Intervention de François Rampin

Réunion du mercredi 13 février 2019 à 13h30
Groupe de travail sur les conditions de travail à l'assemblée nationale et le statut des collaborateurs parlementaires

François Rampin, SPAN‑ :

CGT. En premier lieu, je souhaite préciser que le SPAN CGT syndique non seulement les fonctionnaires, mais aussi les contractuels de droit public, qui de notre point de vue devraient être fonctionnaires puisqu'ils occupent des emplois permanents. Cela ne signifie pas que nous nous désintéressions de la question des collaborateurs parlementaires, qui nous sollicitent parfois ; il existe d'ailleurs un syndicat CGT qui fédère cette catégorie et que vous entendrez la semaine prochaine. Nous sommes solidaires de ce qu'ils vous demanderont, mais nous ne parlerons pas en leur nom aujourd'hui.

Nous avons un point commun avec les collaborateurs, qui est d'avoir 600 employeurs ; eux les ont individuellement, nous les avons collectivement, et ces employeurs sont également exigeants. Cela n'est pas toujours simple et doit être pris en compte, car souvent l'administration est la réfraction de ce climat global.

Toujours à titre de propos liminaire, nous observons que, l'année dernière, votre groupe de travail s'était intéressé à la prise en compte du handicap dans le fonctionnement de l'Assemblée nationale. Je souhaiterais appeler votre attention, car cela aussi détermine notre présence à cette réunion, sur l'impression que, depuis un an, non seulement les choses ne se sont pas améliorées, mais se sont dégradées.

Cela est lié à ce que vous avez mis en avant qui est la question des effectifs. S'agissant pour l'Assemblée de la possibilité de recruter des personnes en situation de handicap, le fait qu'il n'y ait plus de concours, que l'on ne recrute plus, n'augmente évidemment pas le nombre des personnes concernées. Cela d'autant moins que les seuls concours officiellement envisagés pour le moment concernent les administrateurs et les rédacteurs des comptes rendus, et qu'à ma connaissance rien n'est prévu pour les personnes en situation de handicap dans ces deux concours.

D'autre part, et vous avez donné ces chiffres, les manques constatés dans les effectifs théoriques sont comblés par le recours massif à l'emploi de contractuels de droit public, que nous syndiquons et défendons lorsqu'ils le souhaitent. Bien évidemment, en tout cas je vous le signale, il n'y a, au sein de ces recrutements, aucune prise en compte du handicap.

C'est d'ailleurs une pratique courante depuis fort longtemps dans le secteur privé, particulièrement à Paris dans les grands magasins, etc. : on tronçonne, coupe et saucissonne afin de descendre en deçà des seuils sociaux, de s'en exonérer, au point d'aboutir à une situation où il n'est plus possible de satisfaire aux obligations prévues par les textes. Cela est inquiétant pour la façon même dont se déroulent les travaux de ce groupe de travail.

Un autre point, qui pourrait paraître anecdotique, mais demeure symbolique, est la question du remboursement des frais de transport. Pour tous les fonctionnaires et les contractuels de droit public de l'Assemblée nationale existait un « remboursement transport » forfaitaire, basé sur le remboursement de la carte Navigo. Il a été décidé que ce remboursement ne s'adresserait plus qu'à ceux qui achètent effectivement ce titre de transport, ce que l'on peut comprendre. Mais les travailleurs handicapés, un certain nombre de collègues, de façon durable ou provisoire pour des raisons de santé, ne peuvent pas prendre les transports en commun, et de ce fait ne perçoivent plus ce remboursement. Ce forfait était sans doute une cote mal taillée, mais le symbole n'en est pas moins curieux.

Vient ensuite la réponse, implicite dans la question que vous avez posée qui est que, dans ces conditions, le débat devient quelque peu théorique. Il faut se figurer ce que représente la chute d'un quart des effectifs ! Singulièrement chez les agents ou les assistants de direction et de gestion (ADG), pour qui cela pose des problèmes majeurs.

Dans le domaine des risques psychosociaux et du harcèlement en particulier, l'action principale réside dans la prévention. Et pour prévenir, ce qui était classique dans les administrations à statut unique, était d'opérer en amont en organisant des changements de service.. Or, le manque d'effectifs empêche la mobilité, les mutations sont complètement bloquées ; il n'y a plus aucune marge, ce qui conduit à s'enfermer dans des situations pouvant survenir entre la hiérarchie et tel ou tel collègue ou entre collègues. On atteint l'absence totale de possibilité de solution.

À cela s'ajoute, et je suis entièrement d'accord avec mon camarade du SNAFAN‑FO, le fait que la fonction publique parlementaire a publiquement été mise en cause tout au long de l'année dernière, avec un léger renouveau à l'automne dernier, alors même que notre statut empêche que nous nous défendions, et sans que nous soyons particulièrement défendus par les autorités politiques – quand il ne semblait pas que ces mises en cause provenaient de personnalités politiques – a été compliqué à vivre par les intéressés. En tout cas cela ne concourt pas à se sentir en sécurité dans son travail quotidien.

Se joint à ça la « réformite », la réforme pour la réforme, alors que nous avions l'impression qu'un certain nombre de choses fonctionnait plus ou moins; que: les rapports sont publiés dans les délais, que la séance tourne et que les amendements sont traités, ce que l'on attend d'une fonction publique parlementaire. Nous tâchons par ailleurs de rendre l'accueil le plus correct et courtois possible. Dès lors, pourquoi réformer pour la réforme?réformer ?

Ces pratiques sont d'autant plus déstabilisantes qu'elles interviennent dans un contexte où les effectifs n'ont plus de marge, où l'on est privé de cette souplesse qui permettait parfois de s'adapter à des situations singulières. La seule adaptation possible porte alors sur les contractuels qui, vu la précarité de leur situation – et cela constitue une zone de non-droit absolu, car dans cette maison les contrats sont au maximum de six ans, ou de trois ans renouvelables une fois, et le plus courammentbien souvent d'un an –, apprennent assez fréquemment la veille si leur contrat sera renouvelé ou non.

Dans ce contexte, on imagine mal comment gérer les risques psychosociaux et le harcèlement.

De ce fait, la place des organisations syndicales n'est pas évidente. Lorsque nous sommes amenés à intervenir, il est généralement trop tard, alors que le stade du contentieux est pratiquement atteint, ; ce qui est absurde. Pour avoir quelque ancienneté dans cette maison, je peux témoigner qu'à une autre époque de telles situations étaient prises très en amont.

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