Je suis très heureux et fier de vous présenter les crédits de la mission « Justice » inscrits dans le projet de loi de finances (PLF) pour 2022. Et c'est sincère : l'ancien avocat que je suis, qui a vu des années durant l'institution judiciaire sombrer dans la paupérisation, sait que ce projet de budget est une réponse forte aux attentes de la communauté judiciaire et des Français.
Après une augmentation de 8 % en 2021, le ministère bénéficiera à nouveau de 8 % de hausse en 2022. C'est un doublé historique. Ce sont ainsi 660 millions d'euros supplémentaires qui viendront abonder en 2022 le service public de la justice.
Grâce à l'appui du Premier ministre et à l'écoute attentive du ministre délégué chargé des comptes publics, les crédits de la justice auront augmenté de 1,3 milliard en deux ans. Sur la législature, la hausse dépasse les 30 %. C'est un effort en crédits mais également en emplois : le taux de vacance des magistrats, qui était de 6 % en 2017, tombera en dessous de 1 % en 2022, un taux résiduel, et nous sommes passés de 9 332 greffiers début 2018 à 10 172 au 1er octobre 2021. C'est un effort sans précédent.
L'année dernière, j'indiquais qu'il s'agissait de la plus forte progression depuis au moins un quart de siècle. Certains ici me l'avaient même reproché, utilisant des termes comme « éphémère » ou « insuffisant ». Vous avez désormais la preuve que la volonté du Gouvernement est sans faille. Nous avons tout fait pour donner à l'institution les moyens, non seulement de sortir du dénuement, mais, plus encore, d'envisager résolument la justice du XXIe siècle. Je peux vous le dire sans baisser les yeux, la justice a désormais les moyens de travailler.
La justice s'incarnant d'abord à travers des hommes et des femmes, 7 400 emplois ont été créés en cinq ans, ce qui porte le nombre total de personnels du ministère à plus de 90 000. C'est du jamais-vu. Ces douze derniers mois, la Chancellerie a procédé à une campagne inégalée, en recrutant 3 450 personnes. En 2022, 720 personnels supplémentaires arriveront dans les centres pénitentiaires, les juridictions et les structures de la protection judiciaire de la jeunesse.
Près de 9 milliards d'euros sont budgétés pour la justice en 2022, soit un demi-milliard de plus que prévu par la loi de programmation et de réforme pour la justice de 2019. Ce budget permet donc de financer non seulement les mesures déjà prévues, mais également les nouvelles priorités, parmi lesquelles la justice de proximité ou encore les mesures présentées dans le cadre du projet de loi pour la confiance dans l'institution judiciaire.
En 2022, nous conforterons et nous amplifierons d'abord les projets lancés en 2021. Nous allons pérenniser et consolider la justice de proximité, à laquelle 252 millions seront consacrés, soit 50 millions de plus qu'en 2021. Pour une justice plus proche du justiciable et plus réactive, nous avons procédé au recrutement permettant de pourvoir 2 100 emplois publics nets en douze mois seulement. Six cents juristes assistants et assistants spécialisés supplémentaires viendront ainsi, avec plus de 1 000 délégués du procureur, former une équipe autour du magistrat ; c'était un souhait que nous nous donnons les moyens de réaliser. Près de 1 200 renforts sont arrivés dans les juridictions pour soulager les greffiers, maillons absolument essentiels de la chaîne judiciaire. Des centaines de magistrats honoraires et de magistrats à titre temporaire peuvent désormais faire jusqu'à trois cents vacations par an. Leur concours est fondamental.
La justice de proximité, c'est aussi des moyens de fonctionnement, des frais de justice pour mener des enquêtes ou ordonner des expertises. Ces crédits budgétaires sont en hausse de 158 millions d'euros en deux ans, soit plus 32 %. Pour revaloriser les délégués du procureur et doubler les moyens alloués aux vacations, l'effort de 28 millions consenti en 2021 sera reconduit. Nous venons de revaloriser la tarification des expertises psychiatriques et psychologiques et nous prenons en charge les cotisations sociales, ce qui représente un effort budgétaire d'environ 20 millions. Nous sommes en train de renforcer les structures médico-judiciaires, en mettant 20 millions sur la table, et nous allons procéder très prochainement à la revalorisation des enquêtes sociales rapides, soit près de 10 millions d'euros d'investissement pour une justice plus rapide et de meilleure qualité.
