Intervention de Dimitri Houbron

Réunion du mardi 15 juin 2021 à 17h30
Commission des lois constitutionnelles, de la législation et de l'administration générale de la république

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaDimitri Houbron :

Je ne m'attarderai pas sur la genèse de ce projet de loi constitutionnelle, ni sur son bien-fondé : il est évidemment légitime de graver le principe de la préservation de l'environnement dans le marbre de notre Constitution. Cela a déjà été rappelé par les orateurs qui se sont exprimés avant moi, comme par mon collègue Christophe Euzet lors de l'examen du texte en première lecture.

Je n'ai pas la prétention de m'exprimer au nom des membres de la Convention citoyenne pour le climat mais je me suis efforcé de comprendre leurs motivations et les raisons pour lesquelles ils ont formulé cette proposition. Depuis l'adoption du projet de loi constitutionnelle de 2005 par le Congrès, la Charte de l'environnement de 2004 a intégré le préambule de notre Constitution. Par conséquent, elle fait partie du bloc de constitutionnalité, cet ensemble de textes et de principes relatifs aux droits et libertés fondamentaux ayant valeur constitutionnelle. Ce n'est pas être méprisant que de dire que le projet de loi constitutionnelle que nous examinons n'est pas de nature à bouleverser fondamentalement la place de la préservation de l'environnement dans notre hiérarchie des normes. D'ailleurs, dans son avis du 14 janvier, le Conseil d'État a indiqué que « si l'inscription de la préoccupation environnementale à l'article 1er de la Constitution revêt une portée symbolique qui ne peut être ignorée, elle ne lui confère, par elle-même, aucune prééminence d'ordre juridique sur les autres normes constitutionnelles ».

Pourtant, force est de constater que, depuis 2008, un nombre très restreint de questions prioritaires de constitutionnalité (QPC) a été déposé sur le fondement de la Charte de l'environnement. Parions sur le fait que la modification de l'article 1er du texte constitutionnel sera plus intelligible que l'élargissement du spectre des textes appartenant au bloc de constitutionnalité et que citoyens et parlementaires s'en saisiront.

Encore une fois, sans me faire le porte-parole de la Convention citoyenne, j'observe qu'elle a proposé de modifier notre Constitution afin de mieux garantir, au sein même du texte fondamental de la République, la lutte contre le dérèglement climatique et pour le respect de l'environnement, qui sont devenus des enjeux vitaux pour le système vivant. Ce texte a une double ambition : une ambition emblématique, d'abord, en faisant de la lutte contre le dérèglement climatique un objectif de la République ; il témoigne ensuite d'une volonté affirmée de mobiliser la Nation en ce sens, par un engagement renforcé dans des actions effectives contre le dérèglement climatique, notamment avec la création d'outils concrets pour toutes les instances et administrations publiques.

L'article unique de ce projet de loi a été largement modifié par le Sénat, alors que la volonté de la majorité présidentielle était de soumettre à référendum un article en tout point identique à celui proposé par la Convention citoyenne pour le climat. Le groupe Agir ensemble, dès la première lecture du texte, avait néanmoins préconisé de substituer au terme « lutter » le verbe « agir », qui implique une action positive de la part de l'État. Nous défendrons un amendement en ce sens et constatons avec satisfaction que les autres groupes de la majorité, ainsi que le rapporteur, ont déposé des amendements identiques. Le verbe « agir » donne une forme de priorité à la préservation de l'environnement sur les autres principes constitutionnels et introduit une obligation de résultat, ce qui facilite l'engagement de la responsabilité des personnes publiques en cas d'atteinte à l'environnement.

Ce projet de loi va dans le bon sens mais il ne faut toucher au texte constitutionnel que d'une main tremblante, en prenant évidemment en considération la volonté de la Convention citoyenne pour le climat, mais également l'avis des parlementaires, qui représentent l'ensemble de nos concitoyens.

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