Nous sommes favorables au développement de l'usage de la visioconférence. Nous nous y sommes d'ailleurs collectivement habitués depuis deux mois. Le tribunal de commerce, s'appuyant sur un greffe privé, a par exemple réussi à élaborer un système très opérationnel et dans des délais rapides.
L'expérimentation des cours criminelles concerne davantage le parquet général et la cour d'appel de Paris, qui s'est d'ailleurs portée candidate dans le cadre de son extension. Le stock des dossiers à traiter a augmenté au cours des deux derniers mois et il faudra juger ces dossiers dans des conditions particulières. Dans les conditions sanitaires actuelles, il est certain qu'il est plus facile de juger avec une cour d'assises professionnelle qu'avec un jury populaire.
Par ailleurs, nous avons maintenu les dates de vacations d'été, qui débuteront le 10 juillet. Toutefois, nous nous adapterons aux décisions qui pourraient être prises par la Chancellerie ou la cour d'appel sur ce point. Nous sommes prêts à fournir des efforts pour écluser le stock, y compris durant l'été, sachant que les vacations supposent un allègement des audiences et non un arrêt de l'activité.
La circulaire reprenant le plan d'hygiène et de sécurité adressée par la Chancellerie a été déclinée localement et adaptée par chaque juridiction, dans le cadre d'un dialogue social renforcé.
Nous sommes demandeurs en matière d'amélioration des moyens informatiques et du fonctionnement interne de notre juridiction, mais nous n'avons que peu de marges de manœuvre car les moyens informatiques nous sont alloués par la cour d'appel en fonction des dotations annuelles décidées par l'administration centrale. Nous sommes par exemple toujours en attente de nouveaux ultraportables. Notre autonomie est très faible en la matière.
La question de la réorientation des procédures pénales est complexe et technique. Le projet de la Chancellerie porte plus particulièrement sur les convocations par officier de police judiciaire (COPJ). Quand une convocation est remise en justice, le tribunal est saisi et le ministère public ne peut pas, en principe, revenir sur cette saisine du tribunal. Le projet de la Chancellerie vise une possibilité de réorientation pour les COPJ qui ont déjà été délivrées, ce qui permettrait de reconsidérer l'orientation de certaines procédures déjà engagées, rendant possible le traitement plus rapide d'autres procédures jugées prioritaires.
Quels sont nos critères de classement sans suite ? Nous classons sans suite des procédures qui concernent des faits de gravité très relative et qui ont fait l'objet de citations directes ou de convocations, qui n'impliquent pas de victime – sinon la juridiction doit évidemment être saisie pour que la victime puisse faire valoir ses droits – ou pour lesquelles la citation ne peut pas être délivrée. Ces classements sont provisoires. Si la personne est à nouveau interpellée, elle sera doublement poursuivie.
En outre, il est inexact de dire que nous avons formé systématiquement des référés-détention. Nous ne l'avons fait que lorsqu'il est apparu au parquet que la remise en liberté n'était pas justifiée. Dans la moitié des cas, nous avons été suivis par la chambre des instructions. Chacun était ainsi dans son rôle et ce n'était pas une politique systématique, puisque nous avons réservé les référés détention aux cas les plus graves.
Par ailleurs, la présentation obligatoire au magistrat des mineurs de plus de seize ans constitue un sujet en soi, qui n'est pas lié à la situation actuelle.
Enfin, il n'est pas de notre responsabilité de nous prononcer pour ou contre une loi d'amnistie. Il s'agit d'une responsabilité d'ordre politique.
En conclusion, je dirais que les besoins d'adaptation de la justice à l'ère du numérique sont encore considérables. En ce sens, nous attendons beaucoup du projet de procédure pénale numérique. Nous avons besoin de progresser rapidement et il me semble que la Chancellerie fait beaucoup d'efforts en ce sens.