Si la réduction du nombre de membres d'une institution est toujours plébiscitée, elle ne fait pas une réforme. En outre, sur le terrain, les inquiétudes relèvent du domaine sanitaire et de l'emploi, et cette réforme n'est pas la plus attendue. Je tenais à le rappeler pour que les parlementaires n'apparaissent pas comme déconnectés des préoccupations cruciales.
La réforme constitutionnelle de 2008, qui a ajouté la compétence environnementale au CES, était une première marche. Il faudrait en franchir une nouvelle, mais l'encadrement constitutionnel ne permet pas de répondre à cette demande forte.
Le CESE ne peut se contenter d'être une institution d'affichage, ripolinée à la participation citoyenne. Ses avis doivent être corrélés aux textes examinés par le Parlement, et ainsi pallier la pauvreté maintes fois dénoncée des études d'impact, inexistantes pour les propositions de loi. Les analyses d'impact des projets de loi mises en place par le législateur en 2009 pour combattre l'inflation législative sont peu convaincantes, ce qu'avait d'ailleurs souligné le CESE dans un rapport. Les études sont incomplètes, elles ne sont pas actualisées au cours de la procédure législative, et manquent souvent d'impartialité. Le président Claude Bartolone avait tenté d'y remédier avec sa proposition de modification du règlement de l'Assemblée nationale en 2014.
Faire du CESE un outil de diagnostic et de prospective serait, au regard du souci que nous portons aux générations futures, un objectif louable et utile, mais nous sommes limités par les dispositions constitutionnelles. Si cette volonté est partiellement affichée dans la loi organique, il est problématique de nous priver des universitaires qui se consacrent à la recherche fondamentale et pourraient nourrir le travail prospectif. Ils ne sont pas cités en tant que tels par la loi organique.
L'ouverture à la participation citoyenne prévue par le texte est très utile, toutes les institutions prenant des décisions ou rendant des avis publics devraient la rechercher. Cette participation ne doit pas être réservée à une seule institution, elle doit être entendue partout, y compris au Parlement. La pétition citoyenne reste du domaine du possible à l'Assemblée nationale, il est important de le rappeler. Si ces pétitions atteignent le seuil requis, elles doivent donner lieu à un rapport et un avis en séance plénière ou en commission. Nous considérons également que le seuil de 500 000 signatures doit être abaissé. Nous souscrivons à la proposition du garde des Sceaux de le porter à 250 000 ; nous avions même envisagé de le fixer à 100 000.
L'article 6 a été complété en tenant compte des observations fondées de l'Association des maires de France. Les consultations du Conseil national des normes et le Conseil des finances locales sont rétablies.
Enfin, se doter de règles déontologiques – ce n'est pas un gros mot, monsieur le garde des Sceaux – doit être une obligation pour toute institution, et le CESE ne peut y échapper. La première d'entre elles est d'imposer une déclaration d'intérêts, voire de patrimoine, aux membres rémunérés du CESE dont l'impartialité est attendue. Les magistrats soumis à ces déclarations en ont tiré un bilan positif devant la commission d'enquête sur l'indépendance de la justice, alors qu'ils étaient réticents au départ. Ces déclarations, exigées des parlementaires, des membres de cabinet, de la haute fonction publique et des autorités administratives indépendantes devraient être imposées aux membres du CESE.
Nous pouvons également nous interroger sur l'opportunité de prévoir la publication des opinions individuelles divergentes sur les avis, qui peuvent être utiles à la décision future.