Intervention de éric Dupond-Moretti

Réunion du mardi 1er décembre 2020 à 17h30
Commission des lois constitutionnelles, de la législation et de l'administration générale de la république

éric Dupond-Moretti, Garde des sceaux :

Je vous rassure, même si je pense que vous n'aviez pas réellement d'inquiétudes, les autres hypothèses seront traitées puisqu'il ne s'agit pas d'une loi d'amnistie. Les services vont aider les juridictions les plus fragiles et les plus demanderesses et expliquer que cette procédure a vocation à s'appliquer.

Le stock est endémique dans la justice. C'est particulièrement vrai pour les mineurs puisque la mise en examen n'était enserrée dans aucun délai. Si nous attendons qu'il n'y ait plus de stock pour voter une réforme de la procédure, nous n'en voterons aucune !

Je le répète, nous avons fait des efforts budgétaires, les services sont à la disposition des juridictions, nous disposons d'outils pour déstocker certaines affaires qu'il n'y aurait plus aucun sens de juger du fait des délais. C'est une question de pragmatisme et de bon sens.

Madame Vichnievsky, je vous remercie de rappeler que la présomption est conforme à la jurisprudence. Le juge de l'assistance éducative a une connaissance approfondie du mineur. Le cadre est donc différent – il y a d'ailleurs un avocat – et la procédure plus formelle. Ce juge est le plus à même d'individualiser la réponse pénale.

J'ai entendu vos propos et les prends d'autant plus en considération que vos constats sont issus de votre expérience professionnelle. Mais les juges des enfants qui m'entourent n'ont pas forcément le même point de vue. Le juge a vocation à tout examiner et il est plus compétent s'il a les deux volets.

Mme Moutchou me pose une question intéressante : avons-nous un problème d'inconstitutionnalité ? Ce qui est contraire au principe d'impartialité, c'est d'accomplir des diligences utiles pour parvenir à la manifestation de la vérité et, ensuite, de juger. Ce serait le cas si le juge d'instruction venait à juger celui qu'il a renvoyé devant le tribunal correctionnel. Pour reprendre l'expression de Robert Badinter, si c'était le cas, il serait alors Maigret et Salomon. En l'espèce, nous ne sommes pas dans cette situation et il n'y a donc absolument aucun risque d'inconstitutionnalité. J'y reviendrai à l'occasion de l'examen des amendements.

Sur les renforts d'effectifs, j'ai répondu. C'est immédiat. Je peux vous transmettre le détail des affectations si vous le souhaitez. Nous sommes même un peu victimes de notre succès : on nous en demande encore plus, mais nous avons finement réparti en fonction des besoins des juridictions dès les premières annonces. Il s'agit de 2 450 personnels supplémentaires, comprenant des emplois pérennes, et d'autres qui ne le sont pas.

Madame Brocard, nous tenons à ce que cette réforme ne soit pas lettre morte. L'IGJ et les services de l'administration sont très mobilisés : nous disposons d'outils visant à faciliter l'apurement des stocks ; l'inspection apporte son soutien méthodologique aux juridictions qui le demandent ; la DPJJ et la direction des affaires criminelles et des grâces (DACG) font le tour des cours d'appel pour diffuser et expliquer les outils mis à disposition.

Vous m'avez également interrogé sur les centres éducatifs fermés (CEF) comme alternative à l'incarcération dans un cadre éducatif renforcé. Je rappelle que, dans ces structures, on compte vingt-six éducateurs pour douze mineurs. Je suis très impressionné par le travail réalisé.

Il ne faut pas confondre la récidive et la réitération : nous comptons 2 % de récidive et 16 % de réitération, d'où l'intérêt de juger en une seule fois, même si les faits sont différents. C'est une des mesures importantes : la recherche de culpabilité fait l'objet de la première phase, puis le jugement et le prononcé de la peine interviennent dans un délai maximal de neuf mois. Si, dans l'intervalle, d'autres faits sont commis, ils constitueront un seul dossier.

Madame Obono, que dire, si ce n'est que cette réforme n'est pas répressive et sécuritaire…

Aucun commentaire n'a encore été formulé sur cette intervention.

Cette législature étant désormais achevée, les commentaires sont désactivés.
Vous pouvez commenter les travaux des nouveaux députés sur le NosDéputés.fr de la législature en cours.