Intervention de Marie-France Hirigoyen

Réunion du mercredi 30 janvier 2019 à 13h30
Groupe de travail sur les conditions de travail à l'assemblée nationale et le statut des collaborateurs parlementaires

Marie-France Hirigoyen :

Qu'il s'agisse du harcèlement moral ou des RPS, le processus est complexe et lié à plusieurs facteurs, de nature psychologique, sociologique et manageriale, qui interagissent.

De manière incontestable, le monde du travail a changé, et pas uniquement dans le secteur privé puisque l'on applique désormais au secteur public les méthodes de management. On met de plus en plus de pression sur les personnes. Le management a perdu de vue la dimension humaine : on manage, même dans le secteur public, avec des chiffres, des objectifs, des contrôles, des process – on ne dit plus « procédure », car on a tout anglicisé. Les salariés sont mis en concurrence pour sélectionner les meilleurs, ils deviennent des rivaux, on leur demande de s'investir énormément et de se réaliser à travers le travail.

Dans ces organisations de travail, il existe des « styles » de management plus ou moins destructeurs : ce peut être un management exagérément autoritaire, qui amène du stress, de la pression, et potentiellement un harcèlement descendant ; ce peut être un management trop laxiste qui laisse les salariés se débrouiller, le plus malin prenant le pouvoir, ce qui peut entraîner un harcèlement entre collègues ou un harcèlement descendant ; ce peut être aussi un management pervers, irréprochable de l'extérieur, mais impliquant des jeux de pouvoir.

Ces nouvelles relations prennent place alors que le monde moderne est soumis aux nouvelles technologies, que nous nous imposons à nous-mêmes une certaine pression et que nous voulons être davantage autonomes. De nouvelles contraintes apparaissent, alors que nous nous voulons être plus libres.

Il faut aussi avoir en tête qu'individuellement, nous avons changé. Nous sommes de plus en plus en quête de reconnaissance, et c'est notre identité que nous mettons en jeu dans le travail – a fortiori dans un lieu de prestige comme l'Assemblée nationale. A la moindre anicroche, on se sentira donc disqualifié. On pourra en attribuer la faute à un collègue, et se sentir, à tort ou à raison, harcelé ; on pourra aussi entrer en burn-out et, par une réaction cynique et protectrice, attaquer les autres. A cause de ce changement de mentalité, le harcèlement, qui a toujours existé, flambe.

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