Au terme de cinq rapports spéciaux consécutifs sur la mission Écologie, développement et mobilité durables, j'ai vraiment l'impression d'avoir fait la radioscopie d'un ministère et d'opérateurs en péril.
Le budget de la mission pour 2022 nous est présenté comme historique, malgré les 350 postes qui sont encore supprimés cette année, ce qui porte le total à 6 000 postes sur cinq ans, soit une diminution de presque 15 % des effectifs. Ce qui rendrait ce budget « historique », c'est une augmentation des crédits de 500 millions d'euros par rapport à la loi de finances initiale de 2021. Sauf que cette évolution, minime, n'est qu'apparente, puisque les 2 milliards d'euros du dispositif MaPrimeRénov' faussent les perspectives.
Il est certes indispensable de rénover les logements, mais en l'état, cette prime ne conduit qu'à faire toujours plus de travaux sans inciter à atteindre le niveau BBC, « Bâtiment basse consommation », et sans suivre ni contrôler efficacement la qualité des rénovations.
MaPrimeRénov' est un exemple frappant de la manière dont le Gouvernement réduit le ministère de l'écologie à un guichet distribuant des aides au privé sans pouvoir vérifier leur pertinence ni fournir un accompagnement réel, faute d'effectifs.
Pour le reste, les crédits demeurent très insuffisants face aux besoins : à peine 15 millions d'euros en plus pour le programme 113 Paysages, eau et biodiversité, et même 10 millions d'euros de moins sur le programme 159 Expertise, information géographique et météorologie. Le programme 181 Prévention des risques est certes doté de 70 millions d'euros supplémentaires, mais qui seront largement consacrés aux réparations liées à la tempête Alex, financées par le fonds Barnier. La légère augmentation des crédits de l'ADEME, l'Agence de la transition écologique, est largement insuffisante au regard des objectifs de la programmation pluriannuelle sur l'énergie.
En réalité, ce budget n'évolue donc pas beaucoup. Il régresse même sur de nombreux points, comme pour les énergies renouvelables, qui perdent 1 milliard entre 2021 et 2022. Les quelques crédits ponctuels provenant du plan de relance n'effacent pas non plus les réductions massives de personnel : il faut faire toujours plus avec toujours moins d'effectifs.
En cela, ce dernier budget de la législature est bien dans la continuité des quatre précédents. Les effectifs concourant aux missions du ministère de la transition écologique et du ministère de la mer, qui étaient de 41 391 équivalents temps plein dans la loi de finances de 2017, ne sont plus que de 35 865 dans le PLF, soit une baisse de 5 526 en cinq ans.
Sur le quinquennat, près de 2 000 postes ont été supprimés dans les services régionaux, ce qui a lourdement handicapé les directions régionales de l'environnement, de l'aménagement et du logement (DREAL), mais aussi les directions interdépartementales des routes et les directions départementales des territoires.
Quant aux opérateurs attachés à la mission, ils bénéficiaient de 19 791 emplois en loi de finances initiale de 2018, contre 19 307 dans ce PLF. La baisse théorique est de 484 emplois mais la baisse réelle est beaucoup plus massive, si l'on veut bien considérer que le programme 159 a vu la création de 800 emplois en cinq ans au seul bénéfice de la Société du Grand Paris.
Ainsi, rien que chez Météo France, 439 emplois ont été supprimés depuis 2017, pour une économie cumulée d'à peine 20 millions d'euros sur la masse salariale. Quatre-vingt-quinze emplois vont encore être supprimés d'ici à 2023, alors que Météo France doit jouer un rôle essentiel, chacun en conviendra, dans le plan national d'adaptation au changement climatique.
Pour le CEREMA (centre d'études et d'expertise sur les risques, l'environnement, la mobilité et l'aménagement), 500 postes auront été supprimés sur cinq ans, dont 40 pour 2022. Le Conseil général de l'environnement et du développement durable (CGEDD) s'est alarmé dans un rapport de juin dernier d'une trajectoire qui, selon lui, engage le pronostic vital de cet opérateur.
Pour l'IGN (Institut national de l'information géographique et forestière), près de 200 emplois seront supprimés sur cinq ans, dont encore dix dans le PLF. Quant aux agences de l'eau, l'absence de suppression de postes en 2022 n'efface pas la destruction de 220 emplois depuis 2017, alors qu'elles jouent un rôle primordial dans la protection de la ressource en eau.
L'ADEME, qui avait perdu une centaine d'emplois depuis le début de la législature, va être dotée d'à peine 9 postes supplémentaires en 2022, alors que le plan de relance la conduit à recruter une centaine d'intérimaires pour pouvoir assurer ses missions. L'Agence se demande d'ailleurs bien comment elle pourra s'en passer à partir de juillet 2022.
Seul élément de réconfort, il y aura 40 emplois de plus pour les parcs nationaux en 2022 – à comparer aux 150 perdus depuis dix ans. Sauf que, pour concrétiser le vœu de M. Macron de multiplier par dix la surface maritime du territoire bénéficiant d'une protection forte, il faudrait en faire de même avec les effectifs.
C'est un autre chemin qu'il faut emprunter. Selon les syndicats du ministère, au moins 20 000 postes doivent être recréés en urgence au ministère de la transition écologique, dont 4 000 dès 2022.
Ce n'est pas avec un budget à peine moins pire que les précédents qu'on peut prétendre effacer les dégâts causés à la politique de l'environnement depuis cinq ans. Je vous proposerai différents amendements pour, si ce n'est rectifier le tir, au moins amoindrir les baisses de cette année.