Intervention de Hervé Saulignac

Réunion du mercredi 3 juin 2020 à 10h30
Commission des lois constitutionnelles, de la législation et de l'administration générale de la république

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaHervé Saulignac :

Chers collègues membres du groupe Les Républicains, le procès du passé que vous instruisez en vient à donner le sentiment que vous ne souhaitez pas que le groupe Socialiste soutienne votre proposition de loi, à notre sens bienvenue… Loin d'être précipitée, elle arrive à notre sens un peu en retard, mais elle pourrait, hélas ! être encore utile si notre pays devait connaître une nouvelle crise sanitaire.

Vous proposez de créer une dérogation à la loi NOTRe, que vous critiquez beaucoup mais dont vous ne remettez pas en cause les fondements. Ce serait en réalité la troisième, puisqu'elle s'ajouterait à celle de la loi « Engagement et proximité », par laquelle le préfet peut autoriser, par arrêté, le conseil départemental à verser des aides aux entreprises dans les territoires en état de catastrophe naturelle, et à celle du code général des collectivités territoriales, qui permet aux départements, lorsque l'initiative privée est défaillante ou absente, de contribuer au financement d'opérations d'investissement en faveur d'entreprises de services marchands nécessaires aux besoins de la population en milieu rural.

Cette dérogation est cependant justifiée, pour plusieurs raisons.

Premièrement, ne soyons pas naïfs, de nombreux départements pratiquent déjà ce type d'aides, mais de manière un peu détournée, en mettant en avant des critères sociaux, pour accompagner des indépendants ou des agriculteurs, ce qui revient indirectement à aider des entreprises en difficulté. Bien des présidents de conseils départementaux auraient aimé pouvoir utiliser un tel dispositif ces dernières semaines. Ils pouvaient certes venir en aide à un artisan qui avait des enfants et vu disparaître tout son chiffre d'affaires, mais jamais actionner un levier qui remette son entreprise debout. D'où une frustration, et un paradoxe incompréhensible pour ces chefs d'entreprise.

Deuxièmement, les départements ont, en matière d'aides d'urgence, une agilité que n'ont pas les régions. Être chef de file est une chose, instruire un dossier d'aide au profit de très petites entreprises en est une autre. En outre, il est parfois très difficile pour un département de travailler avec la région : j'ai pu le constater lorsque, président du conseil départemental de l'Ardèche, je devais m'entendre avec le président de la région, Laurent Wauquiez ; j'aurais apprécié de pouvoir bénéficier d'un tel dispositif.

Troisièmement, dans une situation d'une gravité exceptionnelle, la puissance publique doit pouvoir lever des freins et activer des secours exceptionnels.

Toutefois, le dispositif proposé mériterait d'être mieux borné dans le temps : la demande d'aide devrait être adressée pendant la durée de l'état d'urgence sanitaire augmentée de trois mois, et non de six mois, comme vous le proposez. Par ailleurs, les régions doivent, bien entendu, être averties des aides versées par les départements afin d'éviter tout risque de doublon. Enfin, si les entreprises du secteur touristique ont été, c'est vrai, particulièrement touchées, mieux vaut s'en tenir à un dispositif qui s'adresse à l'ensemble des secteurs pour ne pas en oublier.

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