Intervention de Mansour Kamardine

Réunion du mardi 12 octobre 2021 à 17h15
Commission des lois constitutionnelles, de la législation et de l'administration générale de la république

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaMansour Kamardine, rapporteur pour avis pour le programme « Sécurité civile » :

Les crédits demandés pour 2022 au titre du programme « Sécurité civile », d'un montant de 568,6 millions d'euros, sont en hausse de 9,6 % par rapport au précédent exercice. En tenant compte des perspectives d'inflation pour l'année prochaine de 1,5 %, le montant des crédits du programme augmente en réalité d'environ 8 %.

Au sein de ce programme, l'action 12 – Préparation et interventions spécialisées des moyens nationaux bénéficie de la dotation la plus importante, correspondant à 66,5 % des crédits du programme. Elle regroupe les moyens nationaux que l'État met à la disposition de la population, au quotidien ou lors de catastrophes naturelles ou technologiques. Cette dotation est en augmentation de plus de 10 %, principalement du fait du coût élevé de la dépense liée à la maintenance des aéronefs.

Si sur l'ensemble de la législature, les crédits de paiement consacrés au programme ont augmenté de 6,8 %, cette progression est beaucoup plus modeste en euros constants : une fois corrigée de l'inflation, elle n'est que de 1 % environ. C'est peu, notamment quand on sait qu'une part significative des crédits de paiement hors titre 2 – soit plus de 47,3 % – concerne la maintenance, l'équipement, la modernisation et le carburant des aéronefs, ainsi que l'acquisition de nouveaux avions et la location d'hélicoptères.

Les crédits du programme « Sécurité civile » représentent finalement une proportion faible, de l'ordre de 7 %, de l'ensemble des crédits consacrés à la sécurité civile dans notre pays, dont le montant s'élève à environ 6,5 milliards d'euros. L'État contribue au tiers de ce montant par l'intermédiaire des crédits inscrits dans plusieurs autres programmes du budget général et de la fiscalité transférée aux collectivités territoriales. Le reste est assumé par ces mêmes collectivités.

Pour vous donner un ordre d'idée, la sécurité civile coûte à chaque Français moins d'une centaine d'euros par an, pour un service indispensable et d'une grande qualité, assuré par des femmes et des hommes auxquels je souhaite rendre un hommage appuyé.

Ayant pour la première fois l'honneur d'être rapporteur pour avis du programme « Sécurité civile », j'ai choisi de m'intéresser à la préparation des pouvoirs publics et en particulier de la sécurité civile pour faire face aux risques naturels dans les territoires ultramarins.

Les territoires ultramarins sont exposés à de nombreux aléas, qui peuvent être telluriques – volcanisme, séismes, mouvements de terrain et tsunamis – ou climatiques – cyclones, inondations par submersion marine ou événements pluvieux extrêmes. Ces risques sont détaillés dans l'avis budgétaire : pour ne prendre qu'un seul exemple, la collectivité dont je suis originaire, Mayotte, connaît un épisode sismo-tellurique inédit dans son histoire contemporaine.

En mai 2019, un nouvel édifice volcanique actif à 3 300 mètres de profondeur a en effet été découvert, à seulement cinquante kilomètres au large des côtes de Petite-Terre : il s'agit à la fois de la plus importante éruption volcanique connue depuis 1783 et de la première éruption sous-marine au monde à pouvoir être observée.

La création de ce volcan s'est accompagnée de séismes très réguliers, voire quotidiens, entre mai et juin 2018, qui ont été ressentis par les habitants et ont suscité une légitime inquiétude, d'autant que la population mahoraise est particulièrement fragile pour faire face à ces risques. Selon les données communiquées par la préfecture de Mayotte, 92 % de la population est concernée par un aléa, tous niveaux confondus, et près de la moitié de la population par un aléa fort.

En outre, la grande variété des phénomènes naturels se conjugue avec une très forte densité de population marquée par la pauvreté, 77 % de la population vivant sous le seuil de pauvreté.

Pour faire face à ces risques, l'État a notamment établi des plans de prévention des risques naturels, déclinés dans les territoires ultramarins en fonction de leurs spécificités, ainsi qu'une réglementation particulière en matière de construction et d'urbanisme.

Malgré cela, les auditions menées dans le cadre de la préparation de cet avis budgétaire ont permis de soulever plusieurs difficultés concernant la sécurité civile dans ces collectivités.

Tout d'abord, les infrastructures dont sont dotés les territoires ultramarins ne paraissent pas suffisamment résilientes en cas de survenance d'un événement climatique majeur. À Mayotte, l'aéroport et certains axes routiers, déjà saturés en temps normal, deviendraient tout à fait inutilisables, et l'accès à l'eau potable serait brutalement rompu dans l'ensemble du département. D'après les responsables du service départemental d'incendie et de secours (SDIS) de Mayotte, que j'ai auditionnés, les communications seraient difficiles, voire impossibles. Monsieur le ministre, l'État va-t-il mobiliser des moyens pour renforcer la résilience de nos infrastructures et inciter les collectivités à déployer un dispositif de communication satellitaire, certes coûteux mais nécessaire ?

En outre, certains territoires ultramarins, heureusement protégés depuis longtemps contre une catastrophe climatique, n'ont cependant pas une culture du risque suffisante pour faire face à un événement extrême. Tel n'est pas le cas aux Antilles, où une initiative intéressante, la « journée japonaise », permet à l'ensemble de la société de consacrer un jour par an à des exercices de prévention des risques telluriques, sous l'égide de la préfecture. Il ressort des auditions que j'ai menées que de telles initiatives devraient être généralisées, les exercices actuellement prévus demeurant insuffisants dans certains territoires. Ce type de mesure retient-il votre attention, monsieur le ministre ? Le cas échéant, quel rôle les préfectures et la direction générale de la sécurité civile et de la gestion des crises pourraient-elles jouer dans cette généralisation de la culture du risque ?

Par ailleurs, les territoires ultramarins sont confrontés à un phénomène d'usure accélérée des véhicules. Par exemple, un véhicule qui pourrait être utilisé pendant vingt ans en métropole ne peut l'être que pendant douze ans à Mayotte. L'allocation de moyens supplémentaires pourrait-elle être envisagée afin de soutenir les collectivités dans leur effort d'investissement ?

Enfin, je sais qu'une réflexion est en cours concernant les moyens de la sécurité civile outre-mer, la crise sanitaire ayant montré les limites de ses moyens et la nécessité d'envoyer des renforts dans certaines collectivités. Pour ne parler que des effectifs, selon le directeur du SDIS de Mayotte, il faudrait plusieurs dizaines de sapeurs-pompiers supplémentaires pour répondre aux demandes d'intervention en augmentation constante. Pourriez-vous nous indiquer le calendrier de cette consultation ainsi que ses premières conclusions ?

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