Le projet de loi constitutionnelle que nous examinons en deuxième lecture prévoit d'inscrire à l'article 1er de la Constitution que la République garantit la préservation de l'environnement et de la diversité biologique et lutte contre le dérèglement climatique.
L'acuité de la préoccupation environnementale est bien réelle, puisqu'il s'agit du troisième projet de réforme constitutionnelle en la matière en moins de trois ans. Depuis l'adoption de la Charte de l'environnement en 2004, la multiplication et l'intensification des phénomènes climatiques, l'accélération de la désertification et de la montée du niveau des mers et des océans, le développement des catastrophes naturelles et la disparition d'un nombre croissant d'espèces végétales et animales changent la donne et appellent une réponse forte, qui repose notamment sur l'inscription dans la loi fondamentale, après un processus démocratique inédit, de la préservation de l'environnement, de la protection de la diversité biologique et de la lutte contre le dérèglement climatique.
Si cette réforme prolonge les révisions constitutionnelles de 2004 et de 2008 relatives à l'environnement, elle suit une procédure novatrice et unique. En effet, le grand débat national avait mis en évidence une double demande des Français pour davantage de démocratie participative et délibérative, et pour une transition écologique plus juste. Afin de répondre à ces attentes, le Président de la République a choisi de créer une Convention citoyenne pour le climat, premier exercice de cet ordre au monde par le nombre de participants et par l'ampleur du champ traité. Dans cet exercice de démocratie délibérative, 150 citoyennes et citoyens tirés au sort, venus de tous les territoires et de tous les milieux, représentatifs de la diversité et de la richesse de la France, ont travaillé durant neuf mois et rencontré des dizaines d'experts, afin de proposer des mesures concrètes pour relever le défi climatique en matière de transition écologique et pour accélérer la lutte contre le changement climatique.
En première lecture, nous avions consacré la préservation de l'environnement et, en son sein, la protection de la diversité biologique et la lutte contre le dérèglement climatique, comme un principe constitutionnel plein et entier. Nous entendions aller plus loin que les textes et la jurisprudence actuels en faisant de la préservation de l'environnement, non plus seulement un objectif à valeur constitutionnelle, mais bel et bien un principe à valeur constitutionnelle. Un objectif à valeur constitutionnelle n'introduit qu'une obligation de moyens et nécessite, pour être atteint, une intervention du législateur, tandis que la règle constitutionnelle a un caractère impératif. Cette avancée permettra de mieux concilier la protection de l'environnement avec d'autres principes constitutionnels. Il est nécessaire que l'enjeu environnemental figure au premier rang de notre texte fondamental, au cœur des autres principes constitutionnellement garantis, placés au sommet dans l'ordre juridique français.
Afin que la préoccupation environnementale innerve chacune de nos politiques publiques, nous souhaitons conserver le verbe « garantir », qui fait la force juridique de ce texte. Tout d'abord, il introduit un principe d'action positive pour les pouvoirs publics, locaux et nationaux, en instituant un droit constitutionnel à l'environnement. Ensuite, il introduit une quasi-obligation de résultat en matière de préservation de l'environnement – laquelle s'inscrit dans la dynamique jurisprudentielle contemporaine –, ainsi qu'une quasi-obligation de moyens contre le dérèglement climatique. En créant cette garantie à la charge des pouvoirs publics, nous complétons utilement l'article 2 de la Charte de l'environnement, qui dispose que « toute personne a le devoir de prendre part à la préservation et à l'amélioration de l'environnement ».
Vous l'aurez compris, le maintien du verbe « garantir » dans cet article est essentiel si nous voulons disposer d'un texte ambitieux, à la hauteur des défis écologiques et démocratiques du XXIe siècle. En votant ce texte, nous ferons de la France le premier État européen, et l'un des premiers pays au monde, à inscrire la lutte contre le dérèglement climatique dans sa loi fondamentale. Nous affirmerons sa volonté de poursuivre son action contre le changement climatique, notamment au niveau international. C'est une avancée fondamentale et déterminante.
Nous avons la possibilité, et la responsabilité, d'accélérer la lutte contre le dérèglement climatique, de protéger la diversité, de matérialiser l'engagement de la France en faveur de l'environnement, mais également de faire vivre la démocratie. C'est une attente forte de nos concitoyens. Le groupe La République en marche souhaite réaffirmer l'ambition de cette révision constitutionnelle, tout en avançant avec le Sénat vers le référendum. Cette procédure a un caractère inédit, puisque le texte qui sera soumis au peuple, sous réserve d'un accord entre les deux chambres, s'inspirera fortement de la proposition initiale faite par la Convention citoyenne pour le climat.
Chers collègues, nous proposons de rétablir l'article unique dans sa version issue de la première lecture à l'Assemblée nationale, en tenant compte de la volonté du Sénat de substituer au verbe « lutter » le verbe « agir », comme l'a recommandé le Conseil d'État. En cela, nous dépassons les clivages et souhaitons marquer notre volonté de travailler de concert avec toutes les parties prenantes pour permettre aux Français de s'exprimer sur cette question et d'inscrire ainsi la lutte contre le dérèglement climatique dans notre loi fondamentale.