Ce dernier projet de loi de finances de la législature est l'occasion, au-delà la traditionnelle présentation des crédits, de dresser un bilan des actions conduites depuis quatre ans avec le soutien de la majorité en matière de fonction publique, mais aussi de tracer des perspectives quant aux principaux chantiers que j'entends mener dans les prochains mois.
Nous avons menée au cours de ce quinquennat une profonde transformation de la fonction publique, grâce à la loi du 6 août 2019 de transformation de la fonction publique, que vous connaissez bien, madame la rapporteure, qui a jeté les bases d'une fonction publique adaptée aux exigences de notre temps alors que retentit de toutes parts une rengaine sur la baisse du nombre de fonctionnaires.
Je tiens à rappeler ici l'ambition qui est, depuis 2017, celle du Gouvernement et de la majorité, sous l'autorité du Président de la République.
La fonction publique est l'armature de notre société ; la pseudo-vision d'une « administration administrante » n'existe pas. Certes, notre fonction publique doit être modernisée, nos services publics doivent évidemment s'améliorer – et c'est toute notre entreprise depuis 2017, en concertation d'ailleurs avec les premiers intéressés que sont les agents publics. Cela étant, nos agents publics ne doivent pas faire l'objet de jeux politiciens visant à donner une prime à celui qui supprimerait le plus d'emplois. La seule réflexion qui vaille porte sur l'efficacité de nos services publics pour répondre aux besoins et aux attentes des Français.
Sur le fondement de la loi de transformation de la fonction publique, nous nous sommes d'abord employés à améliorer l'égalité des chances dans l'accès à l'emploi public. C'est sur la base d'une habilitation octroyée par le Parlement que nous avons pu renforcer les classes prépas Talents, désormais au nombre de 74, sur l'ensemble du territoire. Nous y formons des administrateurs territoriaux, des futurs commissaires de police, des futurs directeurs d'hôpitaux. Nous avons créé une voie dédiée à six concours de la fonction publique.
Nous avons également engagé la plus forte refondation de notre haute fonction publique depuis 1945. Transformer la France c'est transformer l'État, et transformer l'État c'est transformer sa haute fonction publique. Ainsi, nous tenons l'engagement pris par Emmanuel Macron en 2017.
Cette réforme permettra à l'État d'être doté d'une haute fonction publique adaptée aux enjeux du XXIe siècle, avec des hauts fonctionnaires mieux outillés pour appréhender les enjeux de notre époque, de la transition écologique, des enjeux du numérique ou ceux des valeurs de la République, en passant par la lutte contre les inégalités. Ces sujets sont au cœur du tronc commun du futur Institut national du service public (INSP).
C'est aussi une haute fonction publique adaptée aux enjeux de notre siècle, dotée de hauts fonctionnaires plus mobiles, qui bénéficient d'un accompagnement renforcé tout au long de leur carrière, qui ne sont pas enfermés dans des logiques de corps ou dans des logiques de silo. C'est ce à quoi nous nous employons grâce à cette réforme majeure qui redonnera, dans les carrières à venir, toute leur place aux postes opérationnels et aux postes à proximité des Français.
Le deuxième effort que nous avons mené avec constance depuis 2017 a concerné les agents publics qui en ont le plus besoin ; sur le sujet des rémunérations, nous avons fait le choix d'une politique salariale cohérente. Nous n'avons eu de cesse de préserver le pouvoir d'achat des agents publics, en prenant des mesures fortes et ciblées plutôt que des mesures générales.
Nous avons, en premier lieu, poursuivi, pour un coût annuel de 4 milliards d'euros, la mise en œuvre du protocole relatif aux parcours professionnels, carrières et rémunérations qui avait été négocié par la précédente majorité.
Le Gouvernement a également engagé des mesures de revalorisation inédites pour certaines professions qui avaient été délaissées par les majorités précédentes. Je pense aux soignants, aux enseignants en début de carrière, aux enseignants-chercheurs et aux métiers régaliens, notamment ceux des forces de l'ordre et de la justice.
Le « Ségur de la santé » est sans précédent par son ampleur et son champ pour reconnaître l'engagement des professionnels au service de la santé des Français. Son volet « ressources humaines » représente un engagement inédit et massif de 8 milliards d'euros afin de revaloriser les métiers des secteurs sanitaire et médico-social, au-delà du seul versant hospitalier puisque de très nombreuses mesures s'appliquent également à l'État et à la fonction publique territoriale.
Le Gouvernement a fait le choix de développer la protection sociale complémentaire des agents publics, en prenant en charge, dès le 1er janvier 2022, quinze euros, par mois et par agent de l'État, en faveur d'une mutuelle santé. D'ici à 2026, la moitié du coût de la mutuelle santé complémentaire santé sera prise en charge pour l'ensemble des agents de la fonction publique des trois versants. Nous remédions ainsi à une inégalité massive entre le secteur privé et le secteur public, et je compte conclure d'ici à la fin de l'année un accord majoritaire avec les organisations syndicales pour aboutir à une couverture santé optimale pour les agents de l'État.
Ce projet de loi de finances permet, en outre, de financer des mesures concrètes qui répondent à trois priorités que j'avais identifiées dès les discussions que j'ai eues avec les organisations syndicales : les bas salaires, l'équité, notamment l'équité et l'égalité entre les hommes et les femmes, et le développement des perspectives de carrière.
