Intervention de Emmanuelle Ménard

Réunion du mercredi 18 novembre 2020 à 9h30
Commission des lois constitutionnelles, de la législation et de l'administration générale de la république

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaEmmanuelle Ménard :

Pardonnez-moi, je vais un peu refroidir l'ambiance ! Je suis, pour ma part, députée d'Occitanie, de Béziers, et je connais bien l'accent du Sud, que j'apprécie, mais je suis née à Lille : j'ai, si j'ose dire, deux accents qui font le grand écart entre le nord et le sud de la France.

Vous avez précisé dans votre introduction, monsieur le rapporteur, que l'agenda de cette proposition de loi n'était pas le point le plus important et qu'il dépendait du rythme des journées réservées. Je ne suis pas de cet avis. Non, le moment n'est pas le mieux choisi – même si vous n'en avez pas la maîtrise –, alors que nous sommes en urgence sanitaire et en urgence attentat. Cela me semble – et c'est un euphémisme ! – en décalage par rapport aux préoccupations des Français, à ce que vivent les commerçants, restaurateurs, gérants de bars, d'hôtels, de boîtes de nuit et j'en passe.

Par ailleurs, un aspect de votre propos m'a choquée. Non, on ne peut pas comparer les discriminations que subissent les homosexuels ou les handicapés à celles prétendument endurées du fait de son accent. On est à la limite de l'indécence.

Sur la méthode, vous posez la question sous l'angle de la discrimination et c'est dommage. Au lieu de promouvoir les accents, comme le suggère le titre de votre proposition de loi, vous voulez réprimer. Le procédé n'est pas le bienvenu. Nous aurions tout à gagner à promouvoir les accents, au lieu de réprimer en les inscrivant dans la longue liste des discriminations prévues dans notre code pénal.

Cela a été dit, notre Premier ministre a un accent. Je ne pense pas qu'il ait été discriminé pour cette raison. Certains des cosignataires de votre proposition de loi ont littéralement squatté les plateaux de télévision durant la crise des « gilets jaunes » ou de la réforme des retraites. Je n'ai pas eu l'impression qu'ils aient été discriminés du fait de leur accent. Certains des porte-paroles du groupe majoritaire – peut-être est-ce également le cas dans d'autres groupes – ont un accent. Sont-ils discriminés ? Je ne le crois pas.

Donc, oui, à la promotion de la France des accents, mais pas de cette façon, pas par le biais de l'interdiction et de la sanction, cela ne me paraît pas judicieux, pas plus que de légiférer sur cette question en ce moment car je ne crois pas que la loi apporterait quoi que ce soit en la matière.

En conclusion, je reviendrai sur un engagement de campagne du Président de la République – sous le nom duquel vous avez été élu, monsieur le rapporteur, même si vous avez changé de groupe depuis –, celui de lutter contre l'inflation législative. Pour reprendre ses propos lors d'un Congrès à Versailles, la loi est faite pour encadrer les transformations profondes, les débats essentiels et donner un cap. Je crois qu'il est grand temps de revenir à l'essentiel.

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