La proposition de loi soumise à notre examen a pour objectif de permettre la réélection des juges consulaires dans les tribunaux de commerce en rectifiant une mesure de la loi PACTE. Elle fait suite à une mission d'information sur les outils juridiques de prévention et de traitement des difficultés des entreprises à l'aune de la crise de la covid-19.
Depuis 1961, les juges des tribunaux de commerce étaient élus par un collège électoral composé, d'une part, de délégués consulaires, eux-mêmes élus par les commerçants, d'autre part, de juges consulaires en exercice et d'anciens juges du tribunal concerné. Ce régime électoral à deux degrés ne donnait toutefois pas satisfaction. La participation à l'élection des délégués consulaires était faible, de même que celle de ceux-ci à l'élection des juges. Il apparaissait nécessaire de réformer ce mode d'élection pour simplifier et resserrer les liens entre les tribunaux et les entreprises. C'est pourquoi la loi PACTE de mai 2019 a prévu que les juges consulaires seraient élus par les membres de la chambre de commerce et d'industrie et de la chambre de métiers et de l'artisanat. L'institution des délégués consulaires a été supprimée, les juges consulaires en exercice et les anciens juges faisant néanmoins toujours partie du corps électoral.
Cependant, il a été omis dans la loi d'indiquer que les juges consulaires en exercice faisaient partie de la liste des personnes éligibles, ce qui imposerait de recruter un grand nombre de juges, entraînerait des conséquences dommageables et priverait les tribunaux d'un vivier considérable de candidats. Il s'agit en général des magistrats les plus expérimentés, parmi lesquels le président du tribunal est le plus souvent choisi. Ces juges de proximité sont des professionnels de grande qualité, qui, en se consacrant exclusivement à cette activité, acquièrent une réelle expertise, laquelle s'accroît avec l'ancienneté. Ils mettent leurs compétences au service des tribunaux de commerce pour juger leurs pairs en exerçant de façon bénévole. Les tribunaux ont besoin de cette expertise, qui est une spécificité française.
La proposition de loi comporte quatre articles. L'article 1er rétablit l'éligibilité aux fonctions de juge de tribunal de commerce des juges en exercice et des anciens membres des tribunaux de commerce. Un amendement du rapporteur du texte au Sénat est venu restaurer l'inéligibilité des personnes ayant subi certaines condamnations – agissements contraires à l'honneur, à la probité, aux bonnes mœurs – ou frappées d'une peine complémentaire d'interdiction professionnelle ou encore sanctionnées par une législation étrangère. Le rapporteur a en outre fait adopter trois nouveaux articles. L'article 2 limite à cinq le nombre de mandats, successifs ou non, exercés dans un même tribunal, conformément au souhait du législateur lors de l'adoption de la loi de modernisation de la justice du XXIe siècle et de celle de la loi PACTE. Il convient de tenir compte de la difficulté de recrutement des juges consulaires. L'article 3 précise les conditions pour qu'un ancien juge consulaire fasse partie du collège électoral : avoir exercé ses fonctions pendant au moins six ans, ne pas avoir été réputé démissionnaire, ne pas avoir été frappé d'inéligibilité. L'article 4 proroge le mandat des juges consulaires élus en 2016 jusqu'au 31 décembre 2021 afin de reporter au 1er janvier 2022 l'entrée en vigueur des dispositions de la loi PACTE et de permettre le maintien des règles actuelles pour les élections du 22 novembre au 5 décembre.
Par suite du « quoi qu'il en coûte » et en raison de la sortie de crise, qui pourrait entraîner des difficultés économiques pour certaines entreprises, les tribunaux de commerce risquent d'être très sollicités. Le rôle des juges consulaires va être déterminant pour accompagner les entreprises en difficulté et trouver les mesures adaptées aux différentes situations. Afin d'assurer le bon fonctionnement de la justice commerciale, le Sénat a déposé une proposition de loi, qu'il a complétée et adoptée. Nous vous proposons de l'adopter conforme de manière à permettre le bon déroulement des élections et la mise en place des tribunaux de commerce dès le début 2022.