Intervention de Danièle Obono

Réunion du mercredi 4 novembre 2020 à 9h30
Commission des lois constitutionnelles, de la législation et de l'administration générale de la république

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaDanièle Obono :

L'actualité récente nous a rappelé la permanence de la menace terroriste. Afin de lutter contre celle-ci, des outils efficaces doivent être confiés à la police et à la justice – je pense notamment au renseignement humain et au travail de terrain. Hélas, en matière de lutte contre le terrorisme comme en matière de santé, le Gouvernement et la majorité abusent des restrictions de liberté, optant pour une escalade sécuritaire qui, non seulement ne permet pas d'atteindre l'objectif légitimement poursuivi, mais est à certains égards contreproductive.

Aussi nous opposons-nous à la prorogation de certaines des dispositions de la loi SILT, qui visait à introduire l'état d'urgence dans le droit commun. Nous vivons dans un état d'urgence permanent, qui restreint nos droits et libertés sans renforcer notre capacité à protéger la population et les anticorps républicains qui nous permettraient de faire face à de nouvelles attaques. Qui plus est, il a donné lieu, comme l'ont dénoncé nombre d'organisations françaises et internationales de défense des droits humains, à des abus et à des mesures illégitimes ; je pense notamment à l'assignation à résidence de militants et de militantes écologistes.

Se pose par ailleurs la question de l'évaluation de l'opérationnalité de la loi. Comment, en effet, pouvons-nous proroger un dispositif dont nous ne pouvons juger de l'effectivité ? Lors de l'application de l'état d'urgence, on a relevé que, sur les 4 000 perquisitions réalisées, 30 procédures seulement avaient abouti, sans compter les nombreuses atteintes aux libertés dénoncées notamment par Amnesty international !

En outre, il est regrettable que la stratégie du Gouvernement fasse l'impasse sur ce qui devrait être un élément fondamental de la lutte contre les actes terroristes, à savoir les circuits de financement des organisations terroristes, via notamment les paradis fiscaux et le blanchiment international, dont les FinCEN (Financial crimes enforcement network) files ont révélé le scandale – on parle d'au moins 2 000 milliards de dollars, issus des pires trafics. Ce phénomène est rendu possible par une régulation bancaire insuffisante. Notre pays devrait donc se montrer beaucoup plus ferme vis-à-vis des États et organisations qui concourent au financement du terrorisme. Du reste, dans leur rapport, nos collègues Bernalicis et Maire préconisent de renforcer les moyens affectés à la lutte contre ces circuits financiers.

Le groupe LFI demeure opposé à la prorogation de l'état d'urgence, devenu désormais permanent. Nous considérons comme erroné le diagnostic selon lequel une militarisation accrue de la société et la remise en cause des libertés fondamentales nous prémuniraient contre les attaques terroristes. C'est, au contraire, en préservant ces libertés que nous y ferons face.

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