Nous menons ces chantiers en coopération avec chacune des professions qui concourent à l'œuvre de justice. Je les remercie pour leur esprit constructif. Cet effort budgétaire est aussi un hommage rendu à leur action essentielle.
La justice de proximité passe également par l'accès au droit et l'aide juridictionnelle. En deux ans, 150 millions de crédits supplémentaires auront ainsi été déployés en la matière, dont 95 millions pour la seule année 2022.
Les crédits consacrés à l'aide juridictionnelle augmentent de 15 %. J'avais annoncé il y a un an une hausse qui était une première marche, je vous annonce aujourd'hui la deuxième – et non la seconde, car je compte bien qu'il y en ait d'autres à l'avenir – toujours avec le concours de la profession d'avocat, avec qui nous devons continuer de dialoguer et de réformer.
Nous l'avions dit, nous le faisons. C'était un engagement, nous le tenons.
L'accès au droit passe par l'aide aux victimes. Nous ne les oublions pas, avec 8 millions d'euros de crédits supplémentaires, soit une hausse de 25 % en un an. Un minimum de 3 000 téléphones grave danger (TGD) seront notamment déployés en 2022.
L'accès au droit, c'est encore les 2 000 points-justice répartis sur tout le territoire, les audiences foraines qui se multiplient, les 10 000 réponses pénales hors les murs chaque mois et le recours à la médiation qui se développe. C'est là cette justice humaine à laquelle je suis particulièrement attaché.
L'année 2022 sera une année de nouvelles impulsions et de nouvelles ambitions.
Nouvelles impulsions tout d'abord avec l'accélération du programme de construction de 15 000 places de prison voulu par le Président de la République, qui portera à 75 000 le nombre total de places disponibles en 2027.
La mise en chantier des 7 000 premières places est lancée. En 2022, elles seront livrées ou à un stade très avancé de construction. Quatorze opérations sont en chantier dans toute la France, à Caen, au Mans ou en Avignon. Le deuxième volet, de 8 000 places, est lui aussi résolument engagé : seize opérations pénitentiaires sont désormais identifiées, sur des sites précis, et les concertations locales et les études sont lancées. En 2022, plus de 400 millions seront budgétés pour la réalisation du programme « 15 000 » et 636 millions iront à l'immobilier pénitentiaire, soit une hausse de 62 % en deux ans.
Nouvelles ambitions ensuite, avec 100 millions d'euros consacrés à un grand plan d'investissement pénitentiaire pour la sécurisation des établissements, la numérisation de leur fonctionnement et les conditions de détention. Cela représente 45 millions pour la sécurisation « 360 » des établissements, 20 millions pour le déploiement du système d'alerte géolocalisé SAGEO, et 35 millions pour simplifier le suivi de la détention, favoriser la réinsertion des détenus et développer le travail en détention. Nous financerons ainsi le statut du détenu travailleur, pour attirer à nouveau les entreprises dans les prisons.
Nouvelles impulsions encore pour la transformation numérique du ministère, avec 205 millions d'euros d'investissements informatiques, soit 69 millions de plus en deux ans. Ils permettront de faire aboutir le chantier majeur de la procédure pénale numérique (PPN), qui fera entrer la justice dans le XXIe siècle – les services de la PPN seront disponibles dans toutes les juridictions de France d'ici à décembre 2023, et cinquante-deux le seront dès le début de l'année prochaine – et d'autres projets essentiels comme la télé-audience, qui se verra affecter 8 millions pour des investissements, ou encore la plate-forme TIG 360° pour les travaux d'intérêt général.
Le budget pour 2022 n'oublie pas non plus les agents du ministère : 65 millions d'euros sont fléchés pour reconnaître leur engagement et améliorer leur protection sociale.
Enfin, la justice se montre également dans la pierre de ses tribunaux : 239 millions d'euros sont prévus pour la programmation immobilière judiciaire. Il faut rénover les palais de justice les plus vétustes, comme cela a été fait à Aix-en-Provence et à Mont-de-Marsan, et comme cela le sera prochainement à Perpignan ou à Bobigny.
Voici en quelques mots la présentation du budget que je soumets à votre commission. Je suis naturellement à votre disposition pour répondre à toutes les questions que vous voudrez bien me poser.