Les autorisations d'engagement de la mission s'élèvent à 2,6 milliards d'euros, soit une baisse de 1,96 % par rapport à l'exercice précédent. Les crédits de paiement, en revanche, progressent légèrement, s'établissant à 2,47 milliards d'euros, soit une hausse de 1,3 %. Toutefois, ces chiffres masquent une évolution contrastée des deux programmes de la mission.
Le programme 138 comprend les crédits de soutien aux entreprises ultramarines, d'aide à l'insertion professionnelle – en particulier à travers le SMA – et de financement de l'économie. Il voit ses autorisations d'engagement et crédits de paiement reculer de 3,9 %, malgré le renforcement des moyens du SMA. Une partie de cette baisse est liée aux incertitudes du contexte sanitaire et économique, le recours au dispositif d'activité partielle par les entreprises entraînant une diminution du montant des exonérations à compenser.
Le programme 123 voit ses autorisations d'engagement augmenter de 2,1 % et ses crédits de paiement de 14,6 %. Ce programme comporte notamment les crédits affectés aux contrats de convergence et de transformation signés entre l'État et chacun des DROM, ainsi qu'avec Saint-Pierre-et-Miquelon, Wallis-et-Futuna et Saint-Martin. Toutefois, les crédits consommés sont encore bien en deçà des montants contractualisés. Monsieur le ministre, quelles sont les perspectives d'exécution pour les années à venir ? L'ensemble des montants contractualisés pourra-t-il être consommé ?
Je note la baisse des autorisations d'engagement pour trois actions : l'action 03 Continuité territoriale, l'action 06 Collectivités territoriales et l'action 09 Appui à l'accès aux financements bancaires .
Sur l'ensemble du quinquennat, les crédits de la mission « Outre-mer », demandés comme votés, sont restés plutôt stables. Je formulerai toutefois deux remarques.
D'une part, l'exécution pourrait être affectée si la crise sanitaire et ses conséquences économiques se prolongent. Je pense notamment aux crédits de soutien aux entreprises, aux CCT et au FEI ainsi qu'au logement – je reviendrai plus tard aux difficultés d'exécution posées par cette action.
D'autre part, la solidarité doit jouer non pas entre les territoires d'outre-mer, mais bien envers l'ensemble des outre-mer, qui souffrent toujours de difficultés structurelles.
J'en viens maintenant au thème que j'ai choisi pour ce dernier budget du quinquennat : le financement du logement en outre-mer par la ligne budgétaire unique, c'est-à-dire les crédits de l'action 01 du programme 123.
Ne nous y trompons pas, les besoins en logement en outre-mer restent très élevés, en raison de la pression démographique, du vieillissement du parc social et du niveau de vie de la population. Pourtant, les chiffres transmis par la direction générale des outre-mer (DGOM) montrent une baisse importante du nombre de logements financés et livrés entre 2013 et aujourd'hui. Par ailleurs, l'évolution globale des crédits de la LBU depuis une décennie est marquée par deux caractéristiques : d'une part, une baisse de la dotation, et, d'autre part, une dégradation de l'exécution. Ces tendances reflètent les fortes difficultés d'exécution depuis plusieurs années. Je me félicite qu'une dynamique positive semble enclenchée depuis 2020, même si je déplore que le redressement de l'exécution intervienne alors que les niveaux de la LBU sont au plus bas. Monsieur le ministre, quelles réponses pouvez-vous apporter pour que le nombre de logements financés et livrés soit enfin à la hauteur des besoins ?
Dans le cadre de mes travaux, j'ai tenu à auditionner le plus grand nombre possible d'acteurs de la politique du logement dans les outre-mer. Un constat est clairement ressorti : les difficultés d'exécution de la LBU constatées ces dernières années tiennent non pas à une cause unique mais à une pluralité de facteurs qui sont le reflet des principaux dysfonctionnements, bien connus, de la politique du logement dans les outre-mer. Je n'en citerai que quelques-uns.
D'abord, vous connaissez la formule « no parking, no business ». Outre-mer, le problème du logement se pose plutôt en ces termes : « pas de foncier aménagé, pas de logement ». Cette formule reflète la réalité des territoires ultramarins, où le foncier aménagé est rare et cher. Par ailleurs, le coût plus élevé des matériaux dans nos territoires se répercute sur le coût global des opérations. Des complexités administratives dues à la durée de montage des dossiers sont aussi apparues. Les paramètres de financement de la LBU sont également perfectibles, notamment pour prendre en compte les besoins quantitatifs et qualitatifs des ménages concernés – notamment la demande d'appartements T2 et l'adaptation du parc au vieillissement de la population.
En matière de logement outre-mer, je suis bien conscient qu'il n'existe pas de solution unique. La délégation aux outre-mer du Sénat a publié cet été un excellent rapport dont les nombreuses propositions, auxquelles je souscris globalement, correspondent à celles qui m'ont été soumises lors des auditions. Je vous en soumets cinq qui me semblent les plus fortes : mobiliser le fonds pour le recyclage des friches et renforcer les fonds régionaux d'aménagement foncier et urbain (FRAFU) en faveur du foncier ; adapter les normes et matériaux au contexte local – les normes coûtent cher ; quant aux matériaux, il faut privilégier un approvisionnement de proximité et non provenant d'Europe ; donner une meilleure prévisibilité aux acteurs par le vote d'une loi de programmation pluriannuelle du logement social dans les DROM ; enfin, suivre les dossiers une fois qu'ils ont été validés pour s'assurer de leur avancée et de leur capacité à mobiliser effectivement les fonds LBU qui leur ont été accordés.