Je salue tout d'abord la présence du président de la délégation aux outre-mer, même si le Gouvernement, par sa méthode, empêche nombre de mes collègues ultramarins d'être avec nous.
Je tiens à adresser mes pensées les plus sincères et solidaires à nos frères et sœurs ultramarins ainsi qu'à tous les professionnels de santé qui s'épuisent pour prendre soin des nôtres. Dans un éternel recommencement, nous nous retrouvons pour prolonger l'état d'urgence sanitaire dans notre territoire national, du moins ses parties ultramarines. Le texte concerne les territoires déjà soumis à ce régime, comme la Guadeloupe, la Guyane, la Martinique, la Polynésie, La Réunion, Saint-Barthélemy et Saint-Martin, mais il anticipe aussi la déclaration de l'état d'urgence sanitaire, jusqu'au 15 novembre, à Saint-Pierre-et-Miquelon, en Nouvelle-Calédonie, à Mayotte et à Wallis-et-Futuna.
L'État justifie cette décision par l'insuffisance de la couverture vaccinale dans ces territoires. À qui la faute ? C'est bien ce gouvernement et Emmanuel Macron, au premier chef, qui n'ont pas joué leur rôle. C'est bien à cause de la faillite de la politique sanitaire, du défaut de planification et de l'absence d'alternative au confinement que nous en sommes là aujourd'hui. Vous auriez pu nous écouter puisque, dès 2020, nous dénoncions, à l'issue de notre propre commission d'enquête sur la gestion de l'épidémie, le délabrement du système hospitalier, les conditions sanitaires et le manque de moyens humains. Les conditions de vie, dans ces territoires oubliés, sont terribles, ce qui emporte des conséquences pour la santé des habitants. Les comorbidités ne sont pas des fatalités. Faut-il rappeler que de nombreux habitants ne disposent pas de l'eau courante ? Comment, dans ces conditions, accomplir des gestes aussi fondamentaux que le lavage des mains ?
Le Gouvernement, au moins, aurait pu écouter le Conseil scientifique qui l'avait invité à déployer un effort significatif pour atteindre les personnes vivant en zone défavorisée. Il aurait pu adopter une approche locale en intégrant le milieu associatif. Les territoires ultramarins ont connu un pic épidémique auquel n'a pu faire face un système hospitalier sous-dimensionné. Faute de pouvoir prendre en charge l'afflux des patients en détresse, il a fallu faire un tri inhumain entre les patients. Un médecin, de retour des Antilles, en est venu à qualifier ce qu'il a vécu de maltraitance sanitaire. Quelle immoralité !
Devant une telle situation, comment refuser les envois de soignants et de matériels, même si cela s'apparente plus à une aumône nationale qu'à une véritable prise en main des problèmes de ces territoires oubliés et pauvres ?
En Guadeloupe et en Martinique, l'accès aux lits de soins critiques est désormais réservé aux patients de moins de 60 ans. Ce manque d'humanité témoigne de l'échec de la politique de vaccination qui n'a pas réussi à convaincre. Dès lors, le Gouvernement double cette inhumanité d'une restriction des libertés qui entrave les ultramarins jusque dans leur droit à mener une vie familiale normale. Une nouvelle fois, le Gouvernement s'en remet à la brutalité des méthodes moyenâgeuses. Nous avons subi une forme d'abandon. L'exécutif doit assumer ses responsabilités. Nous ne vivons pas en autoritarisme. Les territoires oubliés sont les plus touchés par l'épidémie et les faillites de votre politique sanitaire. La situation est aggravée en outre-mer par des maux structurels qui font de nombreuses victimes et auxquels vous ne voulez pas faire face : le chômage de masse, la pauvreté, le mal-logement, l'abandon de nos personnes âgées. C'est sur le terreau de cette détresse sociale que le variant delta fait des ravages. Les comorbidités ne tombent pas du ciel.
En proposant ce texte spécifique aux outre-mer, le Gouvernement reconnaît l'existence de difficultés particulières à ces territoires. Qu'attend-il pour lancer un plan dédié à ces problèmes graves qui rongent les outre-mer, garantir l'emploi contre le chômage, lutter contre la pauvreté et le mal-logement, soutenir nos personnes âgées ? Ces mesures ont été maintes fois réclamées. Il y a urgence.
Élu de la nation, je suis un ultramarin qui réside dans l'un de ces territoires oubliés. Je ne cesserai de le répéter : nous ne voulons pas de cette prorogation. Nous avons appelé à l'aide à de nombreuses reprises. Les outre-mer ont autant de droits que l'Hexagone !