A priori, la proposition du Président de la République de vous renouveler dans vos fonctions me semble tout à fait opportune. Nous avons constaté, avant et en particulier pendant la crise, à quel point la Banque de France, par votre truchement, a été partie prenante dans l'élaboration de la politique monétaire européenne, contribuant à d'importants progrès pour répondre à la crise, à la fois sur le plan national et communautaire. La manière dont vous avez géré cette dernière n'a fait que confirmer vos compétences indéniables à diriger la Banque de France.
Nous nous interrogeons tous régulièrement à propos de l'inflation et de la politique monétaire européenne en la matière. La BCE a annoncé récemment une revue de son mandat, c'est-à-dire une révision de la façon dont elle considère devoir appliquer les objectifs des traités. J'ai retenu trois points importants : l'appréciation à moyen terme de l'objectif de 2 % d'inflation, l'intégration du changement climatique dans les actions de politique monétaire et la meilleure prise en compte de l'évolution du coût du logement dans l'indice d'inflation. Qu'est-ce que cela peut changer concrètement ? Par ailleurs, comment la politique de la BCE peut-elle s'adapter aux nécessités budgétaires nationales – comme celles de la France – face à des effets inflationnistes ? Si nous additionnons le service de la dette, qui augmente de près de 2 milliards d'euros en raison de l'inflation en 2021, l'indexation sur l'inflation du barème de l'impôt sur le revenu, qui coûtera 1,5 milliard d'euros, le bouclier tarifaire, de l'ordre de 5 à 6 milliards d'euros, et d'éventuelles autres mesures de protection du pouvoir d'achat de nos concitoyens, par exemple pour faire face à la hausse du prix de l'essence, nous atteignons quasiment 9 milliards d'euros, soit l'équivalent du budget annuel de la justice. La BCE est-elle capable de prévoir et prendre en compte les nécessaires réactions des États face aux effets inflationnistes ? D'autres pays européens se trouvent-ils confrontés à un même coût budgétaire massif lié à une conjoncture inflationniste à laquelle nous n'étions plus habitués ?
Qu'en est-il de l'évolution des programmes tels que le Pandemic Emergency Purchase Programme (PEPP) et les Targeted Longer-Term Refinancing Operations (TLTRO) ? Pourraient-ils être affectés par la question que je viens d'évoquer ?
Par ailleurs, après la crise et sans négliger les secteurs encore sous tension, la Banque de France a-t-elle révisé ses critères de cotation d'entreprises, notamment pour l'accès au crédit ? En d'autres termes, la manière dont sont assimilés les quasi-fonds propres pour éviter de pénaliser la structure bilancielle des PME face au crédit a-t-elle été modifiée ?