Intervention de Dimitri Houbron

Réunion du mardi 1er décembre 2020 à 17h30
Commission des lois constitutionnelles, de la législation et de l'administration générale de la république

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaDimitri Houbron :

Ce projet de loi ratifiant l'ordonnance du 11 septembre 2019 portant partie législative du code de la justice pénale des mineurs répond aux attentes formulées par la majorité des acteurs concernés au quotidien par ce sujet délicat. Le texte part du postulat que l'ordonnance du 2 février 1945 est usée, qu'elle manque d'un fil conducteur et qu'elle ne permet plus d'apporter de réponse judiciaire cohérente dans un délai raisonnable – un postulat qui ne fait pas toujours consensus, car il est malheureusement acquis que l'efficacité d'une mesure se vérifie souvent à son ancienneté.

Cette réforme comporte plusieurs points forts.

Tout d'abord, contrairement à ce qui est parfois avancé, elle ne se concentre pas uniquement sur l'aspect répressif ; au contraire, elle fait de l'option éducative une priorité. Concrètement, le texte met sur pied une mesure éducative judiciaire unique en lieu et place des multiples dispositifs créés au gré des réformes successives de l'ordonnance ; elle sera décomposée en modules permettant de cadrer les modalités du travail éducatif, à savoir l'insertion avec la scolarisation, le placement – que ce soit en foyer, en famille d'accueil ou en internat scolaire –, la santé ou encore la réparation de l'infraction commise. Les autres bienfaits de cette mesure éducative judiciaire résident dans la possibilité de la faire évoluer dans le temps, en fonction des difficultés rencontrées ou des évolutions positives.

Une autre force de ce texte est qu'il propose un jugement adapté quant à la sanction. Celle-ci doit être éducative en première intention et peut être répressive par exception. Elle est décidée en fonction de la personnalité du mineur, de son évolution et de la réitération des infractions. Concrètement, le jugement peut constater l'insertion du mineur par une déclaration de réussite éducative.

Comme vous le savez, je suis singulièrement attaché à la recherche de mesures permettant de désengorger les tribunaux et d'améliorer la réponse pénale. À cet effet, je note, d'une part, que le juge des enfants peut prononcer des mesures éducatives sans qu'il soit nécessaire de réunir le tribunal pour enfants ; d'autre part, que la sanction intervient en douze mois maximum, à savoir trois mois pour le jugement sur la culpabilité et neuf mois maximum de mise à l'épreuve éducative.

Cette réforme s'attache aussi à l'information et à la responsabilisation des parents. Ceux-ci seront informés de toute décision prise pour leurs enfants, convoqués à toutes les audiences et entendus par le juge des enfants ou le tribunal pour enfants. En cas de carence parentale, une amende pourra être prononcée ou un stage de responsabilité parentale proposé.

Il est illusoire de penser que la justice, qui découvre souvent ces jeunes à l'âge de 14 ou 15 ans, pourra résoudre ces problèmes sans l'appui des parents, des écoles, des entreprises, des centres de formation voire de l'armée. C'est toute la société qui doit se mobiliser sur ce sujet, sans céder aux passions.

Gardons à l'esprit que toute la procédure pénale applicable aux mineurs est soumise au respect des principes fondamentaux reconnus par les lois de la République dégagés par le Conseil constitutionnel en 2002, parmi lesquels figure l'atténuation de la responsabilité pénale des mineurs en fonction de leur âge.

Le groupe Agir ensemble salue tout particulièrement l'article L. 13-4 du nouveau code, qui permet de proposer à la victime et à l'auteur de l'infraction de recourir à la justice restaurative, conformément à l'article 10-1 du code de procédure pénale, à l'occasion de toute procédure concernant un mineur.

Des structures gérées par d'anciens militaires, les établissements publics d'insertion de la défense (EPIDE), accueillaient de grands adolescents et de jeunes majeurs, qui recevaient une formation et apprenaient des règles de vie quotidienne dans un cadre militaire plutôt bienveillant. Cela pouvait répondre à un besoin de cadre et d'autorité chez certains jeunes délinquants tout en sortant ces derniers du circuit des foyers éducatifs pour mineurs dont ils connaissent parfois tous les rouages. La cohabitation avec de jeunes adultes pouvait également être un atout, contrairement à ce que l'on affirme souvent. L'expérience s'est malheureusement arrêtée il y a dix ans, faute de financement pérenne, pour les mineurs, mais elle se poursuit pour les jeunes majeurs. À ce propos, j'ai eu la chance de visiter, au début de mon mandat, l'EPIDE de Cambrai ; près des trois quarts des jeunes qui y sont passés voulaient s'engager pour la République, dans l'armée ou dans les forces de l'ordre. Comptez-vous entamer une réflexion sur ce sujet afin de trouver des nouveaux outils de ce type pour les mineurs, éventuellement encadrés par des militaires ?

Pour conclure, je tiens à rassurer le rapporteur et le Gouvernement : le groupe Agir ensemble votera bien évidemment ce projet de loi.

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