Le ministre de la santé nous l'a rappelé ce matin en toute transparence et avec gravité : nous sommes encore au cœur de la crise sanitaire qui a frappé notre pays au début de l'année. Depuis février dernier, plus de 34 000 de nos concitoyens ont péri du fait de l'épidémie de covid-19 ; en neuf mois, près d'un million de Français ont été testés positifs. Depuis la fin de l'été, la situation sanitaire s'est dégradée ; des mesures graduelles ont été prises afin de ralentir la progression du virus, mais celui-ci circule encore trop et trop vite. Hier encore, plus de 27 000 nouveaux cas ont été dépistés ; le taux de positivité a atteint 13,7 %, contre 1 % fin juin, et on ne compte pas moins de 139 nouveaux clusters en cours d'investigation. Depuis début octobre, plus de 300 000 personnes ont été testées positives.
Nos services de réanimation sont au bord de la saturation. En une seule journée, hier, 1 584 personnes ont été hospitalisées pour des soins lourds en réanimation. La situation, déjà inquiétante, devient jour après jour dramatique.
Le Gouvernement a su agir rapidement. Dès la fin de l'été, sur le fondement de textes votés par le Parlement, des mesures de protection et de restriction ont été prises dans l'ensemble du territoire. Le 14 octobre, le Gouvernement a annoncé le rétablissement de l'état d'urgence sanitaire au niveau national jusqu'au 16 novembre, et neuf métropoles, celles où la circulation du virus est la plus active, ont été placées sous le régime du couvre-feu de vingt et une heures à six heures du matin.
Ces mesures sont dures, contraignantes, elles affectent notre vie sociale, mais la majorité de nos concitoyens les comprennent et les respectent parce qu'ils les savent indispensables. Ils ont intégré les gestes barrières à leur quotidien, tâchent de porter le masque et d'appliquer la distanciation physique, ainsi que le couvre-feu pour ceux qui sont concernés. Il faut leur rendre hommage ; pensons à toutes celles et ceux dont l'activité quotidienne – personnelle, professionnelle, économique – est affectée mais qui, au nom du bien collectif, font preuve d'une rigueur qui les honore.
Cette situation nous appelle à faire preuve de responsabilité en votant de nouveau la mise en œuvre de l'état d'urgence sanitaire. Le présent projet de loi est le cinquième qui nous est soumis à ce sujet. La loi du 23 mars 2020 a institué le régime de l'état d'urgence sanitaire, prononcé le report des élections municipales, autorisé le Gouvernement à légiférer par ordonnances, notamment en matière économique et sociale. La loi du 11 mai a prorogé l'état d'urgence jusqu'au 11 juillet et instauré le dispositif « protéger, tester, isoler » ainsi qu'un mécanisme de suivi des malades et de traçage des contacts. La loi du 9 juillet a créé un régime transitoire dans l'espoir d'un retour progressif à la normale, permettant au Premier ministre de prendre par décret des mesures adaptées localement par les préfets. Le 1er octobre, nous votions la prorogation de ce régime transitoire jusqu'au 1er avril 2021. La dégradation de la situation sanitaire nous oblige à reconsidérer le dispositif et à voter l'application de l'état d'urgence sanitaire jusqu'au 16 février 2021 au plus tard, avant de basculer dans le régime transitoire que nous avons construit et voté ici même.
Lors de l'audition des ministres, beaucoup se sont interrogés sur l'articulation entre les deux régimes et sur leur cohabitation. Je salue la démarche du Gouvernement, qui propose au Parlement de voter des mesures d'exception, venant à échéance au 16 février, tout en anticipant sur la sortie de l'état d'urgence et en se préparant à accompagner la reprise progressive du cours normal de nos vies.
Le texte étend également le domaine d'utilisation des outils de traçage des personnes contacts, toujours afin de mieux détecter pour mieux tester, isoler et protéger.
Enfin, l'article 4 comporte diverses habilitations à légiférer par ordonnances. Certes, la liste est longue, mais il s'agit principalement d'assurer la continuité des droits de nos concitoyens – chômage partiel, délais administratifs, procédures d'expulsion, etc. À l'instar de Sacha Houlié ce matin, je me réjouis que le Gouvernement n'envisage pas de nouvelles dispositions en matière de procédure pénale, notamment une nouvelle prorogation des délais de détention. Notre rapporteur défendra des amendements à cet article afin de renforcer le rôle du Parlement ; ils bénéficieront du soutien sans réserve du groupe La République en marche.
Notre groupe votera le texte, non de gaieté de cœur, mais en responsabilité, parce que l'état d'urgence sanitaire est nécessaire.