Intervention de Jean-Hugues Ratenon

Réunion du vendredi 15 octobre 2021 à 9h35
Commission des lois constitutionnelles, de la législation et de l'administration générale de la république

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaJean-Hugues Ratenon :

Le projet de loi que nous examinons vise à prolonger le régime d'exception jusqu'en juillet 2022. Ce texte, dites-vous, ne prévoit pas l'état d'urgence éternel. Certes, il retarde simplement son extinction, mais la nuance est mince, et nous ne sommes pas dupes.

Nous sommes pour la vaccination, mais contre l'obligation vaccinale, et nous réaffirmons que le passe sanitaire est une menace pour les libertés publiques : il donne l'illusion d'une protection sur le plan sanitaire, mais il n'est rien d'autre qu'une mesure autoritaire. Il instaure une société du contrôle permanent – sur ce point, j'en suis persuadé, vous êtes d'accord avec moi, monsieur le ministre.

De surcroît, la gestion de la crise a été chaotique. L'exécutif a ignoré toutes nos propositions et a perdu la confiance de la population, en mentant sur les masques et sur les tests, et en prenant des décisions absurdes : le passe sanitaire est requis dans le TGV mais pas dans le RER ou le métro ; il est exigé pour déjeuner dans un restaurant mais pas dans une cantine d'entreprise. Et que dire de vos contradictions ? vous faites mine de défendre le vaccin, mais vous refusez l'accès universel à celui-ci en vous opposant à la levée des brevets.

L'Organisation mondiale de la santé estime, à propos de la vaccination, qu'il faut convaincre plutôt que contraindre. Du reste, Macron lui-même a déclaré, le 27 décembre 2020 : « Je l'ai dit et je le répète, le vaccin ne sera pas obligatoire. » Et, dans une interview, il ajoutait : « Le passe sanitaire ne sera jamais un droit d'accès pour différencier les Français. Il ne saurait être obligatoire pour accéder aux lieux de la vie de tous les jours, comme les restaurants, théâtres et cinémas. »

Vous-même, monsieur le ministre, avez déclaré, lors des débats parlementaires sur la loi du 31 mai 2021 : « Ce dispositif ne sera pas étendu aux activités du quotidien. » Pis encore, lors des questions au Gouvernement du mardi 7 septembre, vous avez répondu à Justine Benin, qui vous demandait comment le Gouvernement prévoyait d'adapter le déploiement du passe sanitaire dans les outre-mer : « Nous avons décidé de ne pas appliquer le passe sanitaire dans les territoires ultramarins, pour des raisons que chacun peut comprendre. » Or, au moment même où vous teniez ces propos dans l'Hémicycle, il s'appliquait déjà en outre-mer, notamment à La Réunion, dont le préfet vous a d'ailleurs contredit publiquement. Je vous ai adressé un courrier dans lequel je vous demandais de confirmer vos propos par écrit ; j'attends toujours la réponse…

Désormais, les Français et Françaises doivent débourser 44 euros pour effectuer un test PCR et 22 à 30 euros pour un test antigénique en pharmacie. Je rappelle que, sur votre proposition, à La Réunion, où le taux de pauvreté est pourtant très élevé, ces tests coûtent plus cher. Or, vous le savez, les personnes les plus précaires sont aussi celles qui sont le plus éloignées du système de santé ; elles sont donc les premières concernées par cette mesure inepte.

Quant à nos compatriotes de Guadeloupe, ils ont été à court de masques, de gants, de médicaments et de respirateurs, le stock d'oxygène médical était limité et le nombre de lits insuffisant. A l'hôpital de Pointe-à-Pitre, par exemple, on ne dénombrait, au mois de septembre, que deux infirmiers pour 100 patients !

Comment les populations peuvent-elles vous croire, quand le Président de la République et vous-même mentez ?

Depuis mars 2020, nous vous faisons des propositions. Nous avons ainsi évoqué la société du roulement, qui consiste à organiser l'utilisation en rotation de tous les équipements pour rendre la vie sociale possible en période de pandémie. Cela implique de définir des jauges par établissement, de renforcer les gestes barrières, d'installer des purificateurs d'air…

En bref, ce texte n'a plus lieu d'être. Il est liberticide et crée une société anxiogène. Néanmoins, nous défendrons un certain nombre d'amendements pour tenter de l'améliorer. J'espère, monsieur le ministre, que vous ne les repousserez pas en faisant montre de votre sectarisme habituel.

Aucun commentaire n'a encore été formulé sur cette intervention.

Cette législature étant désormais achevée, les commentaires sont désactivés.
Vous pouvez commenter les travaux des nouveaux députés sur le NosDéputés.fr de la législature en cours.