Nous demandons la suppression de l'article unique, car nous sommes opposés à ce texte.
Permettez-moi de vous lire un extrait de la décision du Conseil constitutionnel du 18 juin 2020, relative à la loi visant à lutter contre les contenus haineux sur internet :
« La diffusion d'images pornographiques représentant des mineurs, d'une part, et la provocation à des actes de terrorisme ou l'apologie de tels actes, d'autre part, constituent des abus de la liberté d'expression et de communication qui portent gravement atteinte à l'ordre public et aux droits des tiers. En imposant aux éditeurs et hébergeurs de retirer, à la demande de l'administration, les contenus que cette dernière estime contraires aux articles 227-23 et 421-2-5 du code pénal, le législateur a entendu faire cesser de tels abus.
Toutefois, d'une part, la détermination du caractère illicite des contenus en cause ne repose pas sur leur caractère manifeste. Elle est soumise à la seule appréciation de l'administration. D'autre part, l'engagement d'un recours contre la demande de retrait n'est pas suspensif et le délai d'une heure laissé à l'éditeur ou l'hébergeur pour retirer ou rendre inaccessible le contenu visé ne lui permet pas d'obtenir une décision du juge avant d'être contraint de le retirer. Enfin, l'hébergeur ou l'éditeur qui ne défère pas à cette demande dans ce délai peut être condamné à une peine d'emprisonnement d'un an et à 250 000 euros d'amende. »
Or le dispositif que vous proposez est exactement le même que celui qui a fait l'objet de cette décision, si ce n'est qu'il ne porte pas sur la pédopornographique et que le règlement précise maintenant que le caractère illicite des contenus doit avoir un caractère manifeste – mais je ne suis pas sûr que cela change radicalement l'appréciation du Conseil constitutionnel.
Par ailleurs, comme cela a été dit, il est regrettable que vous ayez choisi de passer par une proposition, et non par un projet de loi, puisque cela nous prive d'une étude d'impact, ainsi que d'un avis du Conseil d'État.
Enfin, ce dispositif dédouane les pouvoirs publics de leurs responsabilités, qu'il s'agisse de la personnalité qualifiée issue de la CNIL ou des magistrats, qui ne sont pas assez nombreux. Dans certains cas, des décisions s'imposent, mais il faut qu'elles soient respectueuses des droits fondamentaux, notamment de la liberté d'expression. On ne peut pas laisser des algorithmes faire ce travail. Certes, un contrôle humain s'exerce lorsque quelqu'un se plaint d'avoir été censuré, mais quel crédit accorder à ce contrôle, s'il s'exerce au sein des plateformes et après les algorithmes ?