Intervention de Christine Pires Beaune

Réunion du jeudi 24 février 2022 à 11h00
Commission des finances, de l'économie générale et du contrôle budgétaire

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaChristine Pires Beaune :

Les rapports de la Cour des comptes sont chaque année d'une grande utilité pour nos travaux.

Le chèque énergie est malheureusement au cœur de l'actualité, ce qui n'était pas encore le cas lorsque le groupe Socialiste a proposé d'en faire le sujet d'une enquête de la Cour. Les prix de l'énergie étaient alors très inférieurs à leur niveau actuel et le Gouvernement était loin d'imaginer qu'il utiliserait quelques mois plus tard le chèque énergie pour lutter contre l'envolée des prix du gaz et de l'électricité.

Le recours, à la fin de l'année 2021, à un chèque énergie exceptionnel de 100 euros illustre la souplesse de ce dispositif qui fonctionne plutôt bien dans l'ensemble même si des points de vigilance et des marges d'amélioration existent. Il s'agit d'un outil pertinent et globalement efficace.

Le premier motif de satisfaction est d'ordre méthodologique : le choix d'expérimenter le dispositif au niveau local pendant deux ans avant de l'étendre et de l'aménager est intéressant. Les autres motifs ont été évoqués par Mme Podeur : le chèque énergie lutte utilement contre la précarité énergétique ; il produit un réel effet redistributif ; il suscite peu de fraudes et sa gestion est satisfaisante.

Autre indicateur du bon fonctionnement du chèque énergie, je n'en entends pas parler dans ma permanence, à la différence de MaPrimeRénov' au sujet de laquelle je suis régulièrement saisie de difficultés.

En 2022, plus de 800 millions d'euros seront utilement dépensés au titre du chèque énergie. Pour autant, celui-ci comporte certaines lacunes. J'en identifie quatre.

La première, c'est l'absence de ciblage de certains publics. La Cour souligne qu'un quart des ménages en situation de précarité énergétique n'en bénéficie pas. Ce phénomène concerne 6 000 ménages du premier décile, 332 000 ménages du deuxième décile et 427 000 du troisième décile. Plus de 750 000 bénéficiaires potentiels ne seraient donc pas identifiés. Il y a urgence à identifier ces publics, surtout ceux des deux premiers déciles.

Le deuxième point d'attention concerne le taux de non-recours. Près de 20 % des chèques envoyés ne sont pas utilisés. Malgré sa récente diminution, ce taux demeure trop élevé.

La troisième faiblesse tient en l'absence d'actualisation des tranches du barème. En 2020, près de 200 000 foyers sont sortis du dispositif pour ce motif. Une indexation sur l'indice des prix à la consommation est plus que nécessaire. Je l'avais proposée dans un amendement au dernier projet de loi de finances. Il a malheureusement été déclaré irrecevable pour une raison que je n'ai toujours pas bien comprise.

La dernière lacune tient à l'absence de modulation du montant du chèque selon la région de résidence. Il fait plus froid dans le Jura, l'Aisne ou le Puy-de-Dôme qu'en Corse. Mon collègue Jean-Louis Bricout reviendra sur ce sujet qui lui est cher.

La correction de ces lacunes relève pour partie du domaine législatif mais, compte tenu de la rigueur de l'article 40, une initiative gouvernementale s'impose. Je l'appelle de mes vœux tout comme j'invite le Gouvernement à prendre en considération les recommandations de la Cour.

Elle soumet trois scénarios d'évolution possible du chèque énergie, qui seront autant de pistes de réforme pour le futur législateur. À titre personnel, je suis favorable à court terme au troisième scénario qui permettrait de relever le montant moyen du chèque de 150 à 241 euros par ménage, ce qui permettrait de financer non plus 9 % mais 15 % de la facture énergétique, soit une différence significative pour un ménage précaire. À moyen terme, nous devons concilier la lutte contre la précarité énergétique et nos objectifs environnementaux.

Comment expliquez-vous que 750 000 personnes éligibles ne reçoivent pas le chèque énergie ? Comment faire pour les identifier ?

Ensuite, je note que les revenus pris en compte pour déterminer l'éligibilité au chèque énergie sont ceux de l'année n-2, et non ceux de l'année n-1 comme pour l'aide personnalisée au logement. Ne serait-il pas préférable de retenir les ressources de l'année n-1, voire de l'année n afin que le dispositif s'adapte plus rapidement à l'évolution des situations individuelles ?

Enfin, selon les informations de la direction générale de l'énergie et du climat (DGEC), en 2021 seulement 4 885 chèques ont été utilisés dans les EHPAD. Il faut absolument améliorer l'information des seniors.

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