Ne nous leurrons pas : il ne faudrait pas que ce texte, qui se justifie par une éventuelle annulation du second tour, cache la mascarade du premier tour. Le jeudi qui a précédé sa tenue, le Président de la République prenait la parole pour dédramatiser la situation et deux jours après, le Premier ministre invitait presque tous les Français à rester chez eux alors que les élections se déroulaient le lendemain.
Ce n'est pas parce qu'à plus de trois semaines du deuxième tour nous travaillons à partir d'hypothèses concernant la situation sanitaire que ces élections ont été gérées d'une manière démocratiquement acceptable : la totalité des communes françaises, la veille du premier tour, a subi le contrecoup des annonces du Premier ministre, responsables de l'effondrement de la participation et des doutes sur la sincérité du scrutin.
Au premier jour de la phase 2 du déconfinement, les bars et les restaurants ont rouvert, et c'est tant mieux, mais on laisse entendre qu'il serait manifestement plus dangereux d'aller voter que de boire un verre à une terrasse ! On laisse ainsi se développer un climat anxiogène qui ne devrait pas servir à masquer le rejet massif dont vous faites l'objet de la part de la population.
Le flou demeure, avec des hypothèses sur les régimes transitoires – je pense aux intercommunalités –, sur la campagne électorale – la première semaine se déroulera sans que l'on sache si le second tour aura effectivement lieu ! Bon courage aux équipes de campagne pour essayer d'expliquer tout cela à des citoyens qui veulent s'exprimer sur des projets municipaux ! Par ailleurs, les partis politiques jouent un rôle constitutionnel et il ne faudrait pas que ce texte l'affaiblisse.
Le titre du projet, qui est bien brouillon, s'étale sur deux lignes : là encore, bon courage à qui essaiera de le lire d'une traite sans reprendre sa respiration !
En outre, le texte ne mentionne pas que si le second tour ne pouvait pas avoir lieu le 28 juin, il devrait se tenir le plus vite possible. Or, c'est cela qui est en jeu : même si des élections doivent être réorganisées, elles doivent avoir lieu le plus rapidement possible, ne serait-ce que pour assurer le bon fonctionnement des intercommunalités de qui dépend une part très importante de la commande publique. Celle-ci est à l'arrêt alors que nous en avons grandement besoin pour relancer notre économie. Toutes les entreprises attendent que les élus s'installent et si les intercommunalités ne sont pas légitimées faute de disposer d'une seule instance politique claire au sein de leur organe délibérant ou de leur exécutif, la relance en pâtira.
Enfin, nous regrettons que ce texte ne propose rien pour faciliter le vote. Nous avons certes un peu parlé des procurations mais, madame la présidente, l'amendement que nous avons déposé concernant la double procuration a été jugé irrecevable ! Notre amendement concernant le vote par correspondance a subi le même sort alors que vous venez de dire, monsieur le ministre, que ce texte était le bon vecteur législatif. La présidente de la commission des Lois peut-elle revoir sa position ? Sinon, est-ce vraiment le bon véhicule ? Ne risque-t-il pas une sortie de route législative ? Si, entretemps, le second tour est effectivement possible, ce texte sera caduc. La question des procurations et du vote par correspondance relève-t-elle donc de ce texte ou d'un autre ? Quoi qu'il en soit, si l'élection a bien lieu le 28 juin, il faut absolument faciliter l'accès au vote. Telle est la position du groupe Les Républicains.