Concernant l'exécution des crédits, on peut rappeler que la DSIL est une dotation récente, dont le montant est resté stable de 2018 à 2021, avant de se rapprocher de celui de la DTER, grâce à la majoration de 303 millions d'euros intervenue lors de la discussion de la loi de finances pour 2022.
À la différence de la répartition départementale de la DETR, qui est complexe, la répartition régionale de la DSIL obéit à une règle simple qui fait intervenir pour 65 % la population régionale et pour 35 % celle des communes situées dans une aire urbaine de moins de 50 000 habitants. Cette règle n'en est pas moins rigide puisque seul le critère de la population est pris en compte dans la définition des enveloppes régionales. Dès lors, le poids de chaque région dans la DSIL nationale évolue très marginalement chaque année.
Nous avons aussi constaté la faible intensité péréquatrice de ces enveloppes régionales : l'écart entre l'enveloppe par habitant la plus faible, celle d'Île-de-France, et l'enveloppe par habitant la plus élevée, celle de Mayotte, n'est que de 1 à 2 tandis que des régions plus riches, que ce soit en termes de revenus par habitant, de PIB par habitant, de potentiel financier par habitant, telles la Bretagne ou les Pays-de-la-Loire, disposent d'une dotation par habitant plus élevée que des régions plus pauvres, comme La Réunion ou les Hauts-de-France.
L'analyse des attributions de la DSIL à l'échelle départementale montre, au contraire, des amplitudes importantes d'une année sur l'autre. En moyenne, elle varie annuellement de plus ou moins 20 %. Nous avons cependant constaté que, dans certaines régions, notamment les régions Hauts-de-France, Centre-Val de Loire et Normandie, les attributions départementales sont plutôt stables, ce qui suggère une clé de répartition départementale prédéfinie. Dans les autres régions, notamment les régions Grand Est, Île-de-France et Occitanie, les attributions entre les départements varient plus ou moins fortement, ce qui veut dire que le préfet de région ne tient pas compte de l'échelon départemental ou qu'il fait appel à des critères variables pour répartir la DSIL au niveau des départements.
L'analyse des réponses révèle que chaque préfecture a sa doctrine en matière de répartition entre départements. Il peut s'agir d'une clé de répartition fixe, assez rigide mais qui donne de la visibilité aux préfets de département et aux élus locaux sur les crédits disponibles, ou de critères péréquateurs, voire d'une répartition totalement discrétionnaire. Dans ce dernier cas, la répartition est souple mais entraîne de fortes fluctuations annuelles.
Dans la région Auvergne-Rhône-Alpes, la baisse de l'enveloppe régionale liée à la fin des pactes métropolitains et des contrats de ruralité a été répercutée sur l'ensemble des départements à l'identique, sauf pour deux départements incluant une métropole, l'Isère et le Rhône. Cette pratique a abouti à la constitution d'un préciput au profit de ces deux métropoles de Lyon et Grenoble, alors que la région en compte quatre. La préfecture nous a indiqué que la répartition était en cours de redéfinition pour remédier à cette situation inéquitable.
Hormis ce cas particulier, et d'une manière générale, la répartition départementale apparaît plus péréquatrice que les enveloppes régionales : les préfets de région tiennent compte de la fragilité des départements. Par exemple, dans le Grand Est, la dotation par habitant est presque quatre fois plus élevée dans la Meuse, département plutôt rural, avec un revenu moyen par habitant inférieur au revenu moyen régional par habitant, que la moyenne régionale : 35,5 euros contre 9,16 euros. En revanche, elle est inférieure de 40 % à la moyenne régionale dans le Bas-Rhin, département plutôt urbain, avec un revenu moyen par habitant supérieur au revenu moyen régional par habitant.
Nous avons également constaté, d'une part, qu'il y avait un lien statistique entre la densité de population au sens de la grille de densité de l'INSEE et les attributions départementales et, d'autre part, que les préfets de région attribuent à chaque département un montant de DSIL minimal. Autrement dit, alors que la répartition entre départements est totalement libre pour les préfets de région, ceux-ci ne déshabillent pas Pierre pour habiller Paul.
La pratique des préfets de région apparaît plutôt vertueuse : si les montants des attributions départementales peuvent varier parfois de manière significative d'une année sur l'autre, ces variations ne portent pas préjudice au caractère péréquateur des choix opérés par les préfets de région à l'échelon départemental. Autrement dit, la péréquation s'effectue dans les faits entre départements et non entre régions. La mission propose de formaliser cette bonne pratique des préfets en limitant de manière souple les variations annuelles d'attributions départementales de DSIL et en fixant un montant minimal de DSIL par département.
