé en France que dans des pays voisins ayant fait d'autres choix, nous aurions des comptes à rendre à nos concitoyens. Il n'y a pas de réponse magique, mais il faut se fonder sur la raison et sur les faits pour trouver les meilleures solutions possibles.

Dans certains territoires, l'implantation d'éoliennes a créé un sentiment d'encerclement, parce que l'installation n'avait pas été faite correctement. C'est précisément ce à quoi j'essaie de remédier. La semaine dernière, j'ai adressé aux préfets une circulaire leur demandant d'établir, en concertation avec les acteurs des territoires – élus locaux mais aussi représentants d'associations, riverains et promoteurs de projets –, une cartographie des lieux où l'on peut et où l'on ne peut pas installer des éoliennes, afin de mettre tout le monde d'accord. Dès lors, comme prévu par le projet de loi climat et résilience, les objectifs de la PPE pourront être déclinés dans chaque région ; tout le monde se mettra autour de la table pour définir ce qu'il convient de faire en fonction des besoins. On informe mieux, on donne plus de visibilité, on sort du sentiment d'anarchie que certains pouvaient avoir. Il y avait un manque d'information, et il est vrai que certaines pratiques ont créé des difficultés auxquelles il convient de remédier. J'essaie de le faire afin de développer les énergies renouvelables dont notre pays a besoin.

L'Agence internationale de l'énergie indique qu'au niveau mondial, le mix électrique devra être composé à 90 % d'énergies renouvelables. Elle n'écarte pas le nucléaire, mais elle dit qu'il devrait se situer à environ 10 %. Dans les mix que nous allons préparer pour l'après 2035, l'éventail des possibles est large. Mon rôle est de faire en sorte qu'il soit étudié correctement.

Le plan de relance a permis d'ouvrir MaPrimeRénov', au 1er juillet, aux ménages aux revenus intermédiaires ou supérieurs, aux copropriétés et aux propriétaires bailleurs – à cet égard, il était d'autant plus important de le faire que la loi climat et résilience prévoit des mesures pour les locations –, ainsi qu'une adaptation des moyens afin d'assurer l'augmentation du nombre de dossiers au regard de l'élargissement du périmètre de bénéficiaires. Le rythme de traitement atteint près 16 000 dossiers par semaine et le processus de versement des paiements a été largement optimisé, pour atteindre la moyenne de 7 000 dossiers par semaine. Il y a eu un temps de démarrage ; le mouvement est désormais lancé. Les systèmes d'information nécessaires sont en place.

Le budget apporté par le plan de relance à MaPrimeRénov' est de 1 440 millions d'euros pour la période 2021-2022. Il devrait être intégralement utilisé en 2021, en plus du budget de 740 millions d'euros du programme 174. Depuis le 1er janvier – ce bilan a été établi au début du mois de mai –, 252 465 dossiers ont été déposés, pour un montant de 678 millions d'euros ; 173 758 dossiers ont été engagés, pour un montant de 468 millions d'euros ; 112 442 demandes de solde ont été reçues, pour un montant de 316 millions d'euros, et 86 279 primes ont été payées, pour un montant de 268 millions d'euros. De plus, 67 % des dossiers engagés concernent des ménages aux revenus modestes et très modestes et 31 % des ménages aux revenus intermédiaires. Sur les dossiers déposés en 2021, 95 779 concernent des ménages aux revenus très modestes, pour un montant de 381 millions d'euros, 55 628 concernent des ménages aux revenus modestes, pour un montant de 145 millions d'euros, 88 558 concernent des ménages aux revenus intermédiaires, pour un montant de 143 millions d'euros, et 12 500 concernent des ménages aux revenus supérieurs, pour un montant de 9 millions d'euros.

Concernant l'Observatoire national de la rénovation énergétique (ONRE) et son articulation avec les guichets uniques prévus dans le cadre du SPPEH, nous souhaitons une simplification pour nos concitoyens. L'accompagnateur rénov' en sera un vecteur. Sans attendre l'entrée en application de la loi climat et résilience, nous faisons en sorte que les aides soient les plus harmonisées possibles. Nous ne savons pas encore précisément comment intégrer l'ONRE, mais cela fait partie des discussions à venir.

Je suis convaincue de la nécessité des zones à faibles émissions (ZFE) pour la lutte contre la pollution de l'air. L'azote fait encore 40 000 morts par an, les particules fines en font 7 000 : c'est trop. De plus, nous sommes très en retard par rapport aux pays voisins, qui ont mis en place des ZFE depuis longtemps. Il est vrai que certaines personnes risquent d'avoir des difficultés à se déplacer, ce qui pourrait les pénaliser. C'est pour moi un point d'attention extrême. Il est hors de question d'empêcher la mobilité de qui que ce soit. Nous mettons en place des mesures, dont certaines figurent dans le projet de loi climat et résilience, d'autres dans le plan de relance, d'autres ailleurs, pour permettre la mobilité de tous dans les ZFE.

