Intervention de Alexandra Louis

Réunion du mercredi 10 novembre 2021 à 10h50
Commission des lois constitutionnelles, de la législation et de l'administration générale de la république

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaAlexandra Louis :

On a rarement l'occasion de parler ici du Conseil de l'Europe. Sylvain Waserman démontre la vitalité de cette belle institution, puisqu'il a publié un rapport pour l'APCE, dans le cadre de la commission des questions juridiques et des droits de l'homme – où j'ai l'honneur de siéger – sur les lanceurs d'alerte, dont il s'est inspiré pour rédiger ces propositions de loi. Nous l'avons rappelé avec force à l'APCE, les lanceurs d'alerte jouent un rôle essentiel dans toute démocratie ouverte et transparente.

La proposition de loi organique vise à renforcer le rôle du Défenseur des droits : il est logique que cette institution essentielle pour la protection des libertés devienne la boussole des personnes qui souhaitent effectuer un signalement.

Comme l'a rappelé Virginie Rozière, rapporteure de la directive de 2019, il convient de ne pas se limiter au texte et d'aller au-delà d'une simple retranscription. Ainsi, la proposition de loi prévoit une protection juridique accrue du lanceur d'alerte, une meilleure définition des canaux de signalement et un renforcement des sanctions contre les représailles.

La proposition de loi contient des avancées majeures. Le critère de désintéressement, source de nombreuses ambiguïtés, a fait l'objet de discussions lors des auditions : des universitaires le jugeaient trop vaste, tandis que des chefs d'entreprise plaidaient pour son maintien. Le choix du rapporteur – supprimer cette notion tout en écartant les contreparties directes – paraît le plus judicieux.

La protection des personnes physiques et morales en lien avec le lanceur d'alerte est une avancée considérable car les auteurs de signalement sont souvent accompagnés dans leurs démarches par des collègues, des associations ou des syndicats. Or ces facilitateurs peuvent aussi faire l'objet de représailles, comme les organisations non gouvernementales (ONG) Anticor, Sherpa, Greenpeace ont pu en témoigner lors de leur audition.

La procédure de signalement issue de la loi Sapin 2 était divisée en trois étapes : l'alerte interne, l'alerte externe et la divulgation publique. Ce dispositif était trop complexe, voire décourageant pour le citoyen. Le texte prévoit de supprimer l'obligation d'alerter en interne et précise les possibilités de divulgation publique. Le lanceur d'alerte pourra directement effectuer son signalement auprès de l'autorité compétente, ou du Défenseur des droits, dont le rôle a été renforcé. Le choix d'une définition plus ouverte et accessible a été salué lors des auditions. Par ailleurs, ce schéma incitera les organisations à élever le niveau de leurs procédures internes, afin que les lanceurs d'alerte privilégient d'eux-mêmes ce canal.

La meilleure protection des lanceurs d'alertes contre les représailles est un autre apport majeur de la proposition de loi : en matière pénale, le lanceur d'alerte disposera d'une protection pour l'ensemble des poursuites dont il peut faire l'objet, y compris celles pour vol d'information ; sur le plan civil, sa responsabilité civile ne pourra être engagée dès lors que le signalement était nécessaire à la sauvegarde des intérêts de la personne mise en cause. Par ailleurs, le juge pourra allouer, à bref délai, une provision pour frais d'instance au lanceur d'alerte faisant l'objet d'une procédure bâillon ou qui conteste une mesure de représailles. L'idée d'une intervention du Défenseur des droits ou d'un juge avec référé a été saluée.

Enfin, les autorités externes devront mettre en place des mesures de soutien psychologique. C'est un droit nouveau et important tant est grand l'engagement personnel des lanceurs d'alerte.

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