Cette proposition de loi constitutionnelle me paraît opportune et pertinente. Défendue par nos collègues sénateurs et adoptée à l'unanimité par le Sénat de la République, elle soulève deux questions essentielles : la pérennité du combat pour la laïcité républicaine, qui a fait la France, et la lutte contre une évolution multiculturaliste de notre pays et de notre société, que certains souhaitent, y compris, visiblement, dans le groupe majoritaire.
Il est plus important que jamais d'avoir le courage d'adapter notre Constitution aux menaces nouvelles – car il ne s'agit pas ici de tenir compte de certaines évolutions de la société – qui font planer une très lourde hypothèque sur l'avenir même de notre nation. Nous sommes aux prises avec des germes de désagrégation qui portent les noms de communautarisme et d'islamisme. Ces menaces gagnent clairement du terrain, conquièrent des quartiers, des esprits et des armes sur le territoire de la République. Il faut donc réagir.
Or cette réaction me paraît ne pouvoir revêtir qu'un caractère constitutionnel, notamment au vu de certaines interprétations de notre droit par le juge constitutionnel. Nous en parlions hier encore, madame la présidente, avec le président du tribunal judiciaire de Paris, à propos d'une affaire connexe, à savoir la censure par le Conseil constitutionnel des dispositions relatives au suivi des détenus condamnés pour terrorisme islamiste ou radicalisés en prison. Il a évoqué la gravité de cette question, comme l'avait fait avant lui le procureur national antiterroriste. À un moment, force est de constater que l'interprétation du juge constitutionnel ne nous permet plus de protéger notre nation comme nous le souhaiterions. Il y a donc une question de forme, et le vecteur de la révision constitutionnelle s'impose fortement. C'est chez moi une conviction ancienne, confortée par les récentes décisions du Conseil constitutionnel, qui ont suscité un émoi légitime, pas seulement ici, pas seulement chez la présidente de la commission des Lois, mais aussi chez les magistrats spécialisés dans la lutte contre le terrorisme. Ces derniers nous invitent à mener une réflexion sur la nécessité de passer par une réforme constitutionnelle, ce que les sénateurs ont choisi de faire. Cette proposition de loi nous permettra de lutter plus efficacement contre le communautarisme, contre ce qui constitue désormais pour notre nation une menace terrifiante.
Je rappellerai, chers collègues de la majorité, les propos, hélas ! prémonitoires, d'un des vôtres, qui fut le premier ministre de l'intérieur de ce quinquennat et l'un des fondateurs du macronisme : M. Gérard Collomb. Au moment de quitter la place Beauvau, il prononça ce qui fut sans doute le meilleur discours qu'il ait tenu dans ces fonctions : « On vit côte à côte, je crains que demain on ne vive face à face ». Or le face-à-face, malheureusement, il est là, dans les quartiers, dans nos territoires, dans les écoles, dans les églises, et il est tragique – nous l'avons vu à Nice et à Conflans-Sainte-Honorine. Nous l'avons vu même au moment de l'hommage à Samuel Paty dans les écoles de la République, au cours duquel 400 incidents au moins se sont produits.