Intervention de Julien Aubert

Réunion du mercredi 17 février 2021 à 9h30
Commission des lois constitutionnelles, de la législation et de l'administration générale de la république

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaJulien Aubert :

C'est un sujet juridique. Dire que « les politiques publiques garantissent le respect des droits », ce n'est pas la même chose que d'affirmer que « la France garantit la préservation de l'environnement ». Lorsqu'on utilise le verbe garantir, cela concerne soit des principes, soit des droits. La particularité de l'amendement socialiste qui a été proposé, à juste titre, est qu'il garantit un droit. Dans la Constitution, et notamment dans le préambule de la Constitution de 1946, on garantit à la femme des droits, on garantit à l'enfant l'accès à l'instruction. Selon son onzième alinéa, « elle garantit à tous, notamment à l'enfant, à la mère et aux vieux travailleurs, la protection de la santé, la sécurité matérielle, le repos et les loisirs », ce qui pourrait aller dans votre sens, parce qu'il ne garantit pas seulement des droits ou une capacité, mais bel et bien une politique. Néanmoins, le texte insiste sur le fait que c'est bien « le droit d'obtenir de la collectivité des moyens convenables d'existence » qui est ainsi visé.

Nous devons donc nous montrer très prudents. Vous n'offrez pas une protection juridique accrue : vous créez une obligation de résultat. « Garantir », cela veut dire assumer sa responsabilité à l'égard de quelqu'un. Or vous ne précisez pas vers qui la garantie est tournée. Chaque fois que la Constitution utilise ce terme, elle précise qui en est le bénéficiaire. En ouvrant totalement cette disposition, d'un point de vue juridique, on permet à n'importe quelle partie prenante, n'importe quelle association de demander la mise en jeu de cette garantie. Si l'on garantit la préservation de l'environnement, et non pas le droit à avoir un environnement préservé, je crains que l'on ne quitte le domaine juridique pour entrer dans un domaine matériel. Cela sera source de contentieux et entraînera un dévoiement du mot « garantit » puisque l'on passera du domaine du droit à celui de l'effectivité d'une politique, ce qui n'est pas la même chose. Dire que le Gouvernement garantit aux Français « le droit d'avoir des finances saines », ce n'est pas la même chose que d'affirmer que le Gouvernement « garantit que les finances seront saines ». C'est en cela que nous divergeons. Je crains que cela ne provoque une explosion des contentieux dans le domaine environnemental, déjà très importants. Au lieu d'agir plus vite, cela fera comme pour les éoliennes : cela ralentira l'action. Vous obtiendrez l'inverse de ce que vous visiez.

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