Intervention de Sébastien Lecornu

Réunion du jeudi 30 avril 2020 à 14h00
Commission des lois constitutionnelles, de la législation et de l'administration générale de la république

Sébastien Lecornu, ministre auprès de la ministre de la Cohésion des territoires et des Relations avec les collectivités territoriales, chargé des collectivités territoriales :

En matière de responsabilité pénale, les maires ne demandent aucun privilège, que leurs administrés ne comprendraient du reste pas ; ce dont ils ne veulent pas, c'est d'une responsabilité déraisonnable ou inappropriée aux regards de leurs compétences. La loi « Fauchon » a constitué une belle révolution juridique en 2000 et mis fin à toutes ces procédures pour homicide involontaire, en posant clairement le principe que la négligence devait être intentionnelle, et le non-respect de la loi ou du règlement délibéré. On ne part donc pas de rien, et les maires ne courent pas un risque judiciaire imminent dans cette période d'épidémie. Et si l'ouverture des écoles ou la distribution de masques peut donner lieu à interrogations, la discussion du projet de loi la semaine prochaine et les navettes seront l'occasion de préciser le droit et la jurisprudence en la matière.

Le « pacte de Cahors » est suspendu jusqu'à nouvel ordre, car il correspond au monde d'avant… On imagine difficilement expliquer à un président de conseil départemental qu'il doit contenir ses dépenses de fonctionnement alors que ses dépenses sociales explosent.

Les baisses de ressources sont très précisément documentées. Dans certains cas – taxes de séjour, casinos, budgets annexes enfance et jeunesse, versement mobilité, droits de mutation à titre onéreux (DMTO) –, les pertes sont immédiates ; dans d'autres – dotation globale de fonctionnement (DGF), dont les enveloppes ont été votées en loi de finances, taxe d'habitation, taxe foncière –, les conséquences financières se feront plutôt sentir l'année prochaine. Cela nous laisse le temps de les chiffrer et surtout d'en analyser l'incidence par strates de collectivités : les conseils départementaux seront probablement les plus affectés : entre l'augmentation des dépenses sociales et la chute des DMTO, l'effet de ciseaux est évident. Les effets sur la fiscalité de production qui, outre les régions, intéresseront principalement les intercommunalités, seront très divers : certaines activités économiques ont continué à prospérer, d'autres ont été mises totalement à l'arrêt. La mission confiée à Jean-René Cazeneuve nous permettra de disposer d'outils adéquats au moment de la loi de finances. Mais là où il y a urgence, il y a une solution : ainsi, dans les collectivités en butte à des difficultés particulières de trésorerie, notamment outre-mer, nous avons autorisé les préfets à verser des avances de fiscalité ou de DGF par douzièmes, tandis que les dépenses de fonctionnement seront lissées sur plusieurs années.

La mutualisation de personnels entre communes est déjà possible et pratiquée, surtout dans le domaine de l'accompagnement scolaire.

Il est trop tôt pour faire des annonces en matière de relance de l'investissement, mais les collectivités territoriales, qui représentent 70 % de la commande publique globale, joueront évidemment un rôle majeur. Non seulement la DGF ne diminue plus depuis 2017, mais la dotation d'équipement des territoires ruraux (DETR) et la dotation de soutien à l'investissement local (DSIL) ont été sanctuarisées. Faut-il imaginer une nouvelle dotation d'investissement, afin de doper l'activité locale ? C'est une possibilité. En tout état de cause, les collectivités territoriales peuvent compter sur des mécanismes au long cours et seront plus à même d'amortir le choc que certaines entreprises ou associations d'autoentrepreneurs.

S'agissant de l'installation des conseils municipaux, le caractère secret du suffrage ne peut relever d'une modification de la loi : la Constitution dispose que le suffrage, qu'il soit direct ou indirect, est toujours universel, égal et secret. On pourra faire beaucoup de choses par visioconférence, y compris voter le budget, réviser un projet local d'urbanisme (PLU), mais en aucun cas élire le maire, ses adjoints ni même désigner les membres de la commission d'appel d'offres.

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