Nous avons pris trois mesures fortes pour les 1,2 million d'agents publics de catégorie C des trois versants de la fonction publique : nous avons relevé, au 1er octobre 2021, l'indice minimum de traitement au-dessus du SMIC, mesure qui n'avait pas été prise depuis 2013. Pour tenir compte de ce relèvement, nous avons décidé d'accélérer les passages d'échelon ; nous avons aussi décidé d'attribuer une bonification d'ancienneté à tous ces agents.
Dans le cadre de ce budget, nous avons également prévu les financements pour que plus de 10 000 agents publics de l'État supplémentaires de catégorie B et C bénéficient d'une promotion de grade en 2022, et consenti un effort inédit de 130 millions d'euros pour réduite les écarts salariaux entre les ministères, mettre fin à des situations injustes et favoriser les mobilités. Je pense en particulier aux iniquités qui subsistent dans les filières administrative et sociale, qui sont très féminisées.
J'ai souhaité proposer aux partenaires sociaux de réfléchir ensemble à l'évolution de la politique salariale. La conférence sur les perspectives salariales, que j'ai ouverte en juillet dernier et qui se poursuivra jusqu'au premier semestre 2022, sous le regard de deux garants, Paul Peny et Jean-Dominique Simonpoli, nous servira de base pour continuer à transformer notre fonction publique et à la rendre plus attractive.
Au-delà des sujets salariaux, il me semble important de partager avec vous l'immense responsabilité que nous avons de tirer, dans l'organisation du travail, les conséquences de la crise sanitaire du point de vue des pratiques, et de manifester les remerciements et la reconnaissance que nous devons aux hommes et aux femmes qui ont permis au pays de tenir, à la vaccination d'être menée avec succès, au système de santé de résister à cette situation évidemment inédite et très difficile.
Nous tirons la leçon du télétravail, qui s'est largement imposé à un grand nombre d'agents publics. Ce contexte inédit nous permet d'en faire un levier de transformation durable de nos organisations de travail afin de faire évoluer les pratiques managériales au sein de la fonction publique. Nous devons donc capitaliser sur cette expérience, qui a été incontestablement éprouvante mais qui a aussi été source de riches enseignements, pour penser le télétravail de demain dans nos administrations, en développant une relation de confiance entre les managers et les agents.
En juillet dernier, j'ai conclu un accord-cadre inédit, unanimement signé par les organisations syndicales et les employeurs des trois versants de la fonction publique, sur le fondement de l'ordonnance relative à la négociation collective qui était le fruit d'un accord majoritaire signé quelques mois auparavant.
Cet accord ambitieux et unanime, fruit d'un dialogue social soutenu, constitue désormais le socle commun en matière de télétravail pour toutes les administrations publiques qui devront engager des négociations avant le 31 décembre pour le décliner. Il comporte des avancées majeures pour les trois versants de la fonction publique. Il consacre un véritable droit à la déconnexion, la possibilité pour les femmes enceintes et les proches aidants, par exemple, de télétravailler plus de trois jours par semaine, et instaure une indemnité forfaitaire. La fonction publique est en avance : elle fixe un cadre et elle donne une vision claire de ce qu'est le progrès social au XXIe siècle.
Je reviens sur ce programme 148, sur lequel porte votre avis, madame la rapporteure. Il met en cohérence les moyens au service de notre fonction publique au sein d'une mission « Transformation et fonction publiques » consolidée depuis le projet de loi finances pour 2021.
En 2022, le programme 148 est doté de 288 millions d'euros de crédits de paiement (CP) et de 297 millions d'euros d'autorisations d'engagement (AE). Les crédits dédiés à la formation des fonctionnaires progressent de 6 millions d'euros, notamment pour assurer la montée en charge des bourses Talents des 74 classes que j'évoquais. Ces crédits permettent l'obtention d'une bourse complémentaire de 4 000 euros par étudiant.
Le budget alloué à l'action sociale augmente de 16 millions d'euros. Cinq millions d'euros financeront la revalorisation de l'aide à l'installation des personnels de l'État, permettant ainsi d'accompagner les mobilités et de répondre au déficit d'attractivité territoriale de certains secteurs et ministères. Cette enveloppe permet également une montée en puissance de la remise aux normes des restaurants interadministratifs, sujet essentiel de la qualité de vie quotidienne au travail.
Le programme 148 se caractérise également par l'intégration du programme « Fonds d'accompagnement interministériel RH (FAIRH) », à la suite des recommandations des rapporteurs spéciaux. Nous avons désormais un programme plus cohérent et plus lisible.
Vous l'aurez compris, ce projet de loi de finances concrétise des engagements significatifs pour une fonction publique plus juste pour l'ensemble de ses agents et plus efficace pour l'ensemble de nos concitoyens. Tels sont les deux objectifs que je poursuis concomitamment.
Les Français savent, en effet, ce qu'ils doivent à leurs agents publics après plus d'un an de crise sanitaire et, au-delà des enjeux budgétaires dont nous discutons aujourd'hui, je tiens à rappeler, en tant que ministre de la transformation de la fonction publiques, que mon rôle est de m'assurer que la fonction publique et, à travers elle, les femmes et les hommes qui la composent, dispose des moyens effectifs pour remplir le plus efficacement possible la mission d'intérêt général qui est la sienne. C'est ce à quoi nous nous employons pour nos agents publics et nos concitoyens depuis le début du quinquennat. Soyez assurés que l'ambition ne faiblira pas.