Intervention de Nicole Belloubet

Réunion du jeudi 14 mai 2020 à 9h00
Commission des lois constitutionnelles, de la législation et de l'administration générale de la république

Nicole Belloubet, garde des Sceaux :

La crise a été l'occasion de montrer qu'on pouvait avoir une attitude à la fois volontariste pour assurer la sécurité sanitaire dans les prisons et raisonnable en ne permettant pas la libération de personnes condamnées pour des faits criminels, terroristes ou de violences conjugales.

Elle permet aussi de prendre acte que des différences existent entre nos 164 tribunaux, en matière d'effectifs, d'organisation et de locaux. C'est à la fois une force et une faiblesse. Je continuerai à me battre pour la proximité de la justice, sachant que la contrepartie en est la différenciation. Les consignes que nous avons données, les exigences minimales impératives émanant de la Chancellerie étaient uniformes pour toutes les juridictions, mais ensuite, le principe de subsidiarité devait nécessairement s'appliquer. Pour le déconfinement, les orientations à valeur nationale ont été données dans la circulaire du 5 mai 2020. Reste que, pour laisser une souplesse de gestion, nous avons souhaité installer auprès de chaque chef de cour des magistrats placés, qu'ils affecteront là où les besoins sont apparus.

Toutes nos forces étant actuellement mobilisées pour le traitement des dossiers, la reprise des juridictions et des établissements pénitentiaires, nous ne pourrons sans doute dresser un bilan public de la situation des juridictions qu'au début du mois de septembre, ce qui nous laissera également un recul suffisant.

S'agissant de la réorientation des procédures contraventionnelles et correctionnelles, notre hésitation sur le classement sans suite n'est pas due à une absence de courage mais à l'inscription d'une réticence dans l'avis du Conseil d'État. Nous serons attentifs à ce que vous pourrez nous dire à ce propos.

Devant un taux de population carcérale de 97 % – contre 119 % le 16 mars –, je parle bien de population et non de surpopulation. Ce taux ne cache pas un mensonge – comme M. Bernalicis aime à le dire à tout-va –, mais une réalité différenciée selon les établissements pénitentiaires : dans les maisons d'arrêt, le taux de surpopulation est de 109 %, parfois plus, contre 140 % le 16 mars, et dans certains centres de détention, le taux de population est bien en deçà de 80 %.

Pendant le confinement, les entrées en détention étaient liées aux comparutions immédiates, qui ont continué à se tenir.

Je n'ai jamais caché que nous étions parvenus à combler les vacances de postes de magistrats, mais je n'ai jamais dit qu'il y avait assez de magistrats. C'est pourquoi nous travaillons sur la clé de répartition de ces magistrats.

Quant à votre opposition aux cours criminelles et au code de justice pénale des mineurs, monsieur Bernalicis, j'y perçois un soupçon de conservatisme – cela ne m'étonne guère.

Je concède que nous devons réaliser des efforts soutenus dans le développement des applications numériques, mais je ne crois pas que nos tribunaux soient totalement inadaptés. Je ne reprends pas l'ensemble des applications qui ont été développées.

Pendant le confinement, les entrées de contentieux administratifs ont baissé de 50 %. J'ai présenté hier, en conseil des ministres, une nouvelle ordonnance visant à faciliter la reprise d'activité, avec la possibilité pour des magistrats administratifs de travailler en télé-audience de chez eux. Nous avons donné aux juridictions administratives les moyens de reprendre au plus vite les audiences, mais il m'est difficile de répondre de manière très précise sur la question des autorisations d'urbanisme.

La circulaire du 5 mai 2020 prévoit que les vacations judiciaires puissent ne commencer que le 10 ou le 17 juillet, pour que les audiencements puissent se dérouler plus facilement. Nous avons également prévu la possibilité de juger sans audience et de continuer à utiliser la visioconférence. La réorientation des contentieux sera aussi un outil dans le traitement et la fluidification des stocks.

Dans la période, rien n'empêchait le Conseil constitutionnel de statuer ; il l'a d'ailleurs fait sur six QPC.

Je n'ai rien de particulier à dire des contentieux qui sont devant la CJR. Peut-être puis-je regretter la trop grande confusion entre la responsabilité pénale et la responsabilité politique. J'assume complètement tout ce que j'ai fait, mais, en tant que ministre, je suis d'abord responsable devant vous, élus de la nation. Je n'ai pas non plus à formuler d'avis sur les contentieux administratifs.

Le décret que nous avons pris pour les signatures à distance des actes notariés a été apprécié comme une avancée importante par les notaires. Les problèmes de mise en œuvre étaient liés à des éléments que nous ne maîtrisons pas. Quant aux difficultés que connaissent les notaires en milieu rural, elles sont également le fait de la richesse de la diversité des études. Les notaires ont créé un fonds de soutien, et nous avons obtenu un report de l'arrêté sur les tarifs des professions réglementées, qui entrera en vigueur le 1er janvier 2021.

Les assureurs participent au fonds de solidarité. S'agissant des actions engagées, les tribunaux trancheront.

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