Ceux qui achètent de nouvelles voitures ne sont pas toujours les plus en difficulté ; les ménages les plus modestes achètent plutôt des véhicules de seconde main. C'est pourquoi les bonus et primes à la conversion s'adressent aussi à des personnes désireuses d'acheter des voitures d'occasion. Les aides de l'État vont jusqu'à 12 000 euros pour des véhicules neuf et 7 000 euros pour des véhicules d'occasion. Des aides supplémentaires sont proposées par les collectivités locales : dans la métropole du Grand Paris, le complément peut atteindre plus de 7 000 euros.

Cependant, on ne doit plus penser la mobilité sous l'angle unique de la voiture. Si, dans certains cas, elle est utile, voire indispensable, dans d'autres, on peut s'en passer en utilisant les transports en commun – d'où les investissements que nous y consacrons –, ou en utilisant d'autres véhicules comme le vélo, qui rencontre un grand succès. En mettant en place les infrastructures nécessaires et en garantissant la sécurité des usagers, il est possible de développer les mobilités douces. La LOM et la loi climat et résilience contiennent des dispositions visant à développer le vélo.

On doit raisonner non plus en termes de possession mais en termes d'utilisation des véhicules. Le développement de zones de covoiturage est efficace et joue un rôle social. À Lyon, quelqu'un m'a dit qu'après avoir eu recours au covoiturage par engagement, il avait continué par agrément et parce que cela lui faisait réaliser une économie d'environ 800 euros par an, ce qui n'est pas rien.

Nous pensons aussi aux artisans. La prime à la conversion pour les véhicules utilitaires est en cours de révision afin d'être plus en adéquation avec les besoins, car nous avons décelé une difficulté de calage.

Une meilleure santé ne veut pas dire moins de mobilité, mais une mobilité différente.

Madame Sage, vous me posez toujours des colles… Je n'ai pas les chiffres de MaPrimeRénov' pour l'outre-mer, mais nous allons vous les transmettre. De même, j'ai négligé de faire le point sur le projet de convention avec la Polynésie dont vous me parlez, à juste titre, régulièrement. Comme d'autres zones spécifiques, la Polynésie doit avoir accès à l'électricité sans que la facture soit trop lourde, et à une électricité bas-carbone, c'est-à-dire sans avoir recours aux moyens polluants, encore trop utilisés. De la même façon, je vous répondrai plus tard s'agissant de la possibilité d'associer l'ANDRA, qui est une idée à creuser.

Monsieur le rapporteur spécial Coquerel, les crédits pour les énergies renouvelables ont augmenté de 972 millions d'euros en 2020 par rapport à 2019. Pour l'eau et la biodiversité, les crédits ont augmenté de 31 millions d'euros, en hausse de 20 %. Pour la prévention des risques, nous sommes passés, je vous le concède, de 765,8 à 765 millions d'euros. Quant à la subvention de l'ADEME, sa baisse succède à un pic historique en 2018. Pour les autres politiques du programme, il y a une hausse.

En fonctionnement, nous trouvons moins 8 millions d'euros de transferts pour les secrétariats communs et les directions de l'environnement, de l'aménagement et du logement (DEAL) en outre-mer, et, d'exécution à exécution, à format constant sous norme de dépenses, les montants augmentent. Je tiens les éléments chiffrés à votre disposition.

Je vois bien ce qui se passe dans mon ministère. Je suis très attachée au travail de mes agents et des opérateurs, qu'ils réalisent dans des conditions pas toujours évidentes. Au total, il y a près de 73 000 agents, dont 39 000 au ministère, 23 000 dans les opérateurs et 11 000 pour le contrôle aérien. Comme tous les autres, le ministère de la transition écologique et solidaire participe à la maîtrise des effectifs publics. Ils diminuent d'environ 2 %, ce qui est dans la moyenne des ministères, mais l'effort dure depuis de nombreuses années, il est lourd et l'exercice atteint ses limites. Nous procédons à une optimisation par la revue des missions. Afin d'être le plus efficace possible, nous révisons nos priorités, créons des secrétariats communs, réalisons des investissements dans les outils informatiques. Notre champ très large, incluant l'écologie, les transports, le logement et l'urbanisme, nous permet de recruter tout en nous recentrant sur des priorités. Chaque année, 1 500 agents sont recrutés, en mettant l'accent sur les emplois de terrain, dans les territoires. Nous recrutons à des emplois de plus en plus qualifiés. Nous sommes attachés au maintien d'un dialogue social de qualité dans le cadre de l'agenda social et à accompagner les nécessaires évolutions des agents et des services.

Il ne vous aura pas échappé que nous avons subi la crise de la covid-19. Comme partout, des conditions de travail ont changé, notamment par le recours au télétravail, ce qui a eu une influence sur le « moral des troupes ». Nous sommes à leur écoute, attentifs à leur ressenti et aux retours d'expérience de cette période. Nous cherchons à construire des parcours professionnels valorisants pour les agents, à même de répondre aux besoins en compétences et à la technicité des métiers du ministère, et à renforcer leur qualité de vie au travail.

Dans le prochain budget, je serai très attentive à ce que la question des effectifs de mon ministère comme de ceux des opérateurs soit traitée de la meilleure manière possible, parce qu'ils remplissent des missions de plus en plus importantes. Nous devons avoir les moyens de bien le faire, d'avoir des agents sur le terrain. Rendez-vous donc au prochain budget !

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