Nous avons ensuite analysé les subventions versées aux communes et aux intercommunalités qui, je le rappelle, sont toutes éligibles à la DSIL.
Les projets des EPCI sont moins nombreux que ceux des communes mais davantage subventionnés : ils représentent 22,5 % de l'ensemble des projets subventionnés et 34,2 % de la DSIL en 2020. Le montant moyen de subvention aux intercommunalités est 51 % plus élevé que celui des communes. Les réponses que nous avons obtenues des préfectures montrent que la répartition entre communes et EPCI est le plus souvent constatée a posteriori. Cependant, des divergences significatives entre départements sont relevées : les Bouches-du-Rhône et le Puy-de-Dôme allouent plus de 60 % de l'enveloppe aux EPCI. À l'inverse, dans le Maine-et-Loire, près de 90 % de la DSIL sont versés aux communes alors que moins de 15 % reviennent aux intercommunalités. Nous estimons qu'il serait pertinent de garantir un certain équilibre dans la répartition de la DSIL entre collectivités éligibles en plafonnant la part des EPCI, par exemple à 30 %.
Nous avons ensuite tenté de répondre à deux questions fréquemment posées sur la DSIL. Tout d'abord, nous nous sommes demandé si la DSIL favorisait les communes urbaines. Ensuite, nous nous sommes demandé si les préfets avantageaient les chefs-lieux, qui sont parfois des métropoles. À ces deux questions, nos travaux semblent répondre par la négative, hors le cas particulier de la région Auvergne-Rhône-Alpes, dont nous avons parlé.
Nous n'avons pas remarqué de déséquilibre dans les communes bénéficiant des subventions de DSIL : la DSIL est principalement attribuée aux communes rurales dans les départements plutôt ruraux et aux communes urbaines dans les départements plutôt urbains. Par ailleurs, dans l'échantillon de vingt chefs-lieux que nous avons étudié, seuls deux perçoivent une DSIL par habitant supérieure à la moyenne régionale, encore s'agit-il de deux communes de densité intermédiaire – Ajaccio et Laon – et non de métropoles.
La DSIL est une dotation fléchée vers des thématiques prioritaires nationales. Elle permet également le financement d'opérations visant au développement des territoires ruraux qui sont inscrites dans un contrat entre une intercommunalité et le représentant de l'État.
Environ 30 % de la DSIL est consacrée au financement de ces dispositifs contractuels – CRTE, Action cœur de ville, Petites villes de demain, etc. – qui sont aujourd'hui plus nombreux et ont justifié la majoration de la DSIL dans le cadre de la loi de finances pour 2022.
Certains projets financés par la DSIL sur un dispositif contractuel ne concernent pas des territoires ruraux. Citons l'exemple du financement de l'éclairage public dans la communauté d'agglomération de Roissy-Pays de France, qui n'est évidemment pas un territoire rural, pour 300 000 euros, dans le cadre du programme Territoires d'industrie en 2020. Ce type de financement rentre tout à fait dans le cœur de cible de la DSIL et il ne s'agit pas de le remettre en cause, mais il y a une contradiction avec la loi qui justifierait qu'une clarification législative soit apportée.
Enfin, comme mon collègue François Jolivet l'a exposé, notre étude a porté sur l'analyse des taux de rejets des projets. Au niveau des crédits, nous avons relevé que des rejets sont motivés par des insuffisances de crédits, mais la situation est différente selon les départements.
Par exemple, dans le Puy-de-Dôme, la préfecture nous a signalé qu'aucun dossier DSIL n'avait été écarté en 2020 mais 58 l'ont été en 2021, dont 39 pour insuffisance de crédits. Dans l'Indre, 39 dossiers DSIL ont été écartés sur 54 déposés en 2020, dont 21 pour insuffisance de crédits. Dans le Nord, le taux de rejet atteint 59 % pour la DETR et la DSIL. La préfecture du Grand Est nous a signalé un taux de rejet de 57 %. La complémentarité des dotations ne permet pas toujours de compenser les insuffisances de crédits.
En revanche, s'agissant des crédits de paiement, les tensions sont moindres et concernent des indisponibilités limitées à certains départements, en fin d'